• MS : Premiers outils mathématiques (1)
    Merci à la mairie de Hochfelden pour cette illustration d'une séance de structuration de la pensée mathématique, sous-domaine du repérage spatial, en école maternelle.

    Un nouveau chantier qui me tenait très à cœur. Sachez d'abord que je me réjouis chaque jour de voir l'École Maternelle sortir de la spirale primarisante dans laquelle elle avait été précipitée depuis une bonne vingtaine d'années.

    Voilà que renaît, appuyée sur des données scientifiques sérieuses, l'école du jeu et de l'apprentissage sans leçons, l'école qui prépare l'enfant en exerçant ses facultés physiques, sensorielles, langagières et sociales plutôt qu'en lui faisant exécuter à vide des exercices d'écriture de lettres et de chiffres, de récitation de listes variées (alphabet, suites de mots-nombres, de noms de jours ou de mois, ...) et de technologie appliquée à la production artistique.

    Évidemment tout n'est pas encore parfait et la Maternelle a de la peine à se dégager du désir d'évaluer sans cesse, de noter chaque progrès, que ce soit par une photo ou un point de couleur, de trouver la suite parfaite d'exercices déguisés en jeux qui permettrait à chaque enfant de chaque classe d'atteindre tel niveau, tel jour et de ne plus jamais le perdre...

    Elle a aussi de la peine à sortir du tri par domaines pour passer à l'observation réfléchie des capacités du milieu ambiant à participer autant que faire se peut au  développement des fonctions cognitives de chacun, en n'oubliant ni la créativité, ni la flexibilité, grandes délaissées de la période Primarisation de l'école des petits !

    Enfin, elle subit encore la tyrannie d'une idée d'un enfant adulte miniature qui, comme un grand, doit s'intéresser aux nombres, aux lettres et aux marqueurs temporels sociaux pour être un bon élève.

    Pour l'aider à trouver le chemin d'une école qui, comme le préconisait déjà Pauline Kergomard en 1882, « [ tienne ] compte des diversités de tempérament, de la précocité des uns, de la lenteur des autres, [ ne cherche pas à ] les faire tous parvenir à tel ou tel degré de savoir [ mais fasse en sorte ] qu’ils sachent bien le peu qu’ils sauront, qu’ils aiment leurs tâches, leurs jeux, leurs leçons de toute sorte, [de façon à ce ] qu’ils n’aient surtout pas pris en dégoût les premiers exercices scolaires », me voilà partie dans la rédaction d'un guide pédagogique sur la structuration de la pensée mathématique en Moyenne Section.

    Après cette première partie, que je vous dévoile aujourd'hui et qui pose les données du problème, en viendront d'autres.
    Chacune sera consacrée à l'un des domaines de cette structuration, à travers toutes les activités de la classe, de manière à ce que continue  à grossir la  boule de neige, agrégat d'impressions, d'intuitions, de paroles, de repères, d'identifications et de raisonnements, que chaque petit enfant pousse devant lui depuis le jour de sa naissance.

    La première est consacrée au domaine-roi de l'année de MS, le repérage spatial.  Elle est déjà prête et c'est très vite que je pourrai vous la proposer. Les autres suivront, à mon rythme, dans l'ordre suivant : Formes et grandeurs - Nombre - Repérage temporel.

    En attendant, voici le titre, la programmation conforme au programme d'enseignement de l'école maternelle, tel qu'il a été fixé dans le BO spécial n°2, du 26 mars 2015, et un essai de progression qui n'en est pas une puisqu'on ne peut ni enrouler ni dérouler une boule de neige et qu'il est très difficile de poser sur le papier une progression en étoile...

    Télécharger « titre + progression.pdf »

    Dans la même série :

     ... ; MS : Premiers outils mathématiques (2) ; MS : Premiers outils mathématiques (3)MS : Premiers outils mathématiques (4) ; MS : Premiers outils mathématiques (5)

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  • Racontamus, écoutatis, comprenunt (7)
    Merci à l'Institution Ste Marie pour cette illustration

    Nous continuons à feuilleter un livre vieux de plus de cent ans... et nous rencontrons des concepts éducatifs à la pointe de l'innovation, aux dires de certains.
    Ainsi, dès le premier paragraphe, Miss Sara Cone Bryant nous parle d'appeler à la rescousse nos capacités d'empathie, car c'est cette empathie avec les personnages du conte qui nous permettra de toucher et révéler le sentiment empathique de nos auditeurs.
    Plus tard, elle nous demande, comme certain pédopsychiatre très en vogue, de remiser notre surdose d'amour-propre de spécialiste de l'édification éducative des tout-petits, et de la remplacer par de la simplicité et du naturel venant du cœur.
    Enfin, elle nous conseille de faire en sorte que les enfants se créent des images fortes pour s'approprier l'histoire jusqu'à savoir la raconter eux-mêmes.

    Mais il y a aussi du tellement innovant que cela nous étonne, nous heurte même parfois.

    • Miss Sara Cone Bryant nous parle du mouvement très rapide d'une histoire, là où nous appuyons pesamment pendant plusieurs semaines sur les coutures d'une moufle qui craque.
    • Elle nous propose la simplicité, garante d'une bonne compréhension, mais nous met en garde contre la trivialité, pourtant reconnue essentielle par tel grand ponte de la littérature simplifiée jusqu'au niveau supposé de ceux qu'il semble considérer en lui-même comme des « indigents indigènes »...
    • Elle nous met à nouveau en garde contre les « histoires à tout faire » qu'elle souhaite bannir des écoles en ce qu'elles ennuient les enfants et les détournent du plaisir de lire.
    • Elle nous dit que notre plaisir peut être ailleurs que dans la nouveauté d'une histoire qui est nouvelle pour nous et nous encourage à faire semblant de nous intéresser à celles que nous avons ressassé un nombre incalculable de fois parce que nous savons que ce sont celles-ci qui conviendront à nos élèves.
      Elle nous promet qu'alors nous découvrirons un autre plaisir, une autre motivation que celle de dire Roule Galette pour la trente-sixième fois ou Les trois petits cochons pour la vingt-cinquième fois.

    COMMENT RACONTER
    DES HISTOIRES
    À NOS ENFANTS

    d'après
    MISS SARA CONE BRYANT
    F. NATHAN

    CHAPITRE IV
    COMMENT RACONTER UNE HISTOIRE
    (2e partie)

    La disposition d'esprit du conteur

    Il est bon que l'esprit de l'histoire s'impose dès le début , et cela dépendra de la clarté et de l'intensité de votre disposition initiale.  Un acte de mémoire et de volonté est nécessaire. 
    Exemple : Le vilain petit canard, d'Andersen. 
    Avant d'ouvrir les lèvres, rappelez-vous la pathétique série des mésaventures du petit cygne comme un composé d'ignominies imméritées, d'étonnements ridiculisés, sous-tendu de satire dirigée contre les préjugés vulgaires. Ajoutez-y le charme du style d'Andersen et vous êtes prêts : le petit canard trotte dans votre imagination, vous plaignez ses souffrances et vous anticipez son triomphe avant même de commencer.
     
    Ainsi donc, l'esprit du récit devra s'imposer dès le début, avec autorité, et s'affirmer, de plus en plus, dans la mesure àù le conteur se l'est assimilé et s'en fait l'interprète conscient.

    Manière de dire l'histoire

    En bonne disposition de vous-même, ayant vos auditeurs commodément installés autour de vous, sachant votre texte, vous commencez à le dire. 
    Dites-la, alors, simplement, logiquement, dramatiquement, avec entrain.

    Simplicité

    Simplement s'applique à la manière comme à l'expression. Pour la manière, c'est sans affectation, sans pose ou prétention. Il est ridicule de dénaturer sa voix, de parler avec mièvrerie, de penser à la valeur édifiante ou éducative que l'on fait. C'est difficile pour ceux qui sont sous la malédiction d'une surabondante mesure d'amour-propre. 
    Le remède est de perdre son art et de penser à l'histoire de manière si absorbante qu'on n'ait plus le temps de penser à soi.

    Certains éducateurs pensent qu'on ne devrait pas donner aux enfants une littérature trop simplifiée. Ils nous disent que les jeunes préfèrent les choses au-dessus de leur portée.  
    Il peut y avoir du vrai dans le cas d'histoires lues par l'enfant pour lui-même. Pour les autres, il faut se souvenir que le mouvement d'une histoire racontée est très rapide : une conception qui n'est pas saisie au passage est irrévocablement perdue.
    L'art de conter est un art d'amusement et son but est sacrifié si les idées et les images ne se glissent pas assez facilement dans le conscient de l'enfant pour lui éviter la sensation d'effort.
    Il va sans dire cependant que simplicité ne veut pas dire trivialité.

    Mouvement logique

    Le mouvement logique est une qualité très importante. L'histoire que l'on raconte est faite pour être regardée. Son action doit être ininterrompue et d'une vitesse croissante, se déroulant avec rapidité, pour se terminer par une « chute » effective.
    Des digressions, des commentaires, détruisent ce mouvement. Les incidents doivent être rapportés l'un après l'autre, sans autre explication, ni description que ce qui est absolument nécessaire à la clarté du récit*, qui doit se dérouler logiquement.

    * : Souligné par moi-même. Attention aux récits racontés pour se faire plaisir qu'aucun élève, sauf Augustine-Isaure et Côme-Gonzague, ne suit avec plaisir et intérêt. Si Emma et Léo décrochent, on s'arrête et on explique !

    Quant aux explications, et à la morale, à quoi servent-elles ? La meilleure définition qu'on en puisse donner a été fournie par un enfant, à propos de récits bien intentionnés :
    « Les histoires sont jolies, mais il y a toujours un petit bout d'ennuyeux à la fin ! »

    Avantages du conteur sur l'auteur

    L'auteur doit faire impression juste avec des mots. Le conteur a sa voix, et son visage, et son corps, pour le faire. Il n'a besoin que d'un verbe faisant image au lieu de deux, d'un seul adjectif approprié au lieu de trois. Souvent même, une pause et un geste expressif font tout le travail. 
    On peut dire ici que c'est un bon artifice de description que de répéter une épithète ou un membre de phrase déjà employés, quand il s'agit de la même chose. Cet artifice est inconscient et instinctif chez les gens qui ont le don de conteur. Mais il faut du bon sens dans l'emploi qu'on en fait . Son usage doit rester modéré.
    Exclure les éléments étrangers et rechercher la brièveté, la suite logique des idées, la netteté de l'élocution, c'est raconter une histoire logiquement.

    Expression dramatique

    Après la simplicité et la façon directe, voici une autre qualité qui constitue une pierre d'achoppement pour beaucoup : dire l'histoire dramatiquement.
    Cela ne signifie pas à la manière des gens de théâtre, ni avec excitation ou excès de geste ou de parole. C'est se jeter de tout cœur dans la mêlée, en s'identifiant avec le caractère ou la situation du moment, en se mettant dans la peau des personnages.
    À tout ceux qui n'ont pas le don de l'expression et du geste, je voudrais répéter le conseil déjà donné
    :
    Ne forcez pas pas votre nature. Ne faites rien que vous ne puissiez pas faire spontanément et avec plaisir. Mais concentrez tous vos efforts sur la disposition intérieure et spirituelle ; élargissez votre intensité d'appréciation, de sentiment, d'imagination.
    Le conteur ne doit pas jouer les personnages de sa narration, il essaie simplement d'éveiller l'imagination de ses auditeur, pour qu'ils puissent peindre les scènes eux-mêmes.

    Il faut voir ce qu'on raconte

    La valeur dramatique d'un interprète dépend surtout de la clarté et de la puissance avec laquelle il se représente les événements et les types qu'il dépeint. 
    Il faut tenir l'image devant la vue de son esprit, et se servir de son imagination pour s'assimiler chaque action, chaque incident, chaque apparition. Vous devez voir ce que vous racontez, vous devez même voir plus que vous ne racontez car les enfants ne voient en général aucune image que vous ne voyez pas. 

    Entrain

    Il faut dire son histoire avec entrain, avec plaisir personnel. Rien n'est plus contraire à la jouissance d'un auditeur que l'effort évident de la part de celui qui prétend l'amuser.
    Hélas, il est parfois difficile, à la fin d'une matinée de dur travail de s'intéresser à une histoire qu'on a déjà redite vingt fois...

    Choisir et « faire semblant »

    À cela, je répondrai deux choses :

    1. Il faut avoir la sagesse de choisir des histoires qui vous ont intéressés à l'origine et en avoir une collection assez complète pour pouvoir varier.
    2. Et quand vous êtes trop fatigués pour avoir envie de redire l'histoire qu'il vous faut dire à ce moment-là, il ne reste qu'à faire semblant.

    Faites semblant, aussi fortement que vous le pouvez, d'être intéressés par l'histoire.
    Et le résultat sera que vous serez intéressés par votre effort même, et aussi par l'intérêt que vous susciterez chez les enfants et qui se lira sur leurs visages expressifs. 

    Élocution

    Il y a beaucoup à dire sur la manière de raconter une histoire. Un chapitre entier pourrait être consacré à la façon de moduler sa voix, à la prononciation, etc., sans épuiser le sujet.
    Nous nous contenterons de quelques suggestions générales utiles.

    Danger de l'affectation

    J'insiste à nouveau : soyez simple.
    L'affectation est la pire ennemie d'une élocution agréable.

    Inutilité du parler trop haut

    Évitez d'élever la voix comme le font facilement les personnes qui parlent souvent dans de vastes pièces.
    Cela ne sert qu'à fatiguer les cordes vocales. Il n'est jamais nécessaire de crier.


    Netteté d'articulation

    C'est vraiment la qualité psychologique de son de la voix qui en facilite la compréhension à l'oreille. La voix tranquille, reposante, persuasive d'un orateur qui connaît sa puissance va droit au but, mais un parler trop fort produit de la confusion.
    Ne parlez jamais fort mais parlez nettement, en articulant, avec une légère pause entre les mots, et en phrasant bien, en dirigeant votre pensée vers les auditeurs les plus éloignés de vous.

    Pour nous résumer

    • La méthode propre à nous assure le succès dans l'art de conter comprend la sympathie, la compréhension, la spontanéité.
      [Aujourd'hui, nous résumerions ces trois termes par celui d'empathie.] 
    • Il faut apprécier l'histoire et l'apprendre.
    • Il faut se servir de son imagination réalisatrice comme d'une force vivifiante. 
    • il faut dire l'histoire, dominé par l'esprit de ce récit, avec tout son cœur, simplement, vivement, joyeusement.

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    2 commentaires
  • Préparer sa classe en Élémentaire
    Merci à snuipp.fr pour cette illustration

    Sans rire, elle a raison, la dame... Cette réflexion sur son métier, sur sa posture en classe, face à ses élèves, dans toutes leurs particularités, c'est sans aucun doute l'une des facettes les plus importantes du temps extrascolaire de préparation.

    C'est pour cela que, chaque été, je conseille aux collègues d'arrêter de prévoir leur année scolaire à venir dans ses moindres détails, séquences après séquences, matériel après matériel, rituels après rituels... et de se concentrer sur la première période, la première quinzaine et le premier jour.

    La première période, pour tout ce qui est à long terme, la première quinzaine pour ce qui est matériel à prévoir à moyen terme et le premier jour pour le déroulement quart d'heure par quart d'heure.

    Préparer le long terme

    Préparer le long terme, c'est mettre en place de beaux tableaux prévisionnels où on liste les contenus. Je ne sais pas si, en novlangue, cela s'appelle des progressions ou des programmations.

    En élémentaire, c'est assez rapide, surtout si on fait confiance aux auteurs des manuels qu'on a choisis pour sa classe. Si on ne leur fait pas confiance et qu'on les utilise quand même, soit parce qu'ils nous ont été imposés, soit parce que nous n'avons pas les crédits pour les renouveler, c'est plus difficile. Le mieux est sans doute de les contourner en les utilisant a minima et en les complétant par des ressources photocopiables libres de droits. On se retrouve alors dans cette relation de confiance avec les auteurs et la situation redevient rapide et simple.

    Recette :

    • Prendre le manuel choisi et noter le nombre total de pages.
    • Diviser ce nombre par 5 (par 4 pour une méthode de lecture CP).
    • Recopier alors dans le tableau les titres de leçons du premier cinquième (ou quart pour la méthode de lecture CP) : votre « progressamation » est prête.
      Vous pourrez recopier à côté les intitulés de programmes (compétences, capacités, connaissances) pour faire plaisir à votre hiérarchie si vous le souhaitez.
    • Diviser le nombre obtenu pour chaque manuel par le nombre de semaines de la première période .
    • Vous saurez alors à peu près combien de jours passer sur telle page (donc sur telle notion), combien sur telle autre et pourrez affiner la préparation matérielle de la première quinzaine.

    Le reste de l'été sera consacré à une préparation à très très long terme : l'enrichissement de sa culture pédagogique et encyclopédique :

    • lecture des guides pédagogiques correspondant aux manuels choisis
    • lecture des grands noms de la pédagogie en commençant par les plus anciens pour savoir d'où l'on vient et où l'on va : F. Buisson, P. Kergomard, M. Montessori, O. Decroly, C. Freinet, ...
    • articles et auteurs actuels
    • révisions orthographiques, grammaticales, mathématiques, scientifiques, historiques, géographiques, littéraires, etc. si le besoin s'en fait sentir.

    Prévoir le matériel à utiliser à moyen terme

    Une petite constatation : bien souvent, ce sont les méthodes qui utilisent le moins de matériel à fabriquer qui sont les plus efficaces. 

    Prenez Borel Maisonny au CP, par exemple. Un manuel et un cahier seyes agrandi par élève, deux couleurs de craies ou de feutres à tableau, la photocopie des gestes à afficher au mur un par un (soit, pour la première quinzaine, quatre à huit gestes, selon l'avancement de l'apprentissage en GS), les premières fiches d'exercices prêtes à utiliser, éventuellement les personnages Alphas, et c'est tout !

    Installer une notion, que ce soit en français ou en mathématiques, ça doit être simple et l'esprit de l'enfant doit se centrer rapidement sur la notion elle-même. Cela nécessite de vite quitter l'habillage qui n'est qu'un enrobage visant à focaliser l'attention des élèves sur un objet d'étude. Des études sérieuses ont révélé que, particulièrement pour les élèves en difficulté, ceux qui sont dans le « faire » plutôt que le « comprendre », ces longues séances de détournement, contournement, approche à bas bruit font plus souvent obstacle à la compréhension qu'autre chose...

    Au CP, ce seront des étiquettes mots, des lettres plastifiées, des fiches quotidiennes, une ou plusieurs histoires à lire aux enfants, un ou deux poèmes et un chant en français oral et écrit ; des jetons, des bouliers, des perles Montessori, de la monnaie factice, des réglettes Cuisenaire, des mathcubes, des cartes représentant les doigts de la main, les points des dés, les chiffres et les premiers signes mathématiques (+, -, =, >).

    Du CE1 au CM2, si on a pu trouver une méthode de lecture, une d'étude de la langue et une de mathématiques qui nous conviennent, ce sera rien ou presque rien en français (un cahier, du papier affiche pour garder des traces écrites au mur, des gros feutres pour les écrire avec les élèves) et le matériel de base en mathématiques (règle, équerre, compas, jetons, bouliers et mathcubes, monnaie et horloges factices, balance Roberval et masses marquées, récipients étalonnés en litres et fractions du litres et, pour les plus grands, en décilitres, centilitres et millilitres, ...).

    Une fois ceci fait, il faudra peut-être passer un peu plus de temps sur la préparation des séances de culture humaniste et scientifique :

    • du temps pour collecter le matériel nécessaire pour les expérimentations et les observations
    • du temps pour s'informer sur les sujets qu'on abordera jusqu'à les posséder parfaitement afin d'éviter les bourdes, les imprécisions, les confusions

    Cela permettra d'aborder sereinement la préparation matérielle et pratique, quart d'heure par quart d'heure de la première journée.

    Le court terme, jour après jour

    Le plus simple est d'utiliser un tableau tracé à la main ou grâce à un logiciel de traitement de texte. Ce tableau sera copié sur l'emploi du temps quotidien et le travail de chaque jour sera de compléter chacune des cases de la journée.

    Ceci sera encore plus simple si on a choisi un emploi du temps extrêmement routinier et simple :

    • CP : français, mathématiques et 1/2 séance d'EPS le matin ; français, questionner le monde, arts, LVE et 1/2 séance d'EPS l'après-midi
    • CE1 à CM2 : Français, maths le matin ; autres matières l'après-midi.

    Au CP : 

    Les journées se succèdent immuablement, les acquis du jour faisant forcément suite aux acquis de la veille. En sachant cela, on peut déjà écarter toutes les méthodes qui ne suivent pas ce schéma (ce que j'appelle des méthodes chambres à part).
    Préparer sa journée du lendemain est donc enfantin :

    Français écrit et oral : Titre de la séance

    - Découverte du jour : voir guide pédagogique p. ..., séance 1.

    - De la phono à l'écrit : tels sons, telles lettres, voir GP p. ..., séance 2

    - Écriture : tels gestes, telles lettres, telles sons, GP p. ..., séance 3

    - Lecture : manuel, p. ...

    - Littérature :
    Poésie : lecture offerte, commentaires dialogués, apprentissage des deux premiers vers 
    Conte : titre, premières pages, commentaires dialogués 

    Mathématiques : Titre de la séance

    - Manipulations : voir GP, p. .... [matériel à préparer : liste]

    - Fichier de l'élève : p. ..., voir GP, p. ...

    Questionner le monde : Titre de la séance

    - Observation : sens utilisés - repères à pointer lors des commentaires dialogués
    - Trace à produire : dessin - schéma - dictée à l'adulte - ...

    Arts :

    - Arts plastiques : Titre de la séance - Organisation (à sa place, petits groupes, chevalets, ...) - Matériel à préparer (liste et modalités de distribution)
    ou
    - Musique : Écoute (chant ou extrait musical) - Commentaires dialogués - Apprentissage (rythme, échauffement vocal, premier couplet / rythme, expression corporelle libre, commentaires dialogués)

    Éducation physique et sportive

    - Échauffement : Jeu choisi (organisation, déroulement, but)
    - Grand(s) jeu(x) : Jeux choisis (organisation, déroulement, but)
    - Retour au calme : Jeu choisi (organisation, déroulement, but)

    Du CE au CM :

    Nous retrouverons la même organisation qu'au CP en Mathématiques, Questionner le monde (ou culture humaniste, scientifique et technique pour le Cycle 3), Arts et EPS. Prière de s'y reporter.

    Une petite précision pour le CM et le CE2 : il peut être intéressant d'avoir un corrigé tout prêt pour les exercices de français et surtout de mathématiques. Cela évite de perdre du temps à recompter toutes les opérations, relire tous les problèmes et suivre pas à pas la construction géométrique de chaque figure...

    Quant au Français, les élèves sachant lire et écrire, la préparation sera un peu différente :

    Français écrit et oral : Titre de la séance

    - Littérature et langage oral :
    Littérature : Manuel p. ... ou Roman p. ... à ... ; commentaires dialogués  (thèmes à aborder, repères à faire sentir)
    Poésie : Titre, modalités de découverte (lecture individuelle, lecture offerte), commentaires dialogués, modalités de diffusion (copie d'une strophe, du poème entier, photocopie à coller ; illustration en classe, à la maison)

    - Étude de la langue : Titre de la leçon
    Découverte : voir GP. p. ...
    Exercices écrits : n° ..., ..., ... p. ...

    - Écriture : tels gestes, telles lettres (minuscules ou majuscules)

    - Dictée : texte de la dictée

    - Production d'écrits : Titre
    Matériel proposé (image - sujet - thème) - Modalité de production (premier jet individuel au brouillon - production individuelle phrase à phrase - production collective au tableau - ...)

    Voilà, pour un premier jet rapide, un jour de changement d'heure, je trouve que c'est déjà pas mal. Si vous souhaitez intervenir, pensez à laisser un commentaire. Pour les questions, c'est pareil, je développerai si vous le souhaitez.


    21 commentaires
  • Racontamus, écoutatis, comprenunt (6)
    Merci à Plume, et à son article Les dessins libres en maternelle, sur son blog.

    Rien de nouveau sous le soleil... Déjà, il y a plus de cent ans, les « chercheurs en sciences de l'éducation » conseillaient de théâtraliser tout en restant naturel,

    Toutefois, plus que ceux d'aujourd'hui, ils laissaient le libre-arbitre à leurs lecteurs. Nous verrons que, dès les premiers conseils, ils préféraient leur donner des recettes pour réussir leur entreprise plutôt que de leur fournir le « poisson » qui les sauverait momentanément de la famine : apprendre à détecter la qualité essentielle d'une histoire, savoir s'en pénétrer, manière de dire, ... Le tout émaillé d'anecdotes et d'exemples vécus qui rendent le propos intelligible et crédible, comme d'habitude.

    Nous verrons aussi qu'ils étaient très attentifs à ne pas « substituer l'empire de la forme à l'empire de l'idée » et ça, c'est une différence capitale, majuscule, fondamentale tout comme le désir de procurer une « méthode qui conduise à la liberté et non à l'esclavage ». Et nous verrons aussi hélas tout à la fin que les enfants ont bien changé en un siècle et qu'il convient de demander au « bon sens de trancher de lui-même la difficulté du moment »

    Nota bene : Le chapitre n'est pas complet, loin s'en faut. Suite au prochain numéro.

    COMMENT RACONTER
    DES HISTOIRES
    À NOS ENFANTS

    d'après
    MISS SARA CONE BRYANT
    F. NATHAN

    CHAPITRE IV
    COMMENT RACONTER UNE HISTOIRE
    (1re partie)

    Nature essentielle de l'histoire.

    Comment dire une histoire ? C'est une brève question qui exige une longue réponse.
    L'histoire doit être une œuvre d'art, un tableau. Comme les tableaux, il en est de toutes sortes.

    Chaque histoire a sa place définie et, quelle que soit sa qualité, le conteur en est l'interprète.

    Qualités nécessaires au conteur

    Sa première qualité sera d'avoir vu, interprété et compris ce « tableau ». Avant tout, il faut posséder, saisir, sentir intimement avant de chercher à répandre.

    Le conteur doit assimiler l'histoire pour pouvoir la raconter.

    Nécessité d'assimiler l'histoire

    Même pour Le Cochon récalcitrant ou Le Chat glouton ! Ce qui doit se transmettre dans une histoire, c'est son essence spéciale, sa saveur caractéristique, sa physionomie propre et son point de vue particulier : humoristique, pathétique ou instructif.
    L'esprit doit devenir sensible à ces différences, sans quoi il ne pourra jamais bien dire une histoire.
    Deux observations découlent de ces prémisses :

    1) Cultivez votre instinct, donnez-vous la peine d'acquérir une justesse d'appréciation croissante ;
    2) Ne racontez jamais une histoire qui ne vous dit rien à vous-même.

    Une expérience caractéristique

    Expérience vécue par Miss S. Cone Bryant, conteuse elle-même, et non prescriptrice de « narrations à visées pédagogiques compétencielles ». 

    Il y a un certain conte à dormir debout, qu'une de mes amies racontait souvent, déclenchant immanquablement le fou-rire de ses auditeurs. Pour moi, ce conte n'avait rien de drôle : je ne pouvais pas m'en amuser.
    Poussée par mon amie, je tentai de le raconter de mon mieux. Quelques sourires polis me firent comprendre que ce n'était pas un échec complet. J'essayai à nouveau, avec d'autres auditoires, mais ce fut partout le même résultat. Je trouvais l'histoire absurde et mes auditeurs le sentaient, malgré tous mes efforts. Alors j'ai abandonné cette histoire.

    Quelques mois plus tard, je trouvai l'analyse de cette histoire en feuilletant mes notes et, la relisant négligemment, j'en saisi tout à coup le véritable sens ! Oui, elle était drôle, et je me mis à rire toute seule.
    Le lendemain, je dis l'histoire devant un auditoire d'enfants et d'adultes et chaque période fut ponctuée d'éclats de rire. Cette fois, l'interprète était dans le ton !

    Ce que je n'avais jusqu'alors pas senti, je n'avais bien sûr pas su le rendre et j'avais fait passer dans l'auditoire mon propre sentiment de sa niaiserie.

    Cette histoire m'évoque mon proppre état d'esprit devant les albums d'un auteur pour enfants très en vogue. Lorsque je lisais ses albums à mes élèves, année après année, rien, ou très peu de réactions... Visiblement, faute d'avoir compris moi-même, je n'avais pas su leur donner envie : les livres que j'avais lus restaient dans la bibliothèque, n'étaient pas feuilletés par les enfants et personne ne réclamait de relecture.
    Et puis, un jour, mes petits-enfants en ont reçu un qui m'a tout de suite plu... et que j'ai dû lire bien mieux que d'habitude puisque, depuis, ils me le réclament à chacun de leur passage et qu'ils l'ont relu eux-mêmes mainte et mainte fois.

    Tout conteur a ses limites d'appréciation ; certains types d'histoires lui réussiront toujours mieux que d'autres. Il n'y a pas de raison pour dire mal un récit quelconque, et naturellement, avec l'exercice...

     Le nombre de ceux que l'on dit bien augmente à mesure que s'accroît la capacité d'appréciation.

    De quelle manière on acquiert la maîtrise des faits

    Il est sage de savoir jusqu'où on peut aller et de ne jamais essayer aucun récit auquel on soit forcé de dire :
    « Toi, tu ne me plais pas !
    »

    Nécessité primordiale : une juste appréciation de l'histoire à raconter.

    Une fois ce point atteint, le secret du succès réside dans le degré d'intensité avec lequel le conteur veut faire passer son impression chez l'auditeur.

    Il doit se produire quelque chose approchant de la suggestion hypnotique, quant au rapport de l'effort et de l'effet, et quant à l'oubli de soi-même, chez l'orateur comme chez l'auditeur.

    Tout le monde n'a pas la capacité spontanée de sentir le pouls de son auditoire, ce courant d'émotions qui s'établit ou se refuse quand, par son attention ou son indifférence, l'auditoire procure une joie ou inflige une torture à l'orateur. Mais c'est un sens qui peut se développer par la pratique et le travail personnel.

    L'art de raconter est soumis à des lois qu'il importe de connaître et de comprendre.

    Les suggestions qui suivent ont pour but de dégager ce qui en paraît être les fondements.

    Nécessité de savoir l'histoire

    Il faut savoir son histoire.

    La parole hésitante, l'omission d'un nom ou d'un incident, le retour en arrière pur chercher à renouer les anneaux brisés de la chaîne des événements ; les répétitions involontaires, la faiblesse générale de l'exposé, provenant d'une maîtrise incomplète des faits, tous ces défauts gâtent le plus joli récit.

    L'histoire dans ce qu'elle a d'essentiel doit se présenter si clairement à l'esprit que le conteur ait juste à la laisser couler de ses lèvres, avec la liberté inconsciente du souvenir.

    Vrai aussi avec les histoires qu'on lit, même si cela est plus simple. L'album que l'enfant a apporté, qui traîne sur le bureau depuis le matin sans qu'on n'ait eu le temps ne serait-ce que de jeter un coup d'œil distrait aux illustrations, devient généralement une histoire que l'on dira mal, provoquant de la part de notre auditoire les tortures évoquées tout à l'heure.

    Assimilation plutôt que mémorisation

    La mémorisation détruit la liberté de réminiscence, enlève la spontanéité, substitue l'empire de la forme à l'empire de l'idée. L'assimilation mène à une parfaite intuition du sens de l'histoire, accompagnée d'une réelle maîtrise de la forme littéraire du récit.

    Pour y arriver, le premier travail est de réduire la narration à ses éléments constitutifs. Dépouillez-la des artifices de style, des descriptions, interpolations, digressions, et cherchez simplement  ce qui arriva 

    Vous obtiendrez une conception claire de la gradation qui doit se compléter ensuite par une perception nette des incidents successifs qui mènent au dénouement.

    On a alors la charpente de l'histoire ; il ne reste plus qu'à faire les raccordements.

    Ma méthode personnelle

    J'ai toujours employé le moyen enfantin de « parler » mon sujet : à voix basse ou d'un ton élevé et pénétrant, je raconte, encore et encore, à un auditeur imaginaire, l'histoire que j'étudie.
    Cet auditeur m'a toujours été présent car, en parlant tout haut, on amène instantanément à la lumière toutes les défaillances de la mémoire, tout comme on entend à coup sûr la pauvreté de l'expression, la faiblesse de l'image, l'imparfaite assimilation du sens de l'histoire .

    Ce n'est pas un procédé flatteur mais, une fois les fautes corrigées, cette méthode procure la confiance en soi, le sentiment de sécurité qui donne au conteur une parfaite spontanéité devant un auditoire réel. À peine une épithète ou une phrase qui soient identiques à celles du premier essai, mais les épithètes et les phrases viennent en foule à l'esprit.

    L'excellence de cette méthode est qu'elle conduit à la liberté et non à l'esclavage.

    Exception notable

    Il faut cependant noter une exception à la règle qui interdit la mémorisation.

    Les passages particulièrement beaux ou caractéristiques de l'original doivent être reproduits tels quels là où ils s'identifient avec la perfection du texte.

    Exemple : on conservera la phraséologie des conversations dans les conte des Trois Ours ou du Petit Chaperon Rouge ou dans les Fables de La Fontaine. 

    Suggestions d'ordre pratique

    Il faut que les enfants soient assis sur une seule rangée, pas trop loin, et directement en face de vous.

    Le demi-cercle est le meilleur mode d'arrangement pour un petit groupe d'enfants.
    Le conteur doit se placer vis-à-vis d'eux, à un point opposé au centre de l'arc et non au centre :

    Racontamus, écoutatis, comprenunt (6)

    Il importe

    • de ne pas trop étendre le demi-cercle
    • de ne pas avoir d'enfants assis directement les uns derrière les autres
    • de ne pas avoir d'enfants qui ne voient pas le visage du professeur

    Il est naturellement très désirable d'obtenir le silence avant de commencer, mais c'est moins important que de se placer, soi et ses auditeurs, dans la disposition d'esprit d'une attente joyeuse et récréative.
    Si l'atmosphère est contre vous, il sera plus sage de se fier à la puissance captivante de l'histoire elle-même et d'éviter l'irritation causée par des efforts infructueux pour rétablir l'ordre.
    Enfin, une fois en train, ne brisez jamais le charme magique par une apostrophe à un enfant ou un autre pour leur dire de cesser leurs jeux ou de s'intéresser à vos paroles.

    C'est probablement votre faute s'ils n'écoutent pas. Si vous avez choisi une belle histoire et que vous la dites bien, ils ne pourront s'empêcher d'écouter [note personnelle : attention aux yeux, cent treize ans, pour un texte, parfois, c'est vieux !] si ce sont des enfants normaux. Et s'ils sont anormaux, vous ne devez pas risquer de troubler l'attention des autres en vous occupant d'eux.

    Là, je me dois d'intervenir... le rouge au front. Soit nous avons beaucoup d'enfants « anormaux » dans nos classes, soit nous sommes vraiment de piètres conteurs et conteuses...
    Ne m'en veuillez pas
    , Miss, mais je tiens à nuancer votre propos, ce n'est pas probablement mais plutôt de temps en temps notre faute. Seulement de temps en temps !

    Nos enfants d'aujourd'hui sont élevés dans le bruit des téléviseurs, des tablettes, des écrans de toutes sortes. Partout autour d'eux, au supermarché, dans la rue, dans les transports en commun, la parole humaine se déroule sans s'interrompre jamais. Ils entendent, entendent, entendent... mais écoutent rarement. 
    Notre rôle d'éducateurs, c'est de les rendre « toute ouïe » par tous les moyens et, souvent, c'est très difficile, surtout si, convaincus par votre propos, parents et enseignants qui nous ont précédé ont débité leurs histoires au kilomètre, sans jamais s'interrompre, persuadés qu'un jour, ça allait venir et que Tommy ou Ethel arrêteraient de se balancer sur le banc, de titiller leurs voisins, de chercher à attirer l'attention sur eux ou de somnoler, l'œil morne, et se passionneraient d'eux-mêmes, enfin, en écoutant les aventures de Blaise, le poussin masqué !

    Heureusement que vous vous rattrapez un peu ensuite, sinon, je serais très en colère, savez-vous...

    Je dis : n'interrompez jamais votre récit. Peut-être faudrait-il ajouter : « si vous le pouvez » car, naturellement, il y a des cas exceptionnels, et des enfants exceptionnels aussi.

    Il faut laisser une certaine latitude pour l'heure où le bon sens viendra trancher de lui-même la difficulté du moment.

    À suivre, sans doute la semaine prochaine :

     La disposition d'esprit du conteur - Manière de dire l'histoire - Simplicité - Mouvement logique - Avantages du conteur sur l'auteur - Expression dramatique - Il faut voir ce qu'on raconte - Entrain - Choisir et « faire semblant » - Élocution - Danger de l'affectation - Inutilité du parler trop haut - Netteté de l'articulation

    Dans la même série :

    ♥ Racontamus, écoutatis, comprenunt :

    Racontamus, écoutatis, comprenunt - 1 ; Racontamus, écoutatis, comprenunt - 2Racontamus, écoutatis, comprenunt - 3Racontamus, écoutatis, comprenunt - 4Racontamus, écoutatis, comprenunt - 5Racontamus, écoutatis, comprenunt - 6Racontamus, écoutatis, comprenunt - 7 ; Racontamus, écoutatis, comprenunt - 8Racontamus, écoutatis, comprenunt - 9

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    Contes à lire, Contes à dire (0) (Sommaire) ; Contes à dire, contes à lire - 1 ; Contes à dire, contes à lire - 2 ; Contes à dire, contes à lire - 3 ; Contes à dire, contes à lire - 4Contes à dire, contes à lire - 5 ;  Contes à dire, contes à lire - 6Contes à dire, contes à lire - 7Contes à dire, contes à lire - 8Contes à dire, contes à lire - 9Contes à dire, contes à lire (10)Contes à dire, contes à lire (11) ; Contes à dire, contes à lire (12) ;

    Bientôt l'époque des commandes :

    N'oubliez pas :

    Pour une maternelle du XXIe siècle

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    Écrire et Lire au CP

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    Fichiers et manuels de Mathématiques en élémentaire

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  • Racontamus, écoutatis, comprenunt (5)
    Illustration de K. Turska, pour Le Roi de la Rivière d'Or, de Ruskin.

    Les problèmes que l'on rencontre lorsqu'on lit aux enfants une histoire en un, deux ou trois jours ne sont pas les mêmes que ceux qui assaillent nos collègues qui exploitent jusqu'à plus soif quelques cinq à six contes par année scolaire.
    En voici quelques-uns, accompagnés bien sûr, comme toujours depuis le début de cette lecture de conseils pour y arriver et d'exemples pour illustrer.

    Je tiens à rassurer tous ceux qui se sentent incapables d'un tel travail : nous disposons de nos jours d'une offre abondante de contes adaptés, certains très simplement, d'autres avec plus de détails. Cela peut nous dispenser de ce travail certes très intéressant et très formateur (de la vraie formation de professeur des écoles efficace et pertinent) mais long et délicat.

    Et pour ceux qui voudraient se lancer, je me permets de leur conseiller deux choses :

    • user et abuser du copié-collé et du travail sur écran. On coupe, remplace, revient en arrière, trouve des synonymes, reprend des ritournelles facilement et sans efforts
    • lire à voix haute sa production et s'écouter la dire. On constate alors l'effet produit sur soi-même et, l'habitude aidant, sur le public enfantin à qui le conte est destiné

    COMMENT RACONTER
    DES HISTOIRES
    À NOS ENFANTS

    d'après
    MISS SARA CONE BRYANT
    F. NATHAN

    CHAPITRE III
    ADAPTATION

    Nécessité d'adaptation

    Il n'est pas très difficile de choisir une histoire intéressante mais il n'est jamais facile d'en trouver assez. Les récits valant la peine d'être contés sont rares et, parmi ceux qui répondent à ce critère, tous ne sont pas lisibles dans leur forme écrite.
    À moins qu'on ne soit capable de changer la forme d'un récit, on risque de se trouver embarrassé.

    Comment raccourcir une histoire trop longue

    La nécessité d'adaptation la plus commune se rencontre dans les histoires trop chargées de faits ou trop longues alors qu'elles apporteraient quelque belle leçon.

    Ici, Miss Sara Cone Bryant cite deux contes : L'histoire du Poêle de Nuremberg (en français, Le petit Comte), dans la version originale de son auteur, Ouida, et celle du Roi de la Rivière d'Or, adapté d'après le conte de Ruskin, beaucoup plus long.
    Le premier conte et l'adaptation du deuxième se trouvent reproduits dans son ouvrage. On y accèdera en cliquant sur les liens.

    En ce qui concerne le Poêle de Nuremberg, le problème réside dans l'élimination ; pour le Roi de la Rivière d'Or, c'est une affaire de réarrangement. Ces exemples sont extrêmes mais les changements à opérer sont toujours similaires, à divers degrés.
    Condensation et réarrangement, voilà les formes presque constantes de l'adaptation.

    Condensation. Exemple : le Poêle de Nuremberg

    Le récit original a 2 400 mots, beaucoup trop long pour être conté tel quel. Qu'enlever ? Que garder ?
    Revenons au texte primitif et lisons-le avec attention.

    Analyse du Poêle de Nuremberg

    Le point culminant est la découverte d'Auguste par le roi et l'offre que ce dernier lui fait de l'aider à devenir un grand artiste. La joie d'Auguste est double : il reste près de son poêle bien-aimé et il peut suivre sa vocation.
    Pour faire comprendre ces sentiments, il faudra préalablement insister sur deux faits initiaux :

    1. l'affection des enfants pour le poêle, expliquée par quelques détails sur leur vie familiale
    2. l'envie qu'avait Auguste de marcher sur les traces de l'artiste qui avait orné le poêle.

    Dès le début, nous élaguerons les développements superflus et les termes difficiles ou héraldiques.

    Ayant déterminé le début et la fin de l'histoire, il s'agit de les joindre par une certaine quantité d'incidents :

    • la catastrophe de la vente du poêle
    • le voyage d'Auguste dont nous ne retiendrons que les épisodes les plus typiques : les débuts, le séjour dans le train de marchandises, les cahotements lorsque les hommes portent le poêle, l'effroi quand le roi ouvre la porte.

    L'intermède de la nuit passée dans le magasin de bric-à-brac peut prêter à confusion : on le supprimera.
    La digression au sujet du prix du poêle est de peu d'intérêt, c'est une histoire dans l'histoire : on l'omettra.

    Il restera :
    a) courte exposition de la place du poêle dans les affections de la famille et ambition d'Auguste
    b) catastrophe de la vente et décision d'Auguste
    c) impressions dans le train et sur les épaules des porteurs
    d) frayeur dans le palais du roi
    e) découverte d'Auguste par le roi et dénouement heureux

    En procédant ainsi, on ramène le récit à des proportions raisonnables, faciles à reproduire oralement. De plus, ce procédé laisse subsister des omissions suggestives qui augmenteront plus tard la jouissance du lecteur.

    Réarrangement. Le Roi de la Rivière d'Or.

    Ce conte est plus difficile à adapter : il est beaucoup plus long et le style en est élevé, très descriptif et allégorique.
    Pour le simplifier, nous devrons choisir les événements essentiels parmi ceux qui préparent le dénouement, et les présenter clairement et brièvement pour que les enfants les comprennent tout en n'étant pas lassés.
    L'histoire comprend 8 000 mots dont les premiers 3 000 servent à dépeindre la vallée du Trésor, les habitudes cruelles de ses possesseurs, Hans et Schwartz, et amènent l'incident final qui amène à leur bannissement.
    Les 2 000 mots suivants concernent l'apparition d'Éole et l'accueil que lui font les trois frères.
    Enfin, viennent 3 000 mots qui racontent l'histoire des trois frères après le décret d'Éole : la révélation faite à Gluck par le roi de la Rivière d'Or, les échecs et le châtiment de ses frères aînés, l'essai de Gluck, sa réussite obtenue grâce à son sacrifice.

    Il est aisé de voir que la partie dramatique de l'histoire, c'est la triple tentative pour obtenir le trésor. Mais cette tentative n'aurait aucun sens sans l'apparition du Roi de la Rivière d'Or, incident sans doute très apprécié des enfants.
    Nous aurons donc besoin des faits principaux narrés par les 3 000 premiers mots. L'épisode d'Éole sera supprimé pour abréger et pour éviter d'introduire une confusion entre les deux apparitions surnaturelles.

    Notre récit abordera :
    a) l'exposé sommaire des caractères de la Vallée des Trésors et de ses possesseurs
    b) les causes de sa transformation
    c) l'intervention du Roi de la Rivière d'Or
    d) le succès de Gluck, le héros, qui fait triompher l'idée fondamentale : la supériorité de la charité sur l'égoïsme.

    Les descriptions seront réduites au minimum et le langage deviendra plus simple et plus concret.

    Suit alors l'adaptation conçue pour être racontée aux enfants : Roi de la Rivière d'Or.
    Puis Miss Sara Cone Bryant explique, et cela ne peut que ravir les adeptes de la méthode des petits pas, que l'original restera réservé pour la lecture personnelle (une deuxième couche, en quelque sorte).

    Règles générales pour raccourcir une histoire trop longue.

    Premier pas : analyser soigneusement la version originale de
    l'histoire choisie
    - les événements qui forment la chaîne
    - les descriptions pures

    Deuxième pas : après réduction du récit à ses éléments constitutifs
    - examen des pas à faire vers le dénouement pour y arriver en sûreté
    - réduction à une seule enjambée de toutes les successions de deux ou trois pas qui peuvent être contractées
    - réduction une seule phrase de toute explication préliminaire trop longue
    - suppression des digressions

    Troisième pas : Quand plusieurs fils conducteurs s'embrouillent
    - chercher le principal et le suivre sans s'inquiéter des autres

    Quatrième pas : on peut aussi diminuer le nombre de personnages
    - envisager l'action du point de vue du héros principal.

    Lorsque le travail d'analyse est terminé, on s'attache à rendre le tout dans un langage très simple, quoique imagé, se rapprochant de l'original, mais élaguant les termes obscurs ou techniques et simplifiant les images.

    Exemple d'amplification : Le fil rouge du courage.

    La transformation est également nécessaire lorsqu'il s'agit d'amplifier un récit trop court, une anecdote ou une fable trop sèchement indiquée (voir Ésope et La Fontaine).

    Suivent alors deux exemples d'amplification, le premier, un exemple d'héroïsme, raconté sous sa forme « militaire » courte et concise puis adapté sous forme de conte après analyse pour :

    provoquer la surprise et l'admiration produites par la fin de l'histoire car :

    Quand il s'agit d'un récit oral, nous ne devons jamais oublier que c'est la dernière proposition qui doit renfermer l'idée principale.

    Ici, suit l'adaptation  sous forme d'un conte : Fil rouge de l'héroïsme
    Ensuite, c'est un conte adapté d'un court poème (introuvable) d'Olivier Kerford  : La Fée et la Marmotte.

    Résumé.

    Principes généraux d'adaptation :

    L'étude préliminaire aboutira toujours à l'analyse de l'histoire.

    Le but sera de :
    - raccourcir une trop longue narration
    - amplifier un récit trop court

    Dans le premier cas :

    - éliminer les faits secondaires
    -
     supprimer les personnages inutiles, les descriptions, les incidents accessoires

    Dans le deuxième cas :

    - inventer des détails intéressants

    Dans les deux cas :

    Conserver :
    a)
     une suite logique des événements
    b) un but unique
    c) un style simple
    d) un dénouement bien préparé

    Dans la même série :

    ♥ Racontamus, écoutatis, comprenunt :

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