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V.2.A. Mise en route - CP à CM2 (2)
Classe Élémentaire avec CP
(2e partie)
Premier jour de classe
La tonalité du premier jour donne la tonalité de l’année scolaire. Encore plus que dans une classe à un seul niveau où le maître est constamment disponible pour tous ses élèves et peut rattraper rapidement ses fausses-pistes, il convient d’institutionnaliser tout de suite l’acquisition de connaissances sûres et facilement mobilisables comme objectif central de tout moment de classe.
L’organisation, la convivialité, les habitudes, l’utilisation du matériel scolaire s’installeront en action, pendant les activités scolaires proprement dites. Pour faciliter cela, les élèves arrivent dans une classe prête à fonctionner : le mobilier est installé, la place de chacun définie, le matériel[1], marqué au nom de chaque enfant, placé dans les bureaux ou les casiers ; c’est en l’utilisant qu’il apprendra à en prendre soin.
Matinée :
1) CP : Écoute ; expression orale / CE1 : Lecture oralisée / CE2/CM : Ex. écrits
Après une très brève présentation, le maître installe les élèves à leurs places où tout leur matériel de classe[2] est déjà rangé. Les élèves de CE2 et CM trouvent sur leur bureau leur cahier de classe et découvrent le tableau sur lequel a été préparé le travail des trente premières minutes : quelques lignes d’écriture (minuscules dans l’ordre alphabétique et majuscules de la première série : A, N, M) ou de copie, et un ou deux exercices de préparation à la première leçon d’étude de la langue. Ils copient la date écrite au tableau puis s’attellent à leur tâche.
Pendant ce temps, les élèves de CE1 ont découvert leur livre de lecture[3] et l’ont ouvert à la première page. Les élèves de CP se sont installés face à eux sur le banc placé sous le tableau pour profiter de leur lecture. Cette première histoire est un embryon de récit, au vocabulaire simple, aux phrases courtes et répétitives, pour aider à retrouver les réflexes de l’année scolaire précédente[4]. L’intrigue est évidente pour que tous la suivent sans difficulté. Si de plus elle est amusante, le maître part à coup sûr gagnant ! Après cette lecture, parfois très, très hésitante, le maître relit, en surjouant la scène, de manière à capter l’intérêt de tous. L’utilisation de marionnettes ou de petits personnages, selon le principe des sacs à conter, permettra de faire comprendre l’histoire aux élèves à l’intérêt le plus dispersé.
Puis le maître laisse les enfants s’exprimer. Les plus jeunes sont sollicités les premiers, les plus âgés, encouragés à les écouter pour compléter ou préciser ce qui a été dit. Le maître, aidé par le questionnaire d’exploitation placé à la suite du texte sur le manuel, relance l’intérêt par des questions de sens, de vocabulaire, des encouragements à clarifier, expliciter, reformuler. Par ses interventions, il provoque les hypothèses, la verbalisation de l’implicite, les rapprochements sémantiques, l’interprétation des motivations des héros de l’histoire…
2) CP/CE1: Étude de la langue ; CE2/CM : Exercices écrits
Puis, pas à pas, il entraîne son petit groupe vers l’analyse de la première notion de grammaire qu’il compte leur faire aborder.
En ce premier jour, comme cette notion est aussi inscrite au programme du CE2 et du CM, il demande à ses grands élèves d’interrompre leur tâche et de s’intéresser à ce que le groupe va étudier. Ce qui sera apprentissage grammatical pour les plus âgés sera analyse du langage oral, découverte du principe alphabétique ou même tout simplement vocabulaire pour ceux du Cours Préparatoire. La notion découverte par les élèves eux-mêmes est alors travaillée à l’oral et au tableau, pour tous. Seul le niveau des questions et des attentes distinguera les plus âgés des plus jeunes.Lorsque la leçon collective est finie, les élèves de CE1 ouvrent leur cahier[5] et apprennent comment ils doivent présenter leur première journée de travail en suivant les balises que le maître y a placées à l’avance et reproduites au tableau. Ceux de CE2 et CM terminent les exercices qu’ils avaient commencés.Puis les CE2 se préparent à leur exercice de dictée en étudiant les mots que le maître a copiés pour eux au tableau.
3) CP : Lecture ; CE1 : Écriture, Ex. écrits ; CE2/CM : Exercices écrits
Les trois niveaux de « grands » lancés sur leur travail écrit, le maître reste alors seul avec ses plus petits pour leur première leçon de lecture. La première leçon du manuel est reproduite au tableau et c’est ensemble, à petits pas, qu’ils vont l’explorer et l’étudier. Le groupe étant peu nombreux, chacun est forcément partie prenante et l’attention, encore très dispersée après deux mois d’interruption, est sollicitée brièvement par des tâches courtes et immédiatement gratifiantes car porteuses d’un savoir supplémentaire.
4) CP : Écriture ; CE1 : Ex. écrits, Autonomie ; CE2/CM : Étude de la langue
La première « leçon d’écriture » des CP, qui suit immédiatement la lecture pour pouvoir, plus tard ou dès aujourd’hui, en être l’application, est courte et simple et s’appuie sur le niveau des élèves. Après quelques jeux de doigts, il peut aussi bien s’agir simplement de mettre en place la tenue du crayon et la position du cahier pour y faire juste quelques petits zigzags en mobilisant le pouce et le majeur, comme d’installer le geste de la boucle ou, même, dans le meilleur des cas, de réviser l’écriture de la lettre a et du digraphe ch, objets de la leçon de lecture du jour.
Une fois ce travail lancé, les élèves de CE1 étant quant à eux penchés sur leurs exercices écrits ou déjà installés dans l’espace réservé aux jeux en autonomie, le maître est disponible pour les plus grands et, dès le lendemain, il pourra les réunir près de lui pour une « leçon » d’étude de la langue, ciblée, courte et précise si les élèves gardent peu de souvenirs de leurs années précédentes ou aux allures de simple « régulation » s’ils ont déjà des bases structurées en la matière. Aujourd’hui, ces quelques minutes lui permettront de jeter un coup d’œil sur le travail achevé, aider de quelques conseils des élèves en difficulté et montrer à d’autres comment s’autocorriger facilement.
5) CP : Exercice écrit + dictée ; CE1 : Dictée + autonomie ; CE2/CM : Lecture silencieuse
Les élèves de CP enchaînent avec la première page d’exercices écrits de leur fichier. S’ils n’écrivent pas encore, le maître a prévu des étiquettes autocollantes représentant les trois éléments qu’ils devront y repérer (a, ch, cha).
Il distribue aux plus grands le premier texte de lecture de l’année (il y en aura un chaque jour) et le situe brièvement afin qu’aucun des élèves n’ait de difficultés pour le comprendre.
Il appelle alors près de lui les enfants du CE1 pour ce qui constituera chaque jour le « bilan » des acquis de français écrit : la dictée. Elle porte sur les acquis grammaticaux vus le matin même (lettres, syllabes, mots, phrase) et ne comporte aucune difficulté[6]. Il la corrige au fur et à mesure, en aidant chaque élève à surmonter les difficultés.
Les élèves de CP montrent leur travail et, très vite, sous forme de « bilan » de français quotidien, le maître leur fait écrire de mémoire ou montrer les étiquettes : ch, a, cha dans l'ordre et dans le désordre.
Puis le maître leur montre, ainsi qu’aux élèves de CE1, comment préparer leur cartable pour l’emporter à la maison le soir et quelles révisions ils auront à mener à bien avec leurs familles, puis il les encourage à choisir une activité autonome[7] dans l’espace réservé à cet effet.
6) CP/ CE1 : Autonomie ; CE2 : Dictée ; CM : Régulation
Les « petits » s’occupent utilement dans leur coin, sous la surveillance lointaine mais effective du maître qui se réserve le droit de rappeler près de lui un élève trop bruyant ou dangereux pour lui-même et ses camarades.
Les plus grands viennent alors montrer leur travail écrit de français pour lequel ils recueillent quelques conseils et consignes de correction. Les élèves de CM retournent à leurs places procéder à ces « mises aux normes »[8] pendant que ceux de CE2 ouvrent leur cahier de français pour y effectuer leur première dictée.
En ce premier jour, selon le niveau constaté au cours de ces premiers travaux de français, le maître dictera, dans le pire des cas, la même chose qu’aux enfants de CE1 et, dans le meilleur, deux phrases simples, sans marques d’accord inaudibles mais avec une reprise pronominale. Comme chez les plus jeunes, ce moment est considéré comme un temps d’apprentissage et non de contrôle et les corrections ont lieu en cours de tâche, sous la forme d’aides à l’écriture.
Il sait qu’il a le temps et que l’année scolaire, démarrée ainsi dès le premier jour de classe, dans un esprit d’acquisition de connaissances, mènera ses élèves lentement mais sûrement vers une orthographe correcte d’ici la fin de l’année scolaire.C’est d’ailleurs dans cette idée de progression qu’il n’a pas prévu de dictée quotidienne au CM, préférant de loin consacrer du temps une seule fois par semaine à un travail plus long dans lequel les diverses reprises amèneront les élèves à pratiquer toutes les inférences de sens qui leur permettront d’accéder à une réelle compréhension du texte dicté.
La dictée une fois terminée et les dernières corrections effectuées, le maître aide tout son groupe de grands à répertorier le travail individuel de révision à faire à la maison et supervise la copie des leçons sur l’agenda et la préparation des cartables.
7) Récréation
En rural, quand le maître est seul dans l'école, est responsable des enfants présents du matin au soir. C'est donc lui qui effectue, tous les jours, la surveillance du temps de récréation des enfants. Au moment de sortir, le maître rappelle à ses élèves, en insistant auprès des plus jeunes, que ce temps de récréation sert aussi à satisfaire les besoins physiologiques élémentaires : se désaltérer, passer au toilettes, se laver les mains.
8) CP/CE1: Mathématiques, manipulations collectives ; CE2 /CM : Exercices écrits de mathématiques en autonomie
Après un petit temps dans la cour, pour permettre aux élèves de CP et CE1 de vivre les mathématiques corporellement[9], le groupe entre en classe. La première leçon n’offrant aucune difficulté, et le tableau ayant été préparé pour montrer aux élèves de CM la présentation souhaitée sur leur cahier de mathématiques, les élèves de CE2 et de CM sont lancés directement sur les exercices de leur fichier ou de leur manuel et, tout à l’heure, c’est en validant les réponses données que le maître en profitera pour « réguler » les connaissances de chacun.
Les élèves de CP et CE1 se regroupent près du maître et mènent ensemble les premiers apprentissages : révision des nombres de 0 à 10 pour tous, avec un peu plus d’insistance sur les trois premiers pour les plus jeunes. Les exercices de manipulation sont collectifs, rapides, peu exigeants en temps et en matériel. L’entraide est instaurée comme règle et le but est clair : réinvestir ou acquérir une notion chaque jour et en faire le tour : vécu corporel, manipulation et bilan écrit.
La séance finit par une exploration du premier exercice du fichier et les élèves se mettent au travail.
9) CP /CE1/CM : Exercices écrits en autonomie ; CE2 : Mathématiques, régulation
et
9 bis) CP : Jeux en autonomie ; CE1/CE2 : Exercices écrits et jeux de mathématiques en autonomie ; CM : Mathématiques, régulationLe maître demande alors aux élèves de CE2 de le rejoindre afin de lui montrer leur travail. Il s’appuie sur ce qu’ils ont déjà compris pour les amener à verbaliser et compléter la trace écrite présentée dans le fichier, donner du matériel (pièces et billets factices, décimètre gradué), corriger leurs erreurs éventuelles, rattraper le retard des plus lents et « décortiquer » les consignes des exercices suivants. Il rappelle la règle : « à la fin de la matinée, la page du jour doit être finie » et leur explique que, dès le lendemain matin, ils pourront profiter de leurs temps en autonomie pour « s’avancer en mathématiques ».
Après les avoir remis au travail et être passé auprès des enfants du CP et du CE1 pour voir où ils en sont, donner de nouvelles consignes, rappeler la règle qu’il vient de donner aux plus grands, leur rappeler qu’une fois leur travail fini et validé, ils pourront aller s’installer au coin d’activités autonomes, il appelle près de lui les élèves de CM. Avec ces derniers, il procède comme avec les CE2, ajoutant quelques conseils de tenue du cahier de mathématiques à ceux portant sur le fond.
Il ne s’inquiète pas outre mesure des difficultés des élèves sur l’un ou l’autre des points traités et compte sur le travail régulier et les reprises fréquentes pour combler les manques ; il n’hésite pas à les aider et à leur fournir des compléments[10] afin qu’ils puissent traiter les exercices et problèmes de la page, seuls ou avec lui, avant la fin de la matinée. Il leur signale, comme il la fait pour les cadets, que, dès le lendemain, ils pourront profiter des temps en autonomie pour commencer le travail de mathématiques de la journée[11].Dans la même série :
Tous les chapitres déjà mis en ligne sont répertoriés dans la Table des matières évolutive que vous trouverez dans la partie Sommaires.
Pour la partie présente : V. 1. Cinq niveaux et plus ; V.2.A. Mise en route - CP à CM2 (1) ; V.2.A. Mise en route - CP à CM2 (2) ; V.2.A. Mise en route - CP à CM2 (3)
Notes :
[1] Voir Annexe V.
[2] Voir Annexe V.
[3] L’utilisation d’un manuel de lecture, composé de contes et de récits complets, adaptés aux capacités de lecture d’un enfant de tout juste sept ans, complété d’exercices de compréhension et de vocabulaire, est un confort qui nous est souvent refusé aujourd’hui. Rien ne nous empêche cependant de nous en concocter un, mêlant textes « classiques » et extraits de romans « modernes ». Pour ceux qui n’auraient pas le temps de faire ce travail, j’en ai composé un, utilisable au CE1 mais aussi sans doute au CE2. Je l’envoie à qui le veut, sans frais, au format .pdf.
[4] Certains élèves n’auront pas lu une ligne de tout l’été, il faut le savoir.
[5] Voir Annexe V.
[6] Quelques lettres, deux ou trois syllabes, quelques mots simples de deux ou trois syllabes et même, si les élèves sont déjà « dans le bain », une phrase simple sans marques d’accord en genre et nombre inaudibles.
[7] Rappel : Pour se soulager et tenir sur la distance, aucune de ces activités en autonomie ne nécessitera de correction de la part du maître. Ce sont : des jeux et jouets, individuels ou de petit groupe, des lectures, des activités manuelles.
[8] Ce seront les dernières : ensuite, la correction viendra du maître et validera, ou non, l’effort consenti... Pas question de resservir indéfiniment l’assiette de soupe froide. Les méthodes choisies étant très « spiralaires », les acquis suivants réentraîneront aux anciens, tout au long de l’année scolaire.
[9] Voir Livre du Maître Compter, Calculer au CP.
[10] Je pense particulièrement à l’exercice de conversions de mesures de longueur. En associant à leur place le km à l’unité de mille, l’hm à la centaine, le dam à la dizaine et le m à l’unité et en fournissant au besoin du matériel (perles ou cubes Montessori, mathcubes, etc.), l’exercice devient faisable collectivement beaucoup plus facilement.
Cette manipulation, encore toute intuitive, sera reprise souvent au cours des leçons suivantes, sous cette forme ou sous une autre, et c’est tout naturellement que les notions s’installeront pour tout le monde.[11] Il peut aussi, si les familles l’acceptent, et dans le but de préparer ses élèves au « choc » de la Sixième, donner à refaire à la maison un ou deux des exercices de la page, faits à l’oral et au tableau pendant la matinée de classe. Afin d’encourager ses élèves et leur donner confiance en eux, il a soin de choisir ces exercices parmi les plus simples.
Bientôt l'époque des commandes :
N'oubliez pas :
Pour une maternelle du XXIe siècle
Se repérer, compter, calculer en Grande Section
Questionner le monde au Cycle 2
Tags : multiâge, quintuple niveau, élémentaire, primaire, CP, CE1, CE2, CM1, CM2
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