• En recul de 30 % !

    Je suis dépitée, ravagée, désespérée... Tels les écoliers français qui ont été testés par PIRLS, je suis en baisse de 30 %...
    Enfin, pas moi, mais les manuels scolaires que j'ai écrits... Mais c'est pareil. Surtout que, contrairement à l'année antérieure, je pouvais désormais compter sur les droits d'auteur supplémentaires que me procurerait Pour une Maternelle du XXIe Siècle.
    Celui-là, si j'ai bien compté, il s'en est vendu 245... en deux ans... la honte... la loose totale ! L'électricienne du cœur en vend des milliers en trois mois pendant que mes copines[1] et moi, nous n'arrivons péniblement qu'à un petit quart de mille en deux ans !

    Pour les autres, et tout particulièrement mes chouchous, Écrire et Lire au CP et Se Repérer, Compter, Calculer en GS, je n'ai pas encore reçu le décompte. Mais je crains le pire...

    Ce n'est pas tant pour l'argent que je ne toucherai pas que cela me tracasse à ce point. J'ai reçu tout de même juste assez pour contribuer à aider une famille pendant tout l'hiver. J'aurais bien sûr aimé pouvoir faire plus mais tant pis, c'est déjà ça.

    Ce n'est pas non plus d'avoir bûché, de m'être décarcassée pour aller au plus pratique, au plus efficace, d'avoir donné du temps, de la sueur et même des larmes pour défendre mon point de vue et tenter de rendre accessible un savoir, une expertise, des connaissances, appelez ça comme vous voulez...

    Non, ce qui m'attriste le plus dans l'histoire, c'est de voir que ces dix années d'efforts n'ont servi à rien... ou si peu... et que nos petits CP, nos jeunes CE1, sans parler des CE2 et des CM vivent toujours les mêmes expériences... Tout comme leurs petits frères et sœurs de maternelle, d'ailleurs.

    Ce qui me peine, c'est qu'il existe toujours des petits enfants qui, dès l'âge de deux ou trois ans, sont priés de reconnaître les lettres de l'alphabet, dont ils ne découvriront l'usage magique que trois ou quatre ans plus tard, s'ils l'apprennent jamais...
    C'est qu'ils aient toujours des professeurs qui ont besoin d'un « outil » particulier, d'un créneau inscrit à leur emploi du temps et d'une grille d'objectifs à atteindre quasiment tel jour à telle heure, pour leur faire « pratiquer la narration et la compréhension ».

    Ce qui me couvre de honte, c'est qu'il existe toujours des classes de GS où l'on exerce séparément les compétences phonologiques, la reconnaissance des lettres en majuscules, leur écriture, toujours en majuscules, et la compréhension orale et écrite, sans jamais proposer aux enfants de les associer entre elles ni leur faire découvrir l'extraordinaire conquête que cette mise en synergie offre sur un plateau...  

    Ce qui me fait bondir, c'est qu'il y ait encore une majorité de classes de CP où l'on continue, avec le succès que l'on sait, à psalmodier des syllabes une à deux fois par semaine et à écouter lire les adultes le reste du temps... C'est aussi que, dans les autres classes de CP, ce soit la psalmodie de syllabes qui tienne le haut de l'affiche et que les enfants n'aient accès à la lecture compréhensive qu'en récompense, après, s'il reste du temps...

    Ce qui me fait hurler de rage, c'est que, dans certains CE1, on puisse encore trouver jusqu'à un quart ou un tiers de non-lecteurs à la rentrée des classes. Que dans d'autres, un petit garçon mignon m'apprenne qu'« on ne lit pas d'histoires parce que c'est pour les CP » et que le travail de lecture se résume à la lecture, hebdomadaire, d'un « tableau de son » sans aucun intérêt narratif.
    Que dans ceux où on lit, on en soit encore et toujours à quatre ou cinq petits albums par an, parce qu'on est plus préoccupé à « faire trouver une thématique » aux enfants qu'à leur assurer un accès à la lecture rapide et immédiatement compréhensive.

    Et enfin, ce qui me désespère, c'est qu'après ces cinq à six années de gâchis, on n'ait toujours pas redressé la barre, que des élèves de huit à neuf ans (CE2) « étudient » en classe Roule Galette ou Le loup qui voulait changer de couleur, comme leurs petits frères et sœurs de maternelle, sans doute parce que, parmi eux, il y a de si faibles lecteurs que l'enseignant ne peut pas prétendre à plus.
    Ce qui m'horripile c'est que les remèdes proposés pour « guérir » les élèves des troubles que les méthodes préconisées ont causés sont toujours les mêmes, que de « fluence » en « enseignement de la compréhension », mes collègues continuent à atomiser les compétences de leurs élèves, persuadés qu'ils sont par leur hiérarchie, leurs formateurs et leurs maîtres es-pédagogie-de-la-lecture; qu'il n'est pas possible de procéder autrement.

    Ce n'est pourtant pas faute d'avoir essayé d'agir sur les forums, les réseaux sociaux, ce blog, quelques journaux, mais non, rien, aucune ouverture.
    J'ai sans doute souvent joué le mauvais cheval, j'ai très certainement été trop cassante avec certains, je n'ai sûrement pas été assez prête à courber la tête quand on me le demandait. Cela m'a valu encore récemment des exclusions, des portes fermées. Cela me vaut surtout cette invisibilité, ce peu d'audience, cette absence de retours...

    C'est tellement rageant d'avoir la certitude de détenir non pas la panacée, mais tout de même des solutions pratiques et fiables et de ne pas parvenir à les diffuser, même quand on les donne[2]...

    Si le cœur vous en dit :

    Pour vos cadeaux de Noël, n'oubliez pas :

    Y aura-t-il de la pédagogie pour Noël ?

    CP : Mon enfant ne déchiffre pas

    Notes :

    [1] Françoise Svel, la correctrice, et Sophie Borgnet, l’illustratrice.

    [2] Je propose toujours un outil « révolutionnaire » en lecture pour la classe de CE1, ou même CE2. Je l’offre à qui le veut et je suis prête à dialoguer avec un éditeur sérieux, capable de lui donner une audience normale, pour une éventuelle édition papier.


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  • IV. 2. B. Mise en route - De la MS au CE1 (1)

    2. Mise en route

    B) De la MS au CE1  

    • Organisation de l’espace

    Cette classe recevant à la fois des enfants très jeunes dont l’essentiel des apprentissages se fait par le jeu et d’autres, plus mûrs et déjà engagés dans un processus d’accumulation structurée des connaissances, une organisation en espaces dédiés sera la clé du calme indispensable aux découvertes et entraînements des uns sans empêcher toutefois les autres de satisfaire leur besoin de mouvement, d’expression et de jeu.

    Le coin de regroupement constitue le pôle central de la classe, près d’un tableau d’affichage à hauteur d’enfant. Le tout est complété par une bibliothèque équipée de rayonnages, de bacs, de fauteuils et d’une table de lecture.

    Une ou deux tables ovales à six places sont installées près des étagères à matériel destiné à l’exercice de l’expérimentation et de la créativité plastique[1]. Une piste graphique pouvant servir de grand chevalet de peinture occupe 3 à 4 mètres de longueur de mur, sur une hauteur d’un mètre environ.

    D’autres tables, individuelles ou collectives, sont placées près des placards ou sous des étagères contenant le matériel de jeux sensoriels. Ces tables pourront avoir un double usage et être dévolues par moments aux Travaux Écrits des élèves de GS ; elles doivent donc pouvoir se placer face au tableau d’écriture.

    Pour les élèves de CP et CE1, un coin d’écriture-lecture a déjà été aménagé. Les élèves assis à leur table feront face à un grand tableau destiné aussi bien à l’affichage qu’à l’écriture à la main. Ce coin peut être placé près du tableau de regroupement qui aura alors double usage.

    Enfin, un espace au sol dégagé est prévu pour que les plus jeunes enfants puissent y disposer du matériel de grande taille ; le maître l’a placé loin du coin travail des élèves d’Élémentaire de manière à ce que leurs apprentissages ne soit pas perturbé par l’agitation qui peut y régner. Ce coin est réservé aux jeux d’imitation et de construction[2], le matériel y est exposé dans des étagères à claire voie afin que les élèves puissent choisir ensemble celui qu’ils sélectionneront chaque jour et aménager l’espace de jeu à leur convenance ; il peut se trouver dans une salle attenante si l’école en possède une et que la classe est dotée d’une ATSEM à plein temps.

    Pour l’organisation et l’utilisation de ces différents espaces (jeux d’imitation, activités motrices fines, jeux sensoriels et mathématiques), on se reportera aux chapitres II.2.A et II.2.B ou à l’ouvrage Pour une maternelle du XXIe siècle[3].

    • Emploi du temps

    Après la répartition horaire des parties collectives de l’école[4] lors du conseil des maîtres, l’enseignant établit un emploi du temps journalier simple[5], alternant les périodes d’activités selon un rythme immuable.

    La cohésion du groupe étant son premier objectif, c’est par des moments collectifs qu’il choisit de débuter chaque demi-journée. Seule la fin de matinée se clôturera par un moment de jeu-travail individuel, pendant lequel cependant, le maître sera disponible pour tous.

    Il tient compte de la fatigabilité des enfants et prévoit pour chacun des moments de la journée une durée et des objectifs compatibles avec les rythmes circadiens de ses futurs élèves. Ainsi, les activités d’écriture, de lecture et de mathématiques, dans ce qu’elles ont de plus exigeant intellectuellement sont placées en cours de matinée alors que leur partie ludique et créative ou répétitive est intégrée aux activités de l’après-midi. Il choisit de ne jamais excéder 20 à 30 minutes consécutives sur la même activité.

    Ses élèves de Moyenne Section ayant encore besoin d’exercer leurs capacités de manière globale afin de ne pas freiner leur développement en étoile alors que ceux des autres niveaux ont avant tout besoin de structuration, il a prévu que les activités planifiées des plus grands se déroulent en parallèle de celles de temps libre en autonomie des plus petits.

    Néanmoins il fait en sorte que les élèves d’Élémentaire et à plus forte raison de Grande Section aient à plusieurs reprises dans la journée l’occasion de s’extraire du groupe pour mener un projet personnel ponctuel[6]. Cependant il place ces plages horaires de manière à ce qu’elles puissent se réduire progressivement en cours d’année jusqu’à céder leur place à des moments collectifs plus structurés selon des projets communs de moins en moins ponctuels.

    • Progression

    Si les plus jeunes de la classe en sont encore aux progressions individuelles en étoile[7] qu’on ne peut pas mettre en cases, le maître souhaite que les plus âgés, qui ont désormais suffisamment aménagé leur personnalité, trouvent dans leur classe les moyens et l’envie d’organiser leurs apprentissages pour les rendre plus efficaces.

    De manière à ce que les enfants de Grande Section comme de Cours Préparatoire découvrent ce monde des apprentissages structurés, il a prévu une progression linéaire, étalée sur deux années scolaires, afin que le passage se fasse en douceur, sans à-coups brutaux déstabilisants pour l’enfant. La progression de Cours Élémentaire 1re année prend naturellement la suite de celle-ci[8].

    Il a donc préparé sa première progression d’étape. Elle représente environ le premier cinquième du programme d’acquisitions[9] qu’il souhaite faire partager à ses élèves de chacun des trois niveaux dans tous les domaines d’enseignement au cours de l’année scolaire. Il la suivra jusqu’à la première période de vacances scolaires, en s’adaptant toutefois au rythme de ses élèves, l’accélérant ou la ralentissant au besoin s’il en découvre la nécessité. 

    Pour tous les moments communs aux quatre sections, il n’a établi qu’une progression, se réservant la charge d’en demander plus aux plus capables et aux plus âgés et un peu moins, mais plus concentré, aux plus démunis qui seront sans doute souvent aussi les plus jeunes.

    Pour se simplifier la vie et pouvoir consacrer son temps à suivre réellement ses élèves, il a choisi de s’entourer d’outils et de méthodes simples plutôt que de passer énormément de temps à préparer sa classe et à créer ses outils. Il a ainsi adopté des méthodes d’écriture-lecture et de mathématiques proposant une progression journalière pour chacun des trois niveaux[10]. Pour l’ensemble des autres matières, son critère de sélection principal a été le bon sens et la connaissance des capacités attentionnelles, inductives et déductives de l’enfant de cinq à huit ans ainsi que son goût du jeu, de la récompense immédiate par la réussite rapide et l’atteinte d’objectifs simples et progressifs.

    Les élèves de Moyenne Section qui le souhaiteront pourront, toujours en auditeurs libres, suivre tout ou partie des séances collectives de français ou de mathématiques. Le maître sait que ceux-ci se sentiront valorisés de jouer avec les grands mais il a bien conscience qu’à part exception, ils resteront au stade du jeu, se préparant à comprendre certaines notions mais restant incapables de suivre la progression. Son but n’est pas de les pousser à grandir de façon désordonnée en privilégiant l’acquisition de l’écrit au détriment des apprentissages moteurs et sensoriels mais de permettre aux plus grands de profiter des derniers apprentissages moteurs et sensoriels pour jeter les premiers jalons de l’apprentissage de l’écrit.

    • Rôle de l’ATSEM

    Dans ce type de classe, l’ATSEM est énormément sollicitée. Sa présence toute la journée est pour ainsi dire indispensable ; le maître n’hésitera pas à le répéter à la Mairie ou au SIVOS chargés de son recrutement et de sa rémunération.

    Après consultation du conseil des maîtres et de la charte des ATSEM décidée par la commune de rattachement[11]  de l’école, le maître dialogue avec la personne qui travaillera sous sa responsabilité. Il la met au courant des habitudes d’autonomie qu’il compte mettre en place. Il lui lit et commente l’emploi du temps et lui explique clairement ce qu’il attend d’elle à chaque moment :

    - aide matérielle aux élèves de manière à ce qu’ils apprennent progressivement à se passer de l’adulte et apprentissage des gestes d'hygiène et de vie pratique[12] 

    - aide à l’encadrement du groupe lors des moments collectifs et apprentissage des gestes techniques[13] 

    - encadrement d’un demi-groupe (MS/GS ou CP/CE1) lorsque le groupe-classe est scindé en deux selon un cahier des charges établi à l’avance

    - préparation des matériaux à utiliser pour les ateliers d’expression plastique et des documents ou objets utiles à l’affichage ou à l’exposition au coin de regroupement[14], photocopie d’exercices écrits à destination des plus grands

    - installation du matériel de jeux sensoriels et d’imitation accessible aux enfants

    - rangement et nettoyage de tout ce qui a été manipulé, utilisé lors de la journée de classe 

    - classement des travaux d’élèves ; reliure ou collage dans un cahier communiqué aux familles

    Annexes :

    Télécharger « EDT - MSGSCPCE1.pdf »

    Télécharger « Plan F - MSGSCPCE1 ou Classe maternelle + CP + CE (+ CM).pdf »

    Télécharger « Programme d'acquistions GS.pdf »

    Télécharger « Programme d'acquisition CP.pdf »

    Télécharger « Programme d'acquisition CE1.pdf »

    Télécharger « Matériel individuel GSCP.pdf »

    Télécharger « Matériel individuel CE1.pdf »

    Dans la même série :

    Tous les chapitres déjà mis en ligne sont répertoriés dans la Table des matières   évolutive que vous trouverez dans la partie Sommaires.

    Pour la partie présente :

     I. Idées reçues  ; IV.1. Quatre niveaux dans la même classe ; IV. 2. B. Mise en route - De la MS au CE1 (1) ; IV. 2. B. Mise en route - De la MS au CE1 (2) ; IV. 2. B. Mise en route - De la MS au CE1 (3)

    Notes :

    [1] Dites aussi « Arts plastiques » ou encore « Productions plastiques et visuelles ».

    [2] Voir liste dans les chapitres consacrés aux classes accueillant des élèves de maternelle. Penser à un jeu de « marchande » qui permettra, dès les premiers jours de classe, d’entraîner les élèves d’élémentaire (et de GS) au comptage et au calcul.

    [3] Me contacter pour un envoi sans frais de port.

    [4] Salles de motricité, de propreté, bibliothèque, cuisine, salle informatique, cour, jardin…

    [5] Voir suggestion d’emploi du temps en Annexe II.

    [6] Jeu d’imitation ou de construction, jeu sensoriel ou mathématique, dessin libre, modelage, découpage/collage, etc.

    [7] L’image de la boule de neige peut aussi être utilisée pour expliquer comment se constitue naturellement, sans ordre préétabli, l’agrégat de savoirs, d’habiletés et de capacités d’un enfant de moins de cinq à six ans. 

    [8]  S’il a la douloureuse surprise d’écoper d’une classe dans laquelle les élèves de CE1 n’ont pas eu l’occasion d’atteindre un niveau suffisant dans les apprentissages fondamentaux savants (écriture, lecture, calcul), il a tout intérêt de tout chambouler provisoirement, de manière à traiter en priorité l’apprentissage de l’écriture-lecture de ces enfants-là, auxquels bien entendu, il ajoutera, sur un rythme moins soutenu, ceux de CP, de manière à ne pas reproduire ce schéma mortifère les années suivantes.

    [9] Voir Annexe IV.

    [10] Je conseille les méthodes, fichiers et manuels suivants ;

    - GS, Planète des Alphas + De l’écoute des sons à la lecture (T. Venot, Grip éditions) et Se repérer, compter, calculer en GS (C. Huby, S. Wiktor, Grip éditions)

    – CP, Écrire et Lire au CP (C. Huby, X. Laroche, Grip éditions) et Compter, calculer au CP (P. Dupré, S. Borgnet, Grip éditions) ; Mes cahiers d'écriture, CP, Apprentissage : les minuscules (Laurence Pierson, MDI)

    – CE1, Lecture et expression au CE, Étude de la langue CE1 (C. Huby, me contacter) et fichier Mathématiques CE1.  

    Tous niveaux : Questionner le monde, Cycle 2 (C. Huby, S. Borgnet - en cours de rédaction)

    [11]  La réclamer si elle n’existe pas. Souvent, dans les petites communes, on suggère de fonctionner « au feeling ». C’est parfait tant que tout se passe bien mais peut poser de très graves problèmes si l’ambiance se dégrade.

    [12] Se déshabiller, suspendre des vêtements, s'habiller, se boutonner, remonter une fermeture à glissière, nouer une écharpe, des lacets, attacher une boucle de ceinture ou de sandale, etc. 

    [13] Distribuer et ranger le matériel, trier les déchets, balayer, laver des pinceaux et une éponge, essuyer une table, remplir un pot de colle ou de peinture, …

    [14] Découpage, mise en page, plastification, réalisation de panneaux destinés à l’affichage…

    Et pour vos cadeaux de Noël :

    N'oubliez pas :

    Y aura-t-il de la pédagogie pour Noël ?

    CP : Mon enfant ne déchiffre pas


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  •     

    ABCD de l'égalité
    Merci à Sophie Borgnet pour son illustration.

    Ce matin, sur France Inter, M. Blanquer, Ministre de l'Éducation Nationale, a répondu à des questions insistantes sur une éventuelle remise en place de l'opération ABCD de l'égalité filles-garçons., conçue puis abandonnée par les services de l'ancien ministère.

    Cela me donne l'occasion de proposer à nouveau à mes aimables lecteurs (nom commun, neutre, pluriel), le chapitre consacré à l'égalité en général, extrait de mon bouquin sur la maternelle.

    À la fin, vous trouverez un petit additif, extrait d'un autre chapitre, concernant les jouets à l'école maternelle parce que, finalement, le chapitre V est consacré à l'égalité et à la mixité dans un sens plus large que celles liées au hasard chromosomique...

    Première partie

    V. Égalité

    L’école est mixte. - Les avantages de l’éducation en commun de tous. - Pourquoi   faut-il réaffirmer la nécessité de la culture commune ? - Le principe de défiance tue l’estime de soi de l’enfant. -    « L’enfant est une personne » ne signifie pas que c’est un adulte. - L’égalité sociale : un principe absolu pour les écoles.

    L’école maternelle est mixte depuis toujours, mixité des sexes mais également mixité sociale.  Ce qui a permis de dire avec raison que l’école était un creuset égalisateur. Pauvres comme riches, filles comme garçons, étrangers comme autochtones, petits, faibles et mal-aimés comme grands, forts et adulés y recevaient, tous ensemble, la même éducation.  Plus encore qu’un creuset magique, dont les effets seraient apparus par enchantement, c’était un tremplin savamment équilibré. Son rôle fondamental était d’ouvrir à une culture commune, grâce à l’éducation, mère de l’instruction.

    Malheureusement, après de nombreuses années de cette potion dans laquelle  il aurait suffi de plonger nos élèves pour les rendre égaux devant l’école, force est de constater que le grand melting pot égalisateur ne joue plus vraiment son rôle. Quand Louis-Thaddée ou Marie-Sixtine quittent l’école maternelle en pleine possession de leurs moyens physiques, psychologiques et intellectuels, il n’en est pas forcément de même pour leurs petits camarades aux prénoms moins bien estampillés Réussite Scolaire Obligatoire. Et il est des handicaps[1] bien trop difficiles à compenser au milieu de trente enfants valides, surtout par un simple professeur des écoles dont la formation généraliste n’a comporté aucun volet médical. Et cela, même si on lui a adjoint un AVS[2] dévoué mais bien démuni !

    Pourtant on a raboté discrètement les pieds du tremplin pour le rendre plus facile d’accès. On a subrepticement détendu la toile pour qu’elle rende difficiles les bonds trop impressionnants. On a interverti les priorités éducatives, inventé des critères d’évaluation censés s’adapter à d’improbables nouveaux publics[3]. On a accusé de dopage intellectuel les enfants qui, malgré le changement, continuaient à avoir envie de réfléchir, de progresser, de diversifier leurs connaissances. On a donné à l’école de nouveaux rôles et de nouvelles missions pour essayer de réparer les torts qu’on lui avait faits.

    Et maintenant, où en sommes-nous ? Quelle égalité peut-il y avoir, à l’orée de l’école élémentaire quand, dans certaines classes, on ne parvient pas à cet équilibre entre droits et devoirs, garant de la liberté de tous ?

    Ici, depuis la Toute Petite Section, on propose des albums adaptés où la langue utilisée imite maladroitement le charabia que nos tout-petits emploient par défaut[4]. On se cache derrière cette ignorance commune à tous les petits pour leur refuser le temps et l’occasion d’accéder au vrai langage des livres, avec ses phrases riches, ses passés simples, son vocabulaire choisi. On prive d’un véritable accès à la langue française les enfants dont la vie hors la salle de classe se déroule dans une autre langue. Plus loin, le terme banlieue retrouve son sens étymologique. Parce que l’école est située au bas des tours et des barres d’une cité, on élabore un projet pédagogique qui ne sort pas de l’image qu’on se fait du Jeune ayant grandi hors les murs de la citadelle.

    Comment croire encore à ce creuset égalisateur quand l’égalité des sexes disparaît du quotidien et qu’une maîtresse écrit en bleu ciel les prénoms des garçons et en rose ceux des filles ? Qu’aux uns, elle offre en récompense des images de super-héros pendant que les autres reçoivent des princesses pailletées ? Quand l’égalité des enfants au sein d’une même classe est abandonnée, qu’on les trie selon un niveau scolaire supposé[5] et qu’on leur distribue des brevets et des classements dans tous les domaines y compris celui de la pâte à modeler…  

    ABCD de l'égalité

    On peut bien ensuite, en élémentaire ou au collège, inventer des classes d’excellence, bilangues, européennes, CHAM ou sport-études et les installer dans ces zones défavorisées ! C’est méritoire mais illusoire d’essayer d’empêcher de partir, de faire revenir ou d’attirer tous ceux dont les parents espéraient que l’école apportât un petit peu plus à leurs enfants. Et on comprend qu’ils aient cherché autre chose que ce que leur progéniture connaissait déjà dans leurs quartiers  difficiles. On a beau jeu ensuite de déplorer leur perte. On peut aussi crier d’horreur en les voyant prêts à se laisser manipuler par des adultes sans scrupule, tout simplement parce que ceux-ci semblent leur offrir enfin un cadre sécurisant ou un avenir gratifiant. Comment reprocher à ces enfants perdus de se laisser séduire par des valeurs hélas bien éloignées de celles que nous avons refusé de partager avec eux ?

    L’École Maternelle, elle, n’a pas besoin de classes d’excellence pour donner envie d’y inscrire ses enfants : c’est pour cette raison que toutes ses classes devraient se réclamer de ce label! La culture commune, apportée par ses maîtres, doit être celle qu’ils donneraient à leurs propres enfants. Ses règles de vie doivent y être universelles et faire fi des distinctions de sexe, de race ou de religion. Sa mission principale étant l’éducation, il est facile d’introduire, sans embrigadement ni prêchi-prêcha, les valeurs d’égalité et de fraternité essentielles à la survie d’une démocratie. Et il ne devrait pas être besoin de grands projets fédérateurs pour apprendre aux élèves les règles de l’égalité entre êtres humains.

    Notre Petite École a la chance de recevoir les enfants à un âge où les préjugés n’existent pas encore. Même lorsque nous nous adressons aux plus âgés d’entre eux, il nous est simple de leur montrer par le jeu, l’échange et le partage que les différences quelles qu’elles soient ne changent rien, sans les heurter dans des certitudes déjà fermement établies. Ils se laissent encore convaincre assez facilement que tous leurs camarades peuvent jouer tous les rôles. Ils admettent volontiers que chacun apporte les mêmes éléments à la discussion et qu’il reçoit et donne comme eux-mêmes. Il suffit pour cela que ce petit monde redevienne celui des enfants et arrête de singer celui des adultes ou des adolescents.

    Afin d’atteindre aisément ce but, il est préférable que nous n’accueillions plus les parents comme s’ils étaient les personnages principaux de cette histoire. Même si nous continuons bien sûr à recevoir les familles de nos élèves avec courtoisie, à les informer avec précision et régularité et à les rassurer quand ils le demandent. Même si, malheureusement, nous devons parfois continuer à les signaler aux services compétents quand la situation l’exige.

    Pour accueillir les enfants dans l’égalité la plus parfaite, il est plus simple que leurs familles n’investissent pas nos classes. Cela évitera au moins que, devant leurs enfants, elles pensent avoir le droit de décider de tout et puissent contester nos décisions. Que peut faire un professeur des écoles seul face à une bande d’excités de quelque bord que ce soit ? Quel rôle peut-il jouer lorsque ce petit groupe prône des valeurs inconciliables avec celles qu’il doit transmettre à ses élèves ? Quel poids pourront avoir ses paroles si, pendant le temps de classe, des parents sont présents et le contredisent devant les enfants?

    L’École est une Institution dont les règles sont définies par la Loi, intangible sur l’ensemble du territoire. Elle ne peut donc subir aucun aménagement dû à son implantation. Pour que cela soit respecté, elle doit redevenir un lieu protégé des turbulences du monde et de l’influence des adultes.

    Les seuls habilités à y intervenir sont les professeurs des écoles et leur hiérarchie, les ATSEM sous la responsabilité des premiers, les médecins et infirmières scolaires ou de PMI[6] dans l’exercice de leurs fonctions. Les autres personnes doivent recevoir un agrément délivré après contrôle par un représentant de l’Éducation Nationale. Elles n’interviennent alors que ponctuellement, dans le cadre d’un projet agréé par l’IEN[7] et sous la responsabilité du professeur des écoles titulaire de la classe. Depuis Jules Ferry, les personnes autorisées sont enjointes d’agir de manière éthique et responsable. Cela devrait suffire pour garantir aux enfants l’accès à une égalité de traitement et d’éducation en tous points du territoire.

    L’École Maternelle n’est pas une école comme les autres. On n’y délivre pas de cours magistral, déguisé ou non. C’est par le jeu, l’action, les récits, les conversations à bâtons rompus dirigées par l’enseignant garant des propos qui s’y tiennent que l’enfant acquiert progressivement et sans normes évaluatives strictes les valeurs de la démocratie qui régissent notre société. Doivent être considérés comme choquants tous propos favorisant une discrimination qu’elle soit négative ou positive. Il est inqualifiable que des professeurs des écoles, fonctionnaires de l’État, considèrent que tel enfant, de par son sexe, sa couleur de peau, son origine sociale ou culturelle, sa religion, doive recevoir un traitement scolaire particulier, une éducation différente.  On ne peut émettre le doute, même avec les meilleures intentions du monde, que cette différence physique ou sociale implique quelque anomalie génétique, quelque tare le rendant incapable d’accéder à la culture commune.

    Il ne saurait être possible non plus qu’un professeur des écoles profitât de sa position de force pour s’immiscer dans la vie privée des familles et dénigrer auprès de ses élèves l’éducation qu’ils y reçoivent. S’il se doit de signaler aux services compétents tout acte de maltraitance, tout soupçon de carence éducative, il n’a en aucun cas à se préoccuper ni à juger de ce que mangent, écoutent, regardent, revêtent, fréquentent, vivent en dehors du temps scolaire les enfants qui lui sont confiés. Il a encore moins le droit de déstabiliser ces tout jeunes enfants par des propos ou des leçons sur des sujets qui ne sont pas de leur âge.

    « L’enfant est une personne », aurait dit une psychanalyste célèbre[8], s’élevant contre l’abandon, la maltraitance ou les carences éducatives dont étaient victimes certains tout-petits. Cela ne sous-entendait en aucun cas qu’il soit considéré comme un adulte. Le petit enfant a droit à notre sollicitude, notre protection et notre respect. Il a droit à un traitement particulier tel qu’en reçoivent tous les jeunes êtres vivants. Personne ne demande à un poulain de six mois de porter un cavalier, personne n’oblige un jeune pommier à donner des pommes. Personne ne devrait alors pouvoir proposer à un enfant de moins de sept ans de réfléchir sur la conduite à tenir face aux grands problèmes que se posent adolescents et adultes.

    La seule morale, la seule philosophie que nous devons dispenser à l’École Maternelle, c’est celle que l’activité, la vie quotidienne, les jeux, les moments de conversations imposeront. Les valeurs d’égalité, de fraternité et de partage naîtront d’elles-mêmes et prospéreront si nous les valorisons au quotidien. Nous n’aurons pour cela besoin ni de leçons interminables, ni de grands projets médiatiques, ni de cahiers d’évaluations, de réussites ou de progrès. Cet attirail-là, depuis trente ans que nous le voyons à l’œuvre, nous avons eu le temps d’en constater la portée plus que limitée. Il suffit pour cela de nous promener dans nos cours d’écoles élémentaires et de collèges.

    Pourquoi solliciter un enfant sur la différence tant qu’il n’en voit aucune ? Pourquoi le laisser se justifier et se construire un système de défense lorsqu’il traduit cette découverte de la différence par une conduite répréhensible ? Pourquoi l’empêcher de pratiquer telle activité parce qu’elle est habituellement appréciée par les enfants de l’autre sexe ? Et pourquoi la lui imposer, même si elle n’est pas indispensable à son développement, au prétexte qu’il doit absolument s’y adonner pour prouver qu’il ne méprise ni ne craint ses congénères ? 

    Vivons avec tous nos élèves en rejetant loin de nous les tabous éducatifs, les lieux communs venus d’un autre âge de même que les clichés issus des dernières rumeurs qui circulent. Offrons-leur une multitude de jeux, de jouets, d’activités, de récits, de contes, de chants et de comptines afin que tous y trouvent leur compte et construisent ensemble cette culture commune qui les préservera de l’ostracisme. N’associons à leurs prénoms, à leur sexe, à leurs origines, au niveau social de leurs famille aucune prédiction de réussite ou d’échec scolaire.

    Rejetons même toute idée de les évaluer avant de leur avoir apporté le meilleur, comme nous le donnerions à nos propres enfants. Travaillons sans relâche aussi longtemps que nécessaire pour que les vingt-quatre heures[9] par semaine passées en notre compagnie prennent à leurs yeux toute l’importance souhaitée. Faisons en sorte que l’éducation que nous leur apportons, la richesse de ses contenus, l’ouverture culturelle de ses références garantissent que leur vie sociale future puisse se bâtir librement, loin des clichés que l’air du temps leur proposera alors. 

    Notes :

    [1] Voir la loi Montchamp dont les effets pervers commencent à être dénoncés, y compris par les familles d’enfants handicapés et le personnel médical : http://www.cdafal77.fr/montchamp.html

    [2] Assistant de Vie Scolaire, recruté sans formation pour cinq ans maximum et à qui l’on n’offre au mieux qu’une très courte formation interne.

    [3] Bien malin celui qui démontrera la nouveauté de ces publics alors que cette école a dès le départ été prévue pour les plus démunis des enfants qu’elle a toujours reçus sans distinction d’origine, de langue et de culture ! Pour s’en convaincre, lire La Maternelle,  roman écrit par L. Frapié en 1904, effet garanti ! 

    [4] Voir Les Oralbums, de Philippe Boisseau.

    [5] Et bien souvent conditionné par la couleur de leur peau ou la consonance de leur prénom…

    [6] Protection Maternelle et Infantile.

    [7] Inspecteur de l’Éducation Nationale

    [8] Françoise DOLTO, 1908 - 1988.

    [9] Vingt-sept heures seraient les bienvenues et nous permettraient une vision moins bornée de nos capacités d’action.

    Deuxième partie

    Les jouets, les jeux, le matériel et la manière de s’en servir.
    Les méthodes et leur matériel sophistiqué.
      

    Pour faire sortir les enfants de l’agitation désordonnée et faire naître la discipline, les jouets, les jeux, le matériel sont nécessairement simples. Leur utilisation doit couler de source sans que nous ayons besoin de fournir de longues explications et une attention constante pendant leur utilisation. Nous ne voulons d’aucune progression complexe qui bride la créativité et l’esprit d’entreprise de nos jeunes élèves.

           Jouets

    Quelques coins bien aménagés, où un groupe de quatre enfants peut aisément s’installer pour des jeux d’imitation, font plus pour intégrer tous nos élèves que tout projet citoyen ambitieux aux multiples ateliers imposés.

    Ces coins ont parfois disparu des classes maternelles. Cela est bien dommage car ils étaient le lieu d’échanges spontanés de plus en plus riches et construits. On y trouvait souvent un appartement en miniature, à la taille des enfants, avec sa cuisine, sa chambre des poupées, sa coiffeuse, son atelier de bricolage. Les maîtresses y laissaient jouer filles comme garçons et faisaient ainsi plus pour promouvoir l’égalité des sexes que ne le feront jamais toutes les accumulations de paroles qui s’envolent. Et dans les modèles réduits de ville, ferme, école, hôpital, zoo, garage, cirque ou gare, personne ne se préoccupait de la couleur, de l’âge et du sexe des policiers, fermiers, soigneurs, conducteurs d’engins et apprentis-puériculteurs ou coiffeurs.

    Dans nos coins de jeu, la leçon de langage à l’efficacité éprouvée naît quotidiennement des dialogues entre enfants. L’enfant d’origine étrangère y progresse bien mieux que dans n’importe quel atelier de remédiation pour petits parleurs. C’est en en jouant qu’il y apprend comment se nomment les ustensiles de cuisine, les vêtements, les outils, les véhicules, les actions. D’autant que, n’étant pas bloqués par leur atelier dirigé, enseignant et ATSEM sont disponibles et peuvent venir de temps compléter ou rectifier les échanges enfantins. 

    Toute la classe s’y crée une première culture commune enrichie de ce que chacun y raconte librement. Ce faisant, tous découvrent des particularismes qui n’ont pas forcément cours dans leurs foyers. Plus besoin de leçons ni de longs débats  sur l’égalité des sexes, la théorie du genre, l’ouverture aux autres cultures ! C’est en vivant ensemble et en se racontant que les enfants apprennent tout cela !

    Pablo change la couche du poupon et Djamila répare la voiture cassée. Kilian montre comment chez lui on se sert des baguettes pour manger et Ousmane raconte comment on s’assoit en tailleur autour du tapis où se trouvent les plats dans lesquels chacun se sert. Vicky explique sa caravane et raconte comment on peut se débrouiller pour que tout le monde y ait sa petite place.

    L’enseignant est là pour interdire les moqueries, expliquer les différences, s’intéresser à la culture de l’autre, gérer un mini-débat qui naît, spontanément cette fois, et y apporter l’ouverture que lui donnent son âge et sa culture. 

    Au Vivre Ensemble s’ajoute la motricité. Déplacer les meubles, balayer, plier, ranger dans les placards, empiler… changer les poupées, les allonger, les asseoir… installer la dînette, la laver, l’essuyer… faire rouler les voitures sur les routes et les trains sur les rails… visser et dévisser… autant de gestes qui exercent tout aussi bien la main que la série de fiches d’exercices progressifs de découpage selon un trait de plus en plus alambiqué !

           Jeux

    Ces exercices de motricité, et particulièrement de motricité fine, sont très vite renforcés par l’offre des jeux de construction. En plus de cent trente années d’école maternelle, se sont ajoutés aux bons vieux cubes de bois, que les barres de type Kapla ont remis à la mode dans leur simplicité et leur richesse d’utilisation, tous les jeux dont les éléments s’empilent, s’encastrent, s’agrippent, s’adaptent, s’aimantent, s’accrochent... Tous ne se valent pas et les élèves ont leurs préférés qui traversent les générations. Ce sont souvent les plus simples qui recueillent le plus de suffrages car ils permettent à l’imagination de se développer et autorisent toutes les créations.

    De même, après les bobines de bois creuses que nos arrière-grands-parents utilisaient comme jouets, on a vu naître toutes sortes de perles de tous les diamètres et de toutes les formes. Elles ont été complétées par des jeux d’enfilages, de tressages, de laçages et de piquages où l’enfant exerce en même temps que ses doigts sa capacité à distinguer et marier les couleurs, à reconnaître formes et grandeurs, à concevoir des algorithmes et à les reproduire. 

    Enfin, les encastrements, les mosaïques, les puzzles, les dominos et les lotos complètent par une volonté d’entraînement à la lecture d’images l’éducation manuelle, psychomotrice et sensorielle. Ils visent à développer l’attention visuelle, le langage, la réflexion, la logique, la géométrie intuitive et parfois même le calcul. 

    La meilleure manière d’utiliser ces jeux est celle que les élèves trouvent eux-mêmes. C’est ainsi qu’ils constituent un tremplin pour eux. Le jeu est le travail de l’enfant, disait Pauline Kergomard[1]. Et c’est bien le jeu libre, sans contrainte ni évaluation qu’elle préconisait. De ce jeu qui fabrique tant les futurs ingénieurs que les futurs techniciens, les artisans et les créateurs, les poètes et les explorateurs, les entrepreneurs et les inventeurs.
    Car il ne s’agit en aucun cas d’apprendre à des ouvriers interchangeables à accomplir une tâche balisée, apprise et répétée pour obtenir un produit fini en tous points semblable à celui produit par chacun de ses camarades. Il n’est pas non plus question que ce jeu serve à valider des items et qu’il permette de mettre en cases l’Enfance et ses multiples facettes.

    Faisons confiance à l’enfant, tout en lui fournissant un cadre sécurisant et sécurisé, régi par des lois simples et immuables. Offrons-lui le matériau d’exploration que nous le laisserons utiliser à sa guise, à son rythme. Soyons en revanche présents pour solliciter et encourager l’enfant qui ne fait rien, détecter la bonne idée, l’avancée technique et la grande découverte. Soyons là, au milieu de tous, et favorisons les échanges d’aide et les dialogues. N’interdisons que ce qui risquerait de blesser, de nuire à quelqu’un ou de perdre et casser les objets.

    Nous voyons alors naître en plus d’une agilité manuelle qui s’affine, d’une fraternité qui s’affirme, d’une culture commune qui s’enrichit, de véritables dons chez tous nos élèves, dons qu’ils enrichissent et multiplient au contact des autres.

     Matières et matériaux 

    Ces dons, cette créativité, cette envie de progresser, de grandir, de se mesurer à la matière trouvent une nouvelle raison d’être dans toutes les activités de patouille  auxquelles nous tenons tout particulièrement.

    Dans les programmes de l’École Maternelle[2], dans la partie Percevoir, Sentir, Imaginer, Créer,  on nous détaille quelques actions simples, quelques matériaux et on nous encourage à aider nos élèves à découvrir et utiliser de nouvelles techniques, à concevoir seuls ou à plusieurs des projets et des réalisations. Tout ceci est vrai, nécessaire et suffisant, et nous n’enlevons ni n’ajoutons une ligne à ce descriptif. À condition que ces actions, ces matériaux, ces techniques, ces projets et leurs réalisations soient à la mesure de nos élèves et de leur expérience. Nous devons nous en tenir aux objectifs des programmes sans nous laisser influencer par les méthodes, les techniques et les créations dont sont capables adultes et adolescents même si ces dernières, présentées sur papier glacé dans les pages de catalogues dûment estampillés École Maternelle,  sont séduisantes visuellement.

    Avec leurs yeux, leurs mains, leurs oreilles, les tout-petits qui entrent à l’école voient sans regarder, attrapent sans toucher, entendent sans écouter. C’est justement pour cela que l’école a pour mission d’enrichir leur expérience sensorielle. Elle y réussit si elle s’appuie sur ce qu’ils savent faire. Elle doit donc prévoir donc des activités plastiques qui peu à peu les amènent à regarder, toucher et écouter.  Ce n’est que lorsqu’ils ont appris cela qu’ils sont aptes à apprécier ou créer pour exprimer leurs émotions.

    Qui pourrait croire qu’un tout-petit peut – par atavisme peut-être ? – découvrir du jour au lendemain l’univers de la création plastique et de ses outils alors que l’Homme a mis des millénaires à le créer ? Et quel intérêt aurait-on à faire d’eux de simples exécutants reproduisant un geste ou une technique qui leur sont imposés alors que, si nous sommes patients, nous aidons à s’épanouir des créateurs ambitieux à la recherche de leur perfection ?

    L’enfant de deux à trois ans qui arrive à l’école maternelle agit pour bouger. Sa main promène le crayon sur la feuille et ce n’est que petit à petit que la relation de cause à effet s’installe. Il se met alors à diriger son mouvement dans le but de produire un tracé qu’il a réellement programmé. De même il pétrit, étale, déchiquette, lisse, enduit, empoigne crayons, pinceaux, brosses, ciseaux par curiosité. Peu à peu naît le plaisir de la manipulation et du contact avec la matière.  Enfin grâce à l’exercice libre répété, il devient capable d’en maîtriser les possibilités puis d’en juger l’effet esthétique. Forts de cette certitude, mettons nos ambitions au placard et laissons-les patouiller, expérimenter, tester, tâtonner. Puisque notre but n’est pas d’en faire tout de suite des petites mains de la production d’objets décoratifs stéréotypés, prenons notre temps.

    Nos ateliers sont simples : dessin, découpage, collage, peinture, modelage. Nous choisissons un matériel et des matériaux basiques et peu coûteux car ils seront beaucoup gaspillés : papier, crayons de diamètre raisonnable, peinture, pinceaux peu fragiles, ciseaux, feuilles de magazines, colle vinylique, petits emballages, chutes de bois, boules d’argile, de pâte à modeler ou de pâte à sel.

    Aidés de l’ATSEM, nous passons de groupe en groupe, conseillons, assistons, installons les habitudes qui tiennent lieu de premiers apprentissages. Les gestes techniques que nous leur apprenons sont bien terre à terre : essuyer le pinceau sur le bord du pot, ramasser les chutes de papier par terre, tenir les ciseaux sans jamais les brandir ni les tester sur les cheveux ou les vêtements, ne rien mettre à la bouche,  ne mélanger les couleurs que dans le but précis de créer un effet... Dès le début, les enfants sont associés à l’installation et au rangement. Ils apprennent à jeter dans les poubelles en triant le papier et les emballages. Ils reforment des boules d’argile et les enferment dans des chiffons humides. Ils savent boucher hermétiquement les pots de peinture et de colle. Aidés et même assistés par l’ATSEM, ils lavent les pinceaux, passent l’éponge sur les tables et les chevalets de peinture. Ces bonnes habitudes prises dès l’entrée à l’école éduquent à l’autonomie et libèrent les esprits.  

    Si les locaux le permettent, deux matériaux sont ajoutés et fournissent une occasion supplémentaire d’encourager nos jeunes élèves à exercer leur agilité manuelle, leur esprit d’initiative, leur attention et leur réflexion, tout en apprenant à vivre ensemble. Deux matériaux aux possibilités tellement vastes que quatre années d’école maternelle sont bien insuffisantes pour les explorer toutes. Pas d’école maternelle sans sable ni eau !  Le sable était sans doute mieux à l’extérieur mais les normes nous imposent parfois de l’introduire dans la salle d’activités. L’eau est difficile à manipuler sans se mouiller mais quelle ressource inépuisable d’entraînement sensoriel ! Quelle école de la discipline librement consentie que ces deux matériaux de base !

    Notes :

    [1] L’éducation maternelle dans l’école, ch. VI (opus cité).

    [2] http://www.education.gouv.fr/bo/2008/hs3/programme_maternelle.htm , voir PERCEVOIR, IMAGINER, SENTIR, CRÉER. Ce chapitre a été repris quasiment à l’identique dans le programme en vigueur depuis la rentrée 2015.

    Et pour vos cadeaux de Noël :

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    CP : Mon enfant ne déchiffre pas

     


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  • GS : Jeux sportifs et « Mathématiques » (3)

    Je ressors du placard une idée que j'avais mise en route l'an dernier, puis laissée de côté faute de retours.

    Après les livrets 1, 2 et 3 (voir liens en bas d'article), voici une nouvelle série de jeux sportifs propres à faire vivre les mathématiques en Grande Section.

    La progression, calquée sur celle de Se repérer, Compter, Calculer en GS, amène les enfants à connaître les nombres de 1 à 9 et leurs décompositions, effectuer des distributions et des partages, repérer leur droite et leur gauche et celle de la personne qui leur fait face et compter jusqu'à 30.

    Si vous voulez en savoir plus sur le reste de la méthode (manipulations collectives, fiches individuelles), n'hésitez pas à me contacter. Je me ferai un plaisir de vous renseigner.

    Télécharger « GS - Mathématiques et Jeux Sportifs 4.pdf »

    Dans la même série :

    Livret 1 :  GS : Jeux sportifs et « Mathématiques » (1)

    Livrets 2 et 3 : GS : Jeux sportifs et « Mathématiques » (2)

    Livret 4 : GS : Jeux sportifs et « Mathématiques » (3)

    Livret 5 : GS : Jeux sportifs et « Mathématiques » (4)

    Pour consulter la progression :

    GS : Se repérer, compter, calculer - Progression actualisée

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  • IV. 2. A. Mise en route - Maternelle et CP (3)

    En Classe Maternelle avec CP  

    (2e partie)

    Premier jour de classe 

    Après-midi

    1) Déshabillage, passage aux toilettes ;  TPS-PS (/MS) : coucher / MS/GS/CP : Jeux calmes

    Dix minutes avant l’entrée en classe, le maître rejoint l’ATSEM dans la cour, la libérant pour aller préparer le dortoir ou prendre sa pause. À nouveau, il informe les parents que tant que la météo le permettra, c’est dans ce lieu où les enfants jouent librement sans danger qu’il souhaite les accueillir matin et après-midi.

    À l’heure dite, il regroupe ses élèves près de lui pour que l’entrée dans les locaux s’effectue tranquillement. Après quelques secondes de retour au calme, les enfants sont prêts à se déplacer posément et peuvent pénétrer dans leur classe.

    Les exercices de vie pratique (déshabillage, rangement des vêtements, passage aux toilettes, lavage des mains, boisson) en passe de devenir rituels se déroulent eux aussi dans un calme relatif. Les TPS/PS quittent le groupe, sous la conduite de l’ATSEM, pour aller au dortoir. Le maître, s’il voit que c’est nécessaire, les accompagne pour leur souhaiter avec bienveillance une bonne sieste. Il a été entendu avec cette collaboratrice que les enfants ne seront pas réveillés et qu’en revanche, elle ne maintiendra pas au lit plus de 20 à 30 minutes un enfant qui n’a visiblement pas sommeil. Si certains élèves de MS le réclament, ils peuvent eux aussi aller se coucher dans un lit.

    Les plus grands se dirigent quant à eux vers la salle de classe et prennent un livre ou un jeu disposé sur les tables en attendant l’arrivée du maître.

    2) (MS) GS/CP : Langage oral et écrit (Littérature ou Questionner le Monde)

    Lorsque le maître est de retour dans la salle de classe, il installe confortablement ses élèves de CP, GS (et MS) dans le coin de regroupement. Si certains se sentent fatigués, ils peuvent s’allonger sur des tapis individuels. 

    Le maître présent alors un livre aux élèves, leur lisant le titre et leur faisant décrire la couverture[1]. Pendant une courte demi-heure, les échanges vont se dérouler entre les enfants et lui comme entre les enfants eux-mêmes en toute quiétude afin que ceux que ce début d’après-midi assomme un peu puissent se reposer.

    3) Expression corporelle : Mime ou Danse

    Une fois le livre rangé, les élèves ont besoin d’un moment de mouvement. Le groupe, parfois grossi d’un ou deux enfants de PS qui n’ont pas réussi à s’endormir, se dirige vers la salle de motricité. Là, le maître, se servant ou non du matériel exploitable du livre lu précédemment, mène une séance dans laquelle écoute, motricité large, créativité et langage s’imbriquent dans le plus pur style « maternelle ». Comptant ensuite travailler le geste de la boucle en écriture, il a donné à chacun des élèves un foulard ; les enfants le manipuleront librement avant que leur maître profite du geste naturel d’un enfant pour demander à ses camarades de l’observer et de le reproduire. Les échanges entre enfants sont favorisés, la référence aux comportements à adopter à l’intérieur d’un local à destination collective est constante, la bienveillance du maître est la règle.

    4) MS/GS : Préparation aux gestes de l’écriture ; CP : Jeux et exercices mathématiques

    De retour en classe, les élèves de GS et MS sont regroupés autour du tableau. Les enfants de PS qui sont déjà éveillés sont invités à s’installer librement aux coins de jeux ou d’expérimentation sensorielle, sous la surveillance de l’ATSEM, si la localisation du dortoir permet à cette dernière de garder une oreille attentive à ce qui s’y passe. Leurs camarades de CP ouvrent leur fichier de mathématiques et commencent l’observation de la première page pour y repérer les réponses aux questions que le maître leur a posées[2].

    Le maître rappelle alors aux élèves du groupe d’écriture la séance de motricité large qui vient d’avoir lieu et propose le premier exercice de sa méthode d’écriture : tracer des boucles. Le travail est collectif, commun aux enfants de MS et GS ; il commence par quelques exercices d’échauffement des doigts et de tenue du crayon et se poursuit par un premier essai au tableau ou sur une ardoise.
    Les élèves de GS sont encouragés à affiner leurs gestes, ceux de MS participent uniquement s’ils le souhaitent. Le travail mené en GS finit ou non par un exercice individuel sur table.

    Pendant ce court temps de travail écrit des plus jeunes, le maître rejoint les élèves de CP. Il valide le travail réalisé sur le fichier de mathématiques puis, après avoir expliqué rapidement le fonctionnement du carnet de leçons, qu'il a préparé pendant la pause méridienne, il leur montre comment préparer leurs cartables pour les emporter chez eux après la classe.

    5) Expression plastique ; jeux sensoriels ou d’imitation en autonomie

    Se reporter à la séance du matin. Les élèves étant moins nombreux, le maître peut en profiter pour entraîner les élèves les plus âgés dans une démarche de projet, encore très timide : « Que souhaitent-ils faire ? Quel rendu aimeraient-ils obtenir ? Quels outils et matériaux doivent-ils alors employer ? ». Mais il n’impose rien, préférant consacrer ces premiers jours de classe à la culture de l’autonomie, de l’entraide et de la gestion coopérative de l’espace-classe. Les enfants sont conviés à participer très activement au nettoyage et au rangement de la classe avant la sortie en récréation.

    6) Récréation

    Se reporter à la récréation du matin. Les enfants de TPS-PS qui se seront réveillés pendant l’horaire de récréation seront, selon leur choix, conduits dans la cour par l’ATSEM ou installés au calme dans la classe dans les coins de jeux d'imitation ou de construction.

    7) Musique : Comptines ; phonologie et jeux d’écoute

    Les enfants de TPS/PS ont rejoint le groupe. Tous s’installent au coin-regroupement. Le maître commence par des jeux très simples de reproduction de cris d’animaux, de voix parlée, chuchotée ou criée, des massages de la bouche, des joues et du nez qui permettront peu à peu d’apprendre aux enfants à porter leur attention sur les particularités de leur système phonatoire.

    Il continue par un jeu de reconnaissance de sons obtenus en utilisant les différents instruments à percussion de la classe[3], ce qui constituera la première séance de discrimination des sons.

    Il termine par une révision de la comptine vue le matin, s’attachant à obtenir au moins des élèves de CP, GS et MS une prononciation claire et bien articulée. Puis, avant que les premiers élèves ne s’en aillent, il ouvre devant lui le grand livre qu’il a choisi pour commencer l’initiation de ses plus petits au monde de la littérature.  

    8) Littérature : Heure du conte

    Ce livre ne contient que des illustrations et raconte une histoire qui pourra s’adapter tant aux plus jeunes qu’aux plus âgés. Le répertoire est vaste, allant du conte traditionnel aux créations plus actuelles. Pour le moment, le but est d’encourager les élèves à s’exprimer.
    Il sollicite tout d’abord les plus jeunes, puis leurs aînés, jusqu’aux élèves de CP qui sont chargés de résumer en deux ou trois phrases claires ce qu’on dit leurs camarades.
    S’il reste du temps, le maître lit alors les deux ou trois phrases qui accompagnent l’illustration de la première page et demande aux aînés ce qu’ils ont compris pendant que le départ des élèves s’effectue comme celui du midi. Comme ces phrases seront relues le lendemain, aucune angoisse d’avoir à rattraper quelque chose ne perturbe ces derniers instants de vie de la classe, ni chez les élèves, ni chez le maître.

    Premières semaines

    Le lendemain et les jours suivants, ce sera déjà un peu plus simple. Le maître conduira tranquillement les familles vers l’idée d’un accueil ailleurs qu’en classe. Pour le moment, il se basera sur les difficultés de séparation des plus timides pour encourager les parents à ne pas entretenir indéfiniment le déchirement de la séparation. En deux à trois semaines, soient dix à quinze jours d’adieux quotidiens, le problème doit être réglé. Les enfants[4] doivent avoir réalisé que ces séparations ne sont que très temporaires et donc sans danger d’abandon. 

    Le rythme des journées, toujours identique, est en cours d’acquisition. Le maître, secondé dans cette tâche par l’ATSEM, s’emploie à aider les élèves à s’y conformer en le variant le moins possible. 

    Les quatre regroupements de la journée, ainsi que les séances collectives d’apprentissage des plus grands, deviennent progressivement les points de ralliement de la classe. Les élèves savent où ils doivent installer à la suite du maître.

    Le matin, l’habitude est prise de commencer par un rapide tour d’horizon des présents et des absents, notés rapidement par le maître sur le cahier d’appel. Ensuite, le maître indique quel jour nous sommes[5] et explique si c’est un jour d’école complet, moyen ou court. Cette information, plus importante que le nom de ce jour pour un enfant qui vit encore au jour le jour, est affichée, sous forme de symbole, sur le tableau du coin de regroupement.
    Afin que les élèves de CP commencent à savoir baliser le temps qui passe et se repèrent de plus en plus finement dans l’écrit, le maître écrit à côté la date en cursive de manière traditionnelle (jour, quantième, mois et pourquoi pas année).  

    Puis, après le départ des grands vers un temps d’exercices autonomes, chacun y raconte son histoire ou montre l’objet qu’il a rapporté de chez lui, s’il le souhaite. Le maître expose à son tour une image, une page d’album qu’il lit, un objet en rapport avec un événement évoqué la veille. Il commence ainsi à entraîner chacun dans une idée de continuité des apprentissages au fil des jours. Il cible ses interventions en fonction de ses interlocuteurs et, comme dans une famille où les âges s’échelonnent, ni les plus jeunes, ni les plus âgés ne sont gênés par le niveau de langue qu’il emploie.

    Le regroupement des plus grands en début d’après-midi prend peu à peu son rôle de sensibilisateur à l’écriture-lecture et à l’envie de questionner le monde. Le maître y alterne les lectures d’albums ou de contes, les rédactions collectives sous la forme de dictées à l’adulte, les observations d’objets, les expérimentations collectives autour du vivant ou de la matière.

    Les temps d’ateliers autonomes permet au maître de se rapprocher d’un enfant ou d’un petit groupe de manière ponctuelle et ciblée sans pour cela se désintéresser des autres. Le petit nombre d’enfants par niveaux permet de mener des leçons expresses simplement sous la forme de régulations, telles qu’elles sont présentées dans le chapitre III. 2. E. Mise en route - Élém. sans CP (1)
    Le nécessaire entraînement écrit destiné à fixer une notion découverte par le jeu et la manipulation a lieu, tous les jours, à heures fixes, pour les élèves soumis aux apprentissages à progression linéaire du CP et de la GS ; leur faible nombre permet d’installer immédiatement un soutien, une correction, une remédiation...

    Les regroupements de fin de demi-journée tournent autour du son, celui qu’on chante comme celui qu’on prononce, qu’on écrit et qu’on lit. Les plus grands comprennent peu à peu qu’ils sont capables de tirer de ces essais, remarques et réflexions les notions et concepts qui les amèneront bientôt à écrire et lire.

    Les déplacements ritualisés sont bientôt parfaitement installés[6] et le maître comme les élèves profitent des temps de latence pour mener ces conversations à bâtons rompus qui assurent ce que les programmes scolaires baptisent pompeusement « compétence à échanger et s’exprimer ». Du plus jeune au plus âgé, chacun reçoit ce dont il a besoin dans un temps d’échanges informels où, bien vite, le maître a su repérer ceux qui ont besoin de plus d’attention et d’encouragements.

    Ainsi, tous les temps de la journée prennent leur place et assurent la prise d’autonomie de chacun. La cohésion du groupe s’installe d’elle-même et, en fin de cette période d’installation, chaque enfant connaît et peut nommer tous ses petits camarades. Les échanges vont bientôt pouvoir se charger, même chez les plus jeunes, d’une dimension instructive et les apprentissages commencer à se structurer. L’année scolaire est lancée. Elle prend désormais son rythme de croisière.

    Dans la même série :

    Tous les chapitres déjà mis en ligne sont répertoriés dans la Table des matières   évolutive que vous trouverez dans la partie Sommaires.

    Pour la partie présente :

     I. Idées reçues  ; IV.1. Quatre niveaux dans la même classeIV. 2. A. Mise en route - Maternelle+CP (1)IV. 2. A. Mise en route - Maternelle et CP (2) ; IV. 2. A. Mise en route - Maternelle et CP (3)

    Notes :

    [1]  Pour la technique et le choix des lectures offertes, se reporter à Pour une Maternelle du XXIe Siècle, chapitre XII, Du langage oral au langage écrit, p. 93 et suivante.

    [2] Voir livre du maître Compter, Calculer au CP (me contacter).

    [3]  Voir de l’écoute des sons à la lecture, Grip éditions.

    [4] …et leurs parents !

    [5] Sans quantième ni mois… Trois codes millénaires d’un coup, pour des enfants de moins de cinq ans, c’est un peu indigeste !

    [6] Sauf enfant à problèmes comportementaux lourds qui aura besoin, sans doute encore très longtemps, d’un accompagnement personnalisé. Pour lui, les adultes ne peuvent qu’anticiper les facteurs de stress et d’excitation et faire en sorte que cela se passe le moins mal possible pour lui et pour tous ses petits camarades. L’accompagnement des familles qui devrait incomber à la Protection Maternelle et Infantile, à la Direction Départementale des Affaires Sanitaires et Sociales ou la Maison Départementale de la Personne Handicapée, retombe malheureusement bien souvent, surtout en l’absence de Réseau d’Aide Spécialisée pour l’Enfance en Difficulté, sur les épaules du maître, de l’ATSEM et des enfants qui partagent le même lieu de vie. Chaque cas étant un cas très particulier, le maître mot est l’adaptation des conditions de vie de cet enfant en fonction de ses difficultés propres et l’anticipation constante des facteurs de risques (agitation, bruit, excitation mais aussi trop grande concentration, immobilité trop longue, …) qui provoqueraient immanquablement une « crise »…

    Et pour vos cadeaux de Noël :

    N'oubliez pas :

    Y aura-t-il de la pédagogie pour Noël ?

    CP : Mon enfant ne déchiffre pas


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