• L'éducation spatiale à l'école maternelle

    L'éducation spatiale à l'école maternelle
    Ici, treize élèves de maternelle en train d'apprendre à ne pas écrire les chiffres en miroir !
    Merci à Sophie Borgnet pour cette illustration tirée de Pour une maternelle du XXIe siècle
    Nota bene : les douze à dix-sept autres sont aussi occupés à acquérir cette compétence dans les autres "coins de la classe" : dînette, poupées, garage, pâte à modeler, dessin, puzzles, découpage, etc. 

    Ils écrivent les chiffres en miroir

    Des collègues se demandaient récemment comment éviter les cohortes d'élèves qui écrivent les chiffres en miroir.

    Ma réponse a été : « On évite cela en mettant en place dans sa classe une éducation spatiale de tous les instants. »

    Cela a suscité quelques interrogations.

    L'éducation spatiale, qu'est-ce que c'est ?

    L'éducation spatiale est simplement un des domaines des programmes qui peut être proposé aux élèves transversalement, par le jeu, la réflexion, l'exercice, la remémoration, dans tous les domaines.

    Cela consiste à situer chaque activité dans un contexte spatial de manière  apprendre aux élèves :

    → à s'orienter au lieu de déambuler sans but ni ligne de conduite,

    → à observer attentivement au lieu de laisser ses yeux survoler les choses sans même vraiment les voir,

    → à représenter le réel par l'objet ou le dessin et accéder ainsi au symbole et passer de la réalité en 3 dimensions à sa représentation en 2 dimensions,

    → et enfin à mettre en mots ce que l'on percevait jusqu'alors sans pouvoir réellement le nommer.

    Dans tous les domaines, ça donne quoi ?

    Prenons-les un par un, ce sera plus simple.

    ♥ Dans le domaine du langage oral

    Cela consistera à utiliser le vocabulaire spatial, chaque fois que cela est possible, d'abord pour eux, à leur place, afin qu'ils l'apprennent, puis avec eux, en les sollicitant, afin qu'ils prennent l'habitude de l'utiliser.

    Cela aura lieu à chaque regroupement de toute la classe, à chaque travail avec un petit groupe, à chaque échange duel entre l'adulte et un enfant.

    ♥ Dans le domaine du langage écrit

    Cela consistera à pousser les élèves

    → observer les formes

    ◊ dans les écrits et supports d'écrits présentés (TPS PS MS GS),

    ◊ dans les phrases écrites face aux élèves (MS GS),

    ◊ dans les lettres et les mots étudiés (GS),

    → à les décrire en s'appuyant sur le vocabulaire spatial et en prenant des repères fixes dans la classe (d'où l'intérêt de placer les enfants de GS face au tableau, pour toutes les activités d'écriture, d'observation de l'écrit, de structuration de la pensée),

    GS : à les reproduire en maîtrisant les déplacements spatiaux.

    ♥ activités physiques

    Cela consistera à programmer très régulièrement tout au long des années scolaires successives, et non seulement pendant une période par an, des jeux visant à :

    → se situer et se déplacer dans l'espace à trois dimensions

    → situer des objets ou des personnes par rapport à soi,

    → situer des objets ou des personnes les uns par rapport aux autres,

    → maîtriser des notions spatiales précises : haut bas gauche droite, vers le haut, vers le bas, vers la droite, vers la gauche, ...

    On peut trouver quelques activités précises de structuration spatiale en suivant ces liens (ces activités sont pour la plupart adaptables à la PS (livret 1) et à la MS (livrets 1, 2 et 3)): GS : Jeux sportifs et « Mathématiques » (1) ; GS : Jeux sportifs et « Mathématiques » (2) ; GS : Jeux sportifs et « Mathématiques » (3)GS : Jeux sportifs et « Mathématiques » (4)

    ♥ activités artistiques

    Cela consiste à faire pratiquer quotidiennement à ses élèves :

    → le dessin représentatif,

    → l'observation d'images,

    → les productions plastiques à deux et trois dimensions,

    → le graphisme à visée artistique,

    et de temps en temps :

    →  le spectacle vivant : danse, cirque, mime, théâtre, marionnettes, ... 

    ♥ structurer la pensée

    Bien sûr, mais pour les GS uniquement :

    →  observer, décrire, reproduire les chiffres pour pouvoir écrire les nombres,

    mais aussi, pour tous, dès la TPS :

    → explorer les formes, les grandeurs, les suites organisées

    ♥ explorer le monde

    Dans sa partie espace évidemment :

    → situer des objets par rapport à soi, entre eux, par rapport à des objets repères.

    → se situer par rapport à d’autres, par rapport à des objets repères.

    → dans un environnement bien connu, réaliser un trajet, un parcours à partir de sa représentation (dessin ou codage).

    → élaborer des premiers essais de représentation plane, communicables (construction d’un code commun).

    → orienter et utiliser correctement une feuille de papier, un livre ou un autre support d’écrit, en fonction de consignes, d’un but ou d’un projet précis.

    → utiliser des marqueurs spatiaux adaptés (devant, derrière, droite, gauche, dessus, dessous…) dans des récits, descriptions ou explications.

    mais aussi :

    → observation, description et représentation du monde du vivant, de la matière et des objets).

    GS uniquement : observation de la façon d'écrire le temps par une représentation linéaire, en tableau ou circulaire


    Évaluation et remédiation

    Si, pendant les trois à quatre années de maternelle, on s'est employé à faire appréhender de manière sensible, motrice et cognitive l'espace que nous voyons autour de nous et que nous traversons, et qu'on s'est employé à ce que les enfants le représentent de plus en plus finement dans l'espace à deux dimensions du tableau ou de la feuille de papier, on aura mis toutes les chances de leur côté pour éviter ces chiffres en miroir, ces confusions de lettres, ces difficultés à distinguer et reproduire des figures géométriques.

    On n'aura plus qu'à, lorsqu'une erreur se produira, aider l'élève concerné à trouver des repères fixes qui lui permettront d'appliquer à cette activité les habitudes spatiales qu'il a prises depuis trois ans :

    → une gommette verte à gauche de son espace d'écriture : « C'est le feu vert pour commencer à écrire. »

    → une flèche orientée de gauche à droite en haut de son espace d'écriture : « Quand j'écris je pars du feu vert, à gauche, et je suis la flèche, pour partir vers la droite »;

    → des repères fixes (le couloir, les fenêtres, l'horloge, etc.) sur lesquels il pourra s'appuyer lorsqu'il écrit un chiffre ou une lettre : « Le chiffre 3 a le dos vers les fenêtres... le ventre de la lettre b regarde aussi vers les fenêtres... la casquette et le ventre du 5 regardent vers le mur du couloir... »

    Petit conseil bonus :

    Deux proverbes pour commencer

    Qui veut voyager loin ménage sa monture.

    On ne fait pas pousser les pommes en tirant sur les branches du jeune pommier.

    Et une conclusion :

    Souvent, commencer trop tôt une activité trop compliquée pour l'enfant le déforme plutôt que de le former.

    On ne fait pas écrire les enfants de 2, 3 et 4 ans. car ils n'ont :

    → ni les capacités motrices pour cela,

    → ni une vue claire du repérage spatial dans l'espace à deux dimensions de la feuille de papier.

    On attend qu'ils soient prêts, vers 5 ans, 5 ans et demi, et là, on peut aller beaucoup plus loin qu'on ne le croit et obtenir des jolis cahiers comme celui-ci, sans forcing ni primarisation de l'école maternelle, pour quasiment[1] toute une cohorte, quasiment tous les ans et dans tous les milieux :

    L'éducation spatiale à l'école maternelle

     Note :

    [1] Quand je dis « quasiment », je veux dire qu’on ne rencontrera de difficultés totalement insurmontables qu’avec un ou deux enfants tous les cinq à dix ans environ, en tous points du territoire. Les difficultés ponctuelles en cours d’apprentissage ne sont pas concernées puisqu’elles sont normales. 


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