Comme il y a quelques erreurs, je lui demande de la relire à voix haute et d'en profiter pour rendre la scène un peu plus vivante. Elle s'exécute volontiers et là... ô surprise... voilà qu'elle me fait voir l'Agneau sous un jour complètement nouveau !
Pour mieux comprendre sans le son, imaginez-vous dans la cour de récréation.
Vous voyez Agna qui, pas très loin de Loupa, semble lui envoyer des petites remarques assassines... Vous convoquez Agna et vous lui signalez que vous avez remarqué son manège. Et là, voilà Agna qui prend son petit ton revendicatif et vous explique, en d'autres termes plus actuels bien sûr :
« Sire, ..., que Votre Majesté
Ne se mette pas en colère ;
Mais plutôt qu’elle considère
Que je me vas désaltérant
Dans le courant,
Plus de vingt pas au-dessous d’Elle ;
Et que par conséquent, en aucune façon,
Je ne puis troubler sa boisson. »
Là, bien sûr, vous insistez : « Enfin, Agna, ne me prends pas pour une bille. J'ai bien vu que tu asticotais Loupa... D'ailleurs, ça fait plusieurs jours que j'ai remarqué ton petit manège. »
Et la jeune Agna, avec son plus bel air de pimbêche, de rétorquer (penser à traduire en français courant d'aujourd'hui) :
– Si ce n’est toi, c’est donc ton frère.
– Je n’en ai point. »
Tant et si bien qu'à la fin, j'en étais presque contente que le Loup le mange, ce p'tit imbécile prétentieux !
Conclusion : Si je continue à penser que la complexité neurologique des jeunes êtres humains n'a pas pu évoluer en si peu de temps, je reconnais que leur raisonnement a été profondément modifié par l'éducation aux Droits de l'Enfant, appliquée à des petits occidentaux déjà protégés depuis plus de cent ans du manque d'eau, de soins, de nourriture et d'éducation par un réseau dense de lois et de décrets. Cette modification s'est accentuée, depuis le moment où on leur a donné l'habitude d'argumenter de négocier (ou même d'ergoter sans fin) pour obtenir ce qu'ils veulent quand ils veulent.