• La ritualisation des rituels, quelle barbe !

    Les rituels de début de matinée, dans toutes les classes, c'est un truc qui a pris une importance démesurée alors que, si on y regarde bien, ça ne contient pas tant de savoirs que cela.

    Les présents et les absents, par exemple. En maternelle, cela peut être judicieux parce qu'en effet, il arrive que certains enfants aient une fréquentation irrégulière jusqu'à la MS parfois. Et encore, la reconnaissance des prénoms, si tant est qu'elle soit utile à l'apprentissage de l'écriture, se fait très bien sans ou à d'autres moments. Quant à la socialisation que ce rite d'accrochage du prénom sur un tableau permettrait, elle est sans doute bien mieux obtenue par le partage d'un jeu commun, ronde, danse, comptine au cours de laquelle on appelle tout le monde en chantant et en jouant.
    En GS et a fortiori en élémentaire, en revanche, ce rite est inutile du fait de l'obligation scolaire pour les plus grands et d'une fréquentation qui, en GS, est généralement très régulière, sauf cas lourd... qu'il est bien inutile de stigmatiser en rappelant à ses petits camarades que, pour la troisième fois cette semaine, Untel manque encore la classe du matin !

    La date maintenant. Si l'on analyse le travail demandé, c'est très compliqué pour un enfant qui n'a rien à gérer socialement. On a en effet, trois systèmes à faire fonctionner en parallèle :
    - Celui de la semaine avec ses noms de jours qui se ressemblent tous et ne veulent rien dire pour quelqu'un qui n'a de comptes à rendre ni à un patron, ni à un dieu qu'il convient d'honorer à jours fixes.
    - Celui des quantièmes du mois, qui serait le plus simple si nous avions classe tous les jours mais qui devient bien plus difficile lorsque nous fonctionnons dans un système 5/2 (faussé qui plus est par une rentrée un mardi matin).
    - Celui des mois, qui tourne sur douze mots qui changent de loin en loin, surtout pour un enfant de moins de sept ans.

    En demandant à nos élèves de nous donner la date tous les matins, on procède finalement à l'évaluation répétée d'un savoir dont on sait pertinemment que la plupart des plus jeunes d'entre eux ne le maîtrisent pas encore. Même chose pour les plus grands, lorsque la date doit être donnée en anglais. Ce qui devrait être un apprentissage se transforme en contrôle quotidien... Plus fort et plus surveillé que l'acquisition des tables de multiplication ou des règles d'orthographe !

    Pourtant, ce n'est pas grand-chose et cela ne justifie pas un tel acharnement.
    Dans l'année scolaire, il convient en effet que les élèves de GS commencent à maîtriser la comptine des jours et l'ajout "+ 2" des lundis, mais ils ont l'année entière pour le faire. Certains y arriveront, d'autres non. En revanche, l'ajout "+1" des mardis, mercredis, jeudis et vendredis devra quant à lui venir tout seul, jusqu'à 31. Vous verrez que dans neuf mois, vous ne vous rappellerez plus que c'était si difficile pour eux en début d'année.

    Les CP devront quant à eux maîtriser la suite des noms de jours et être capables de dire immédiatement que si nous sommes un mardi, c'est qu'hier nous étions un lundi et que demain nous serons un mercredi.
    Il se peut d'ailleurs que vous en ayez un ou deux totalement incapables de cet exploit. Ne me demandez pas pourquoi, je n'en sais rien.
    J'ai toujours eu, de loin en loin, des élèves atteints de cette incapacité, parfois jusqu'au CM. Cela ne les a pas empêchés de réussir en 6e et de maîtriser cette compétence pour remplir leurs cartables des bons livres et des bons cahiers, au moment opportun. Ce sont les mêmes qui demandent régulièrement si on est le matin ou l'après-midi ou si c'est aujourd'hui que le professeur de musique vient alors qu'il est venu la veille... J'ai d'ailleurs l'impression que leur nombre a largement augmenté depuis qu'on a fait une religion de tous ces rituels et que tous les enfants, de la PS au CM2, doivent donner la date tous les matins au réveil à un maître ou une maîtresse qui font semblant de l'ignorer alors qu'ils sont les seuls à la connaître[1] !

    Il est en revanche très peu probable qu'au CP, on ait des élèves qui, en plus de savoir réciter l'ordre des mois, maîtrisent la succession de leurs durées respectives (31/28 ou 29/ 31/ 30/ ...). Pour cela, il faudra attendre, pour les plus concernés, le CE1, et pour les autres, le CE2 ou même plus tard.
    Je suppose qu'il existe des adultes qui, pour savoir combien de jours compte le mois d'août ou celui de novembre, se contentent de regarder sur un calendrier et ne s'en portent pas plus mal pour cela.

    Forts de toutes ces bonnes raisons, en ce tout début d'année scolaire, ne vous bilez pas si personne, avant le CE1 ou 2, peut, en début d'année, vous donner la date du jour, même et y compris si nous sommes vendredi et qu'ils viennent de revoir la succession des jours et des nombres toute la semaine.
    Pour ma part, j'ai arrêté de souscrire à ce rituel l'année où, après avoir remarqué que mes CP s'en sortaient mieux que mes CE1, je leur ai demandé d'exposer leur façon de faire pour qu'elle puisse servir à leurs aînés, décidément bien en retard par rapport à eux.
    Les uns m'ont alors dit qu'ils demandaient tous les matins à leur maman, juste avant de sortir de voiture pour être sûrs de ne pas oublier, alors que les autres m'ont expliqué qu'ils ouvraient discrètement leur cahier du jour pour regarder la majuscule que je leur avais tracée puisqu'ils ne savaient pas encore les faire. Celle-ci les aidait à pouvoir dire si nous étions Lundi, Mardi, Jeudi, Vendredi ou Samedi (nous n'avions pas classe le mercredi à cette époque-là).  Les CE1 ont confirmé que, depuis la rentrée, ils étaient désavantagés puisque, ayant appris à tracer ces majuscules, ils n'avaient plus d'aide pour énoncer le nom du jour !
    J'ai été confortée du bien-fondé de ma démarche à plusieurs reprises depuis. La dernière fois, ça a été l'an dernier, lorsqu'un petit bonhomme de GS nous a expliqué, à l'EVS et moi-même, que, pour lui, le moment qu'il détestait le plus à l'école, c'était celui où il fallait dire la date à la maîtresse pour qu'elle l'affiche au tableau !

    Si vous vous sentez obligés néanmoins de souscrire à ce rituel, vous pouvez l'inverser et énoncer la date à voix haute vous-même à vos élèves qui devront ensuite aller chercher les étiquettes qui permettront de l'afficher au tableau. Cela donnera par exemple :
    "Hier, nous étions Jeudi 10 septembre, alors aujourd'hui, nous sommes donc... après jeudi ?... vendredi... après 10 ?... 11... et toujours septembre qui durejusqu'au... 30 (en laissant un petit temps mort pour voir si un élève répond à notre place, dans ce cas on le félicite, et on dit qu'on espère que bientôt, ils seront plus nombreux à avoir compris comment ça marche). Voilà, vvvvendredi 11 sssseptembre. Untel, tu vas nous chercher l'étiquette du VVVVVendredi ? Bidule, tu cherches le nombre 11, 1 dizaine et 1 unité, s'il te plaît ? Et qui va nous chercher ssssseptembre, aujourd'hui... Ah oui, c'est Truc."

    Petit à petit, en cours d'année, on évolue :
    - En ne prenant au début que des élèves de CP[2]
    , puis un élève de CP et un de GS (pour que le grand apprenne au petit), et enfin, en fin d'année, quand les CP sauront déchiffrer les noms des jours et des mois, deux ou trois élèves de GS,
    - en changeant les règles quand on voit qu'ils sont très nombreux à parler "plus vite que la maîtresse" : "Je ne dis plus que le nom du jour... Vous vous dites le numéro et le nom du mois. Le jour où nous changerons de mois, je vous le rappellerai". Puis, plus tard, on demande si quelqu'un veut dire le nom du jour à notre place. Encore plus tard, en janvier par exemple, après avoir affiché un calendrier dans la classe, ce seront eux qui devront vérifier si le mois est bientôt fini ou pas.

    Il y a des collègues aussi qui font enlever une étiquette d'éphéméride tous les jours à partir de la rentrée de janvier et qui la font coller sur un tableau à double entrée. Si ça ne prend pas trop de temps aux apprentissages "sérieux" (lecture, écriture, maths, découverte du monde, musique, arts plastiques, EPS, anglais) pourquoi pas, mais bon, ce n'est pas si indispensable que ça et ça n'aide que ceux qui étaient suffisamment mûrs pour aller voir dans le futur plus loin que le lendemain soir et dans le passé, plus loin que l'avant-veille...

    On peut le rendre utile en faisant marquer sur chaque feuille qu'on colle le temps du jour. Cela sensibilise un peu au temps qu'il fait (sans pour cela espérer qu'un enfant de 5 ans, surtout un garçon, ne demandera pas à chaque récréation s'il faut mettre le bonnet, les gants, le blouson ou si ce n'est pas la peine) et apprend à la plupart de nos bambins qui sont venus à l'école en voiture, sans décoller les yeux de leur tablette, qu'il peut être utile de regarder la couleur du ciel... Chez les plus grands, cela peut s'accompagner d'une lecture du thermomètre, du baromètre et du pluviomètre, avec écriture sur un graphique. Mais il ne faut pas non plus que cela tourne à vide et que cela finisse par barber tout le monde, adulte compris ! À faire sur une période, pendant laquelle les changements risquent d'être très lisibles par tous.

    De même, chez les petits, jusqu'au début de CP, on peut rendre la cérémonie des présents un peu moins barbante en chargeant deux élèves (des facteurs) de distribuer les étiquettes-prénoms à leurs camarades après les avoir montrées à la classe entière. C'est ce que j'appelle le Jeu du Facteur.

    Autre rituel, qui est très chaudement recommandé actuellement, pour les CP à CM2 (et même au collège), c'est la "phrase du jour". Cela consiste à observer attentivement l'orthographe d'une phrase qui a été dictée à partir de mots et de règles apprises préalablement.
    C'est au programme d'Écrire et Lire au CP, assez vite. Cependant, vous n'êtes pas obligés de le faire le matin en arrivant, surtout si vous avez une classe à plusieurs niveaux et que vos autres élèves ne sont pas concernés. Pensez à le signaler néanmoins à la personne qui viendrait vous inspecter. Vous souscrivez bien au rituel de la phrase du jour, tous les jours, de telle heure à telle heure, avec vos élèves de CP, c'est prévu dans votre manuel d'apprentissage de la lecture.
    Je suppose qu'on doit pouvoir dire la même chose dans toutes les classes de CE1, CE2, CM1 et CM2 où, forcément, à un moment ou à un autre de la journée, on demande aux élèves de se poser un moment sur l'orthographe lexicale et grammaticale d'une phrase écrite collectivement mais aussi dictée et même rédigée individuellement. Il n'y a pas UNE phrase du jour, il y en a plusieurs, aussi bien lorsqu'on écrit un exercice de grammaire, une solution de problème mathématique, un compte-rendu d'observation scientifique, un résumé de fait géographique ou historique.

    Il y a aussi le "mot du jour". On achète une série "Les Incollables" correspondant à l'âge de ses élèves et, chaque jour, on lit un mot et on l'explique.
    Même constat que pour la "phrase du jour". J'ose espérer que c'est un travail qui est lié à tout exercice de lecture, qu'elle soit offerte par le maître ou la maîtresse, ou réalisée par les élèves eux-mêmes. Et ce n'est pas un mot par jour mais plusieurs, tous les jours, dans tous les domaines, du matin au soir, en revenant sur ceux qui ont été découverts, utilisés, rappelés quelques jours plus tôt et qui ont besoin d'être réactivés, encore et encore pour s'intégrer au vocabulaire mental de chacun.

    Dans les petites classes, jusqu'au CE1 inclus[3], un rituel qui n'est plus en cours et qui pourrait cependant être largement aussi formateur que la date ou la météo, ce serait d'observer quotidiennement un petit fait naturel lié à la saison, aux événements du moment (la semaine du goût par exemple, mais aussi les jours qui raccourcissent, au temps qui rafraîchit, aux festivités, etc.), à ce qu'on va découvrir dans la semaine de classe en lecture (je pense par exemple aux documentaires dans Écrire et Lire au CP, ou à la série sur le loup, les personnages imaginaires, la chèvre, etc...). Cela peut être une graine que l'on a semée, un fruit qu'on décortique tous ensemble, un petit animal qu'on garde dans un vivarium, un objet qu'on démonte, une photo ou une illustration que l'on observe, un article de journal, un tout petit film, un chant, un poème ou une comptine...

    Cela pourrait remplacer le "Quoi de neuf" où, malheureusement, ce sont toujours les mêmes qui parlent et qui monopolisent l'attention avec ce que leurs parents ont pensé à leur faire apporter à l'école, à leur faire visiter le week-end, à leur raconter, à leur faire lire...

    On pourrait appeler cela le "Quoi de plus ?", expliquant qu'il s'agit de fédérer le groupe-classe au sujet d'une découverte commune qui permet d'aborder en toute interdisciplinarité tous les domaines de l'école primaire, par petites touches, dès le matin, pour ritualiser la découverte, l'esprit d'observation, d'analyse et de synthèse, l'ouverture aux autres comme marques de fabrique de l'école.
    Si l'on se sent obligé que ce rituel serve à l'apprentissage du temps qui passe, les découvertes pourraient s'aligner, datées, de gauche à droite sur une table d'observation et donner aux enfants un début de commencement d'embryon d'idée de chronologie. Dans les petites classes, elles peuvent aussi faire l'objet d'un répertoire en noir et blanc que chaque élève collerait en fin de mois dans son cahier de découverte du monde, répertoire qui contiendrait pour chaque jour d'école (date écrite en entier) une photo ou un dessin du "quoi de plus" découvert le matin, une phrase dictée à l'adulte et tapée par lui à la fin du moment de "rituel".
    En tout cas, cela ne doit pas durer plus d'un quart d'heure ni empiéter sur les apprentissages. L'avantage de ce rituel-là, c'est qu'il vient en plus de ceux-ci au lieu de se substituer à eux.

    À moins que, tout simplement, on décide que la journée de classe commence par ce que le cycle 1 dénomme maintenant « Explorer le Monde » et ce qui s’appelle toujours au Cycle 2 « Découverte du Monde » alors que le Cycle 3 intitule cela « Sciences expérimentales et technologie » et « Culture humaniste »...

    À ce moment-là, il ne s’agit plus d’un rituel mais d’un objet d’enseignement à part entière, ce qui donne une tonalité plus noble et plus formatrice à l’activité .Personnellement, je préfère… mais bon, « le XXIe siècle sera religieux ou ne sera pas », aurait dit Malraux…
    Alors, allons-y pour les rituels, en lieu et place des savoirs !

    [1] Je suppose que, très bientôt, un savant nous expliquera que c'est une Carence Récurrente de l'Acquisition Chronologique (CRAC) et qu'il convient de fournir à ces élèves des agendas électroniques que les PE rempliront pour eux, des montres parlantes, des AVS qui leur souffleront la date au moment opportun et une rééducation longue et coûteuse dont on n'est pas sûr qu'elle servira à quelque chose mais qu'il vaut mieux entreprendre quand même avant de tenter le référencement MDPH...

    [2] Je ne vois pas l’intérêt de commencer avant la GS, ni de continuer après le CP (ou le tout début de CE1).

    [3] Mais aussi chez les plus grands du cycle 3 si l’on se trouve dans une école où les élèves ne sont pas entraînés à faire feu de tout bois et à toujours avoir une attitude réflexive devant les petits riens de la vie quotidienne qui peuvent apprendre autant et même plus que les grands projets lourds et longs à installer, mener, et conclure. Ce sera l’occasion pour eux de compléter leur vocabulaire, d’apprendre à regarder au lieu de voir, à vérifier in situ ce qu’ils ont vu sur des livres ou des documents vidéos.


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  • Écrire et Lire au CP : apprendre l'orthographe
    Merci à Xavier Laroche pour ses illustrations.

    Orthographe lexicale au CP

    À la demande d'une jeune collègue qui débute en CP, quelques conseils pour lier écriture et lecture, son et sens afin de permettre aux élèves d'acquérir facilement et intelligemment[1] l’orthographe des mots très courants.

    Ces conseils, calqués sur la progression de la méthode de lecture Écrire et Lire au CP, peuvent être adaptés à toutes les méthodes alphabétiques (qu’elles soient synthétiques comme Bien Lire et Aimer Lire, La Journée des Tout-Petits, La Planète des Alphas, …, ou analytiques-synthétiques comme Taoki, Bulle, Ratus, Gafi le Fantôme, …).

    Ils peuvent aussi aider les familles qui souhaitent compléter l’enseignement de la lecture reçu en classe avec une de ces nombreuses méthodes dites mixtes[2] que l’on trouve sur le marché mais qui cantonnent toute l’année l’enfant dans une utilisation a minima du principe alphabétique et privilégient, avec le succès que l’on connaît, la « voie directe », celle qui consiste justement à ne pas utiliser sa voix (et son intelligence) pour apprendre l’orthographe.

    Pour ceux que la lecture sur écran gêne, j'ai écrit une version .pdf téléchargeable, accessible grâce au lien ci-contre : Télécharger « Écrire et Lire au CP - orthographe.pdf »

    Écrire et Lire au CP : apprendre l'orthographe

    1.
    Connaître des voyelles et quelques consonnes.
    S’en servir pour construire seul des syllabes

    Début d’année scolaire, premières semaines - livret 1 et cahier d’exercices de la page 2 à 12

    Repères d’apprentissage :

    - L’enfant qui entre au CP n’a la plupart du temps que très peu de repères dans l’écrit. Au mieux connaît-il quelques lettres et sait-il les associer pour écrire une syllabe simple. Il ne peut donc être question pour lui de mettre une réelle intelligence dans l’écriture de mots. Pendant cette période, lui demander d’apprendre à écrire par cœur des mots[3] revient à l’encourager à écrire sans faire appel à ses facultés d’analyse et de synthèse.

    En effet, en raison de l’insuffisance de leur connaissance du principe alphabétique et de la combinatoire, seules l’observation et la mémoire visuelle ou kinesthésique entrent en jeu. Aucune mise en synergie des trois sens[4] qui lui serviront à apprendre à lire ne vient compléter des capacités de raisonnement et de logique, laissées dramatiquement de côté.

    - Ce qu’il va en revanche très vite apprendre à faire seul, sans apprentissage par cœur surtout[5], c’est à composer des syllabes. Pour l’aider le maître pourra même laisser au tableau les lettres affichées et exagérera la prononciation, en l’associant pourquoi pas aux gestes Borel Maisonny. L’important, c’est que, très vite et sans efforts démesurés, tous ses élèves y arrivent[6].

    Méthode

    - Pour cela, tous les jours, l’enseignant dictera aux élèves réunis autour du tableau les lettres apprises jusqu’alors puis des syllabes composées de ces lettres. Un élève pourra venir écrire ces lettres puis ces syllabes à l’aide de lettres minuscules scriptes magnétiques, ou à l’aide d’une craie.

    - Afin d’aider ceux qui ont encore du mal à entendre l’articulation consonne-voyelle, il peut envoyer deux élèves écrire la même syllabe, l’un plaçant la consonne alors que l’autre place la voyelle.

    - Cet exercice sera repris en individuel chacun à sa place, sur l’ardoise ou encore avec des étiquettes portant chacune une lettre (consonnes en noir, voyelles en rouge).

    - Chaque jour, un exercice d’écriture sur le cahier du jour et les exercices des pages de gauche du cahier d’exercices viendront renforcer ces compétences à écrire seul des syllabes.

    - Enfin, pour préparer la période suivante, toujours en collectif, au tableau et sur l’ardoise, l’enseignant dictera des mots[7], syllabe par syllabe. Il réutilisera le procédé qui consiste à charger plusieurs enfants (autant que de lettres dans le mot) de venir écrire ce mot, exagérera la prononciation de chaque lettre pour que chacun acquière, à son rythme, cette capacité d’épellation phonétique.

    - Toujours aucun apprentissage par cœur qui viendrait semer le trouble dans la construction du principe alphabétique en poussant l’enfant à ne pas lier son ouïe, sa vue, son sens kinesthésique avec sa capacité à comprendre ce qu’on lui demande de faire.

    - Les lettres muettes sont données par le maître qui explique, lorsque c’est possible, à quoi elles sont dues[8].

    Écrire et Lire au CP : apprendre l'orthographe

    2.
    Apprendre à écrire les mots simples
    Premiers réflexes grammaticaux
     

    Premier trimestre - livret 1 et cahier d’exercices de la page 12 à fin 

    Repères d’apprentissage :

    - Grâce au travail effectué depuis le début de l’année, les enfants ont déjà fait un énorme bond en avant. Ils savent désormais que les lettres qu’ils apprennent leur permettent d’écrire et lire des syllabes qui, associées ou pas, forment des mots qu’ils comprennent. Ils commencent même à saisir qu’ils peuvent aligner ces mots les uns derrière les autres pour traduire leur pensée en une phrase intelligible de tous ; mais ils n’ont pas encore réalisé qu’il manque à leur production tous les morphèmes grammaticaux et autres signes de ponctuation qui aideront bientôt grandement la compréhension des destinataires de leurs messages !

    - Ces mots qu’ils écrivent et réécrivent quotidiennement vont commencer à se fixer de manière durable et intelligente dans la plupart des mémoires. Pour certains cas très courants, l’apprentissage par cœur pourra être encouragé et les mots qui font partie de cette première liste pourront éventuellement être collectés sur un carnet.

    - Attention cependant à la signification de ces mots et à l’existence d’homophones grammaticaux. Un jeune enfant risque fort de déduire que si le maître lui dit d’apprendre que « dans » s’écrit d.a.n.s, il peut écrire qu’il a perdu une « dans » et que la petite souris la lui a prise !

    - Je préfère quant à moi l’oral et la répétition en classe qui demande in situ, liant à la fois son et sens, comment s’écrit « dans » lorsqu’on écrit « Le lion est dans son pré et le crocodile dans sa mare »…

    Méthode

    - Les exercices collectifs d’écriture de mots simples, ou dont les quelques difficultés (lettres muettes, doubles consonnes) sont signalées par le maître, continuent. Ce dernier commence à insister sur une mémorisation de ces difficultés : « Qui se souvient de la lettre muette qui se trouve à la fin de « chat » ? Qui peut nous l’expliquer ?... L’autre jour, nous avons lu « comme », il y avait une « blague » dans ce mot… Laquelle ? »

    - Ces exercices sont maintenant quotidiennement suivis sur l’ardoise, dans le cahier du jour et dans le cahier d’exercices par des dictées ou dictées muettes[9] de mots. Comme auparavant, le maître donne toutes les aides possibles pour que chaque élève arrive à cette écriture autonome basée sur l’utilisation intelligente du principe alphabétique.

    - Cet exercice n’est pas un exercice d’évaluation mais un exercice d’apprentissage. Son but est que tous réussissent. Il y arrive en aidant plus ceux qui sont en difficulté, à la fois en amont et pendant l’exercice[10] qui lui, autant que faire se peut, même si ce n’est pas à la mode, doit rester le même pour tous[11] afin de ne pas creuser les écarts.

    - Des exercices réguliers de copie de courtes phrases[12] suivis de leur illustration entraînent les élèves à toujours lier déchiffrage, écriture et compréhension. Le son aide au sens, le sens aide au son. Lors de ces exercices de copie, certains élèves, les plus visuels, commencent à repérer des régularités orthographiques et en font part à la classe, dès lors que l’habitude en est donnée par l’adulte.

    - Le livret de lecture et le cahier d’exercices proposent désormais très régulièrement une initiation à l’orthographe grammaticale et entraînent les élèves de manière très guidée à accorder l’article et le nom ou à conjuguer un verbe du premier groupe.

    - Suite à ces « leçons de grammaire », les dictées de phrases, très guidées[13], remplacent un jour sur deux la dictée de mots. La mémoire collective s’installe, les repères sont posés, bientôt, les élèves pourront passer à la phase individuelle.

    - Cette phase individuelle aura lieu d’abord au brouillon par la rédaction de courtes phrases descriptives en lien avec des illustrations proches de la méthode[14] ou en utilisant d’autres « matériaux[15] ».

    - Chaque phrase est corrigée par l’élève lui-même, guidé par le maître. Il est encouragé à n’utiliser que des mots qu’il sait écrire seul, à ponctuer correctement sa production[16] ainsi qu’à trouver et orthographier correctement les accords en genre et en nombre déjà connus. L’adulte propose toutefois une aide importante afin que l’enfant ne soit pas perdu dans un maquis de mots incompréhensibles parce que trop nombreux et trop difficiles[17].

    Écrire et Lire au CP : apprendre l'orthographe

    3.
    Mémoriser des mots très courants
    comportant une particularité orthographique
    Entraînement aux réflexes grammaticaux 

    Fin du premier trimestre à fin de l’année scolaire - livret 1, an/en, h muet, c/q/qu/k, et à la fin d’un mot et livret 2 de la page 2 à fin

    Repères d’apprentissage :

    - Les élèves savent transcrire les mots simples (mots « transparents ») et comment à les accorder entre eux. Cependant, pour le moment, ils n’ont pas encore été confrontés à la difficulté majeure de la langue française, l’existence de plusieurs graphèmes différents pour traduire en lettres le même phonème. Ils écrivent encore communément et en toute  innocence  un « coc », une « fasade », des « arico », etc. L’adulte explique et réexplique avec bienveillance, sachant que les capacités mnésiques des enfants sont énormément sollicitées et que la mise en place sera longue.

    - La fin de l’année scolaire va être consacrée dans un premier temps à l’acquisition de ces « graphies complexes », à la mémorisation de mots très courants les contenant et à la capacité à reconnaître visuellement quelques graphies rares sans toutefois exiger qu’elles soient toutes mémorisées suffisamment pour pouvoir être écrites sans modèle.

    - Nous sommes à l’époque de l’année où le terme « intelligence » prend toute sa dimension. Chaque enfant apprend à percevoir, discerner, comprendre, choisir et sélectionner la graphie qui convient en toute connaissance de cause. Maintenant, l’apprentissage par cœur de mots très courants va prendre tout son sens pour lui et palliera l’impossibilité dans laquelle il se trouve, par manque de culture et de recul, encore de choisir entre les graphies « en » ou « an », « c », « qu » ou « k », « o », « au » ou « eau », …

    - Parallèlement à ce travail d’enrichissement du répertoire lexical mental, un très gros travail grammatical continue à se poursuivre. En effet, c’est en exigeant une correction parfaite dès les premiers essais d’écriture autonome (dictées et rédactions de textes) que nos élèves partiront d’un bon pied et prendront au sérieux cet apprentissage.

    Méthode

    - Tout comme il n’hésite pas à couper la lecture d’un paragraphe pour proposer ou demander une explication portant sur le sens du texte[18], le maître se donne le droit d’interrompre cette lecture pour faire remarquer une particularité orthographique ou grammaticale. L’intelligence de la lecture et de l’écriture est en train de naître, il convient d’aider à sa mise au monde en la sollicitant constamment et en l’accompagnant au plus près.

    - Chaque nouvelle acquisition de graphie donne prétexte à remarques orthographiques portant sur la graphie elle-même mais aussi sur les bizarreries qui l’accompagnent parfois. On continue à chercher ensemble des mots de la même famille pour justifier une lettre muette, à répertorier ceux qui se ressemblent, à revoir constamment ce qui a déjà été vu et ne doit plus être oublié.

    - Quelques mots très courants peuvent être donnés à réviser à la maison ou à l’étude. On n’hésite pas à redonner plusieurs fois les mêmes mots afin que la mémorisation soit tellement assurée que l’enfant ne se souvienne plus qu’un jour, il ne connaissait pas cette orthographe.

    - Je préfère quant à moi donner deux ou trois mots chaque jour, en revenant à intervalles réguliers sur les mots les plus courants. Ces mots sont écrits directement sur le cahier de texte par l’élève et vérifiés individuellement par la maîtresse. Ils sont choisis en fonction des graphies déjà étudiées à ce jour en privilégiant la « graphie du jour » et la présence dans la dictée de la page de droite.

    - Mais d’autres collègues préfèrent donner chaque semaine une liste plus longue, copiée dans un cahier spécial. Cela fonctionne aussi. Attention cependant, si l’on utilise les dictées proposées dans le livret 2, que tous les mots difficiles en aient été vus en amont. Par ailleurs, veiller à ne pas donner de mots dont les graphies n’auraient pas été toutes étudiées ou expliquées[19].

    - Ces mots seront choisis par le maître en fonction des dictées proposées sur les pages de droite du livret 2. Ces dictées seront au préalable décortiquées en classe, collectivement, et le maître s’appliquera à toujours solliciter l’intelligence, donc la compréhension et la faculté de choix, avant d’imposer l’apprentissage par cœur « parce que c’est comme ça ».

    - Elles seront l’occasion de réviser, encore et toujours, les premières règles d’accords grammaticaux, chaque accord faisant l’objet d’une reformulation des règles avant et même pendant la dictée[20].

    - Les dictées quotidiennes seront donc alternativement des dictées de mots contenant la graphie en cours d’étude et des dictées de phrases concluant cette étude.

    - Une fois par semaine, elles seront remplacées par un exercice de rédaction, selon le principe développé ci-dessous.

    - On peut continuer à utiliser le matériel associé à la méthode Écrire et Lire au CP ou utiliser son propre matériel.

    - L’enfant écrit une phrase et une seule, il demande l’aide de l’adulte pour effectuer la correction, le maître souligne les erreurs, fait rappeler les règles d’accord, donne des pistes pour se corriger seul[21]… Il encourage l’élève en difficulté en ne l’envoyant corriger qu’une seule erreur à la fois pour ne pas le décourager, il félicite chaudement ses réussites même minimes.

    - Parallèlement à tout ce travail pendant les heures consacrées à l’étude du français écrit, un travail de rédaction collective[22] ou individuelle[23] peut être mené, si toutefois, malgré les réductions horaires, on en a le temps.

    - La rédaction collective donne l’occasion de réinvestir les apprentissages avec l’aide du maître qui aiguille les recherches pour l’orthographe lexicale, fait rappeler les règles acquises en grammaire, explique brièvement celles dont on a besoin mais qui n’ont pas encore été vues en classe[24].

    - La rédaction individuelle n’est jamais laissée brute. L’enfant est convié à corriger tout ce qu’il est en mesure de corriger seul, aidé à mettre en conformité ce qu’il ne peut pas orthographier seul et encouragé à effectuer ce travail dès son premier jet en faisait attention à respecter ce qu’il a déjà appris et à venir demander[25] ce qu’il ne sait pas encore.

    - Enfin, lors de la copie de phrases, l’élève est encouragé à copier mot à mot après avoir préalablement lu ce qu’il aura à écrire. Seuls les mots longs et compliqués seront copiés syllabe par syllabe. On explique aux élèves qu’une copie est une dictée qu’on se fait à soi-même après en avoir repéré toutes les difficultés.

    - Un entraînement particulier à cet exercice sera mené en classe ou en petit groupe de besoin si l’on remarque trop de défaillances dans ce domaine, d’autant que celles-ci sont souvent le fait de bons élèves, un peu trop sûrs d’eux qui rechignent à soutenir leur attention tout au long d’un exercice qui leur semble trop simple.

     Pour ceux qui ne connaissent pas Écrire et Lire au CP, vous pouvez voir la méthode ici :

    Premier livret, première partie

    Premier livret, deuxième partie

    Premier livret, troisième partie

    Deuxième livret, première partie

    Nota bene : J'ai toujours chez moi une dizaine d'exemplaires de la méthode. Me contacter si vous êtes intéressés (prix public : 6,50 € le livret, frais de port : 5,82 €, tarif lettre verte France métropolitaine).

    Notes :

    [1] Au sens étymologique du mot « intelligence » : (XIIe siècle) Emprunté au latin intelligentia, « faculté de percevoir, compréhension, intelligence », dérivé de intellĕgĕre (« discerner, saisir, comprendre »), composé du préfixe inter- (« entre ») et du verbe lĕgĕre (« cueillir, choisir, lire »). Étymologiquement, l’intelligence consiste à faire un choix, une sélection.

    [2] Un ami m’a soufflé le terme de « méthode chambres-à-part » qui leur va comme un gant : http://doublecasquette3.eklablog.com/ecole-mixte-couple-mixte-methode-mixte-a107034478

    [3] Une exception pourra être faite pour son prénom, souvent déjà appris « globalement » depuis la maternelle. Cependant, il conviendra de rendre cette écriture intelligente dès que les élèves auront acquis les correspondances entre phonies et graphies qui le composent. Ainsi, Lili et Ali sauront écrire intelligemment leurs prénoms dès la page 6 alors qu’Alexandre ou Hadrien devront théoriquement attendre le deuxième ou même le troisième trimestre et que certains de nos élèves aux prénoms d’origines lointaines quitteront le CP sans « comprendre » le pourquoi de cette orthographe… Je dis bien théoriquement car, la plupart du temps, ces élèves défavorisés par le choix de leurs parents ont très bien repéré bien avant la leçon du « ien », du « ex » ou la découverte de mots totalement opaques sans appel à l’étymologie tels « monsieur » ou « eut » que leur prénom « s’écrit comme ça parce que … ».

    [4] Ouïe, vue et toucher (dans le cadre de l’écriture cursive manuelle).

    [5] Sous peine de voir certains élèves trop jeunes pour cet effort de mémoire se mettre à tout mélanger et écrire « po » lorsqu’on leur dicte « lu » ou « ma » quand on leur dicte « si »…

    [6] Au besoin continuera-t-il à aider l’enfant en difficulté en lui proposant des « pense-bêtes » où sont associés Alphas, gestes Borel-Maisonny et lettres cursives et en se tenant près de lui pendant les moments de dictée.

    [7] Choisis parmi ceux donnés au déchiffrage sur les pages de gauche du livret 1. Ces mots ne doivent pas faire l’objet d’un affichage dans la classe afin de ne pas perturber la construction du principe alphabétique.

    [8] « Chat » prend un « t » car on dit « chatte, chaton… », « ville » prend deux L parce que c’est un mot qui vient du latin « villa » (en insistant sur la prononciation des deux L) qui s’écrivait déjà avec deux L…

    [9] L’élève regarde le dessin et doit, seul, trouver le mot qu’il doit écrire.

    [10] Fourniture de répertoires de graphies, associées à leur personnage Alpha et leur geste Borel Maisonny, gestuelle Borel Maisonny pendant qu’il dicte (attention, inverser les gestes pour que les élèves les voient de gauche à droite), segmentation en syllabes du mot dicté : « cheval… Écris ccccchhhhheeeee…. bien maintenant, accroché, écris vvvvvvvvaaaaaaallllll… Bien, tu vois che-val, voilà. Tu as bien écris cheval » et, surtout et plus que tout, encouragements et félicitations nombreux et convaincus !

    [11] Sauf en cas d’élève à profil particulier inclus dans la classe sans pouvoir en suivre le programme. Profiter alors de la présence de son AVS pour lui aménager un parcours personnel qui lui causera le moins de blessures d’orgueil possible…

    [12] Qui n’ont pas été déchiffrées à voix haute en collectif. Ce sont des « messages secrets » que chaque élève est désormais capable de lire réellement (son + sens) de manière autonome.

    [13] J’appelle cela des dictées « à la parlante » où l’enseignant pose à voix haute toutes les questions qui permettront de réaliser les accords, attend la réponse de l’un, demande à un deuxième de reformuler, à un troisième d’épeler, redemande au suivant s’il peut dire ce que chacun doit obligatoirement écrire sur son cahier et dit ensuite à chacun de vérifier qu’il a bien mis le S à « chats » parce qu’il y en a plusieurs et le ENT à « chassent » parce que ce sont plusieurs chats qui chassent, etc.

    [14] Écrire et Lire au CP : Cahier de rédaction

    [15] Dessins libres des enfants, dessins réalisés en fonction d’une demande du maître (projet collectif, compte-rendu de sortie, etc.), créations liées à un projet poétique, littéraire, documentaire…

    [16] Majuscule au début, point à la fin. D’où l’intérêt de ne demander qu’une seule phrase à la fois et ce jusqu’à la fin du CP au moins.

    [17] Cette aide peut aller jusqu’à « tout gommer » pour repartir sur des bases saines. Ce procédé doit alors être extrêmement bienveillant : l’adulte fait très gentiment comprendre à l’élève qu’il va l’aider à reformuler son discours de manière à ce qu’il soit intelligible de tous. Toute idée de sanction ou de punition doit être écartée et l’enfant doit se sentir en confiance près d’un adulte qui l’accompagne dans ses efforts et le protège contre un échec annoncé.

    [18] Encore un avatar de l’époque où la voie directe était la seule valable pour fabriquer des lecteurs, cette histoire de ne pas interrompre la lecture ! Bien sûr qu’il faut l’interrompre si l’on veut accueillir à notre table de lecteurs experts tous les petits élèves qu’on nous confie !

    Sinon comment feront-ils pour apprendre à lier son et sens, de manière tellement inextricable qu’ils ne s’en rendront même plus compte ? Comment feront-ils pour saisir l’intelligence d’un texte qui vole là-haut, tellement loin de leur quotidien de petit enfant qu’il leur paraît pour le moment inaccessible ?

    [19] Je pense à « monsieur » dont les élèves se régalent du moment où ils savent qu’il nous arrive tout droit des chevaliers des châteaux forts à l’époque où Monseigneur se disait Mon Sieur…

    [20] Dictée qui n’est toujours pas un exercice d’évaluation mais bel et bien un moment de l’apprentissage, plus simple pour l’enfant que la rédaction puisqu’il n’a à se préoccuper que de l’écriture.

    [21] Page du livre ou du carnet de mots où l’on peut trouver la graphie correcte, aide à la recherche d’une lettre muette et, éventuellement, lorsqu’on se trouve en face d’un mot comportant une bizarrerie (« doigt », « août », « sept », …, par exemple) écriture du mot au tableau ou sur le cahier de l’élève…

    [22] Résumé d’expériences ou d’apprentissages en Découverte du Monde, lettre collective aux familles ou à une classe correspondante, par exemple.

    [23] Rédaction de phrases réponses en Résolution de Problèmes, lettres individuelles, textes libres spontanés…

    [24] Personnellement, je n’hésite pas à mettre des mots sur les faits pour les rendre intelligibles. Dans ma classe, on parle communément de « pronom indéfini », de « conjonction de coordination », d’ « attribut du sujet » du moment où cela aide à distinguer « on » de « ont », « et » de « est », « mais » de « mes » et à accorder « bleues » avec « campanules »…

    [25] Souvent le bon élève de CP prend comme une injure le fait de ne pas arriver à tout écrire tout seul. Une des méthodes que j’applique dans ce cas-là est de lui mettre entre les mains pour qu’il en évalue le poids un très gros et très lourd dictionnaire « pour adultes ». Je le réconforte alors en le feuilletant devant lui et en lui expliquant que ce fort volume contient « tous les mots  qu’on doit savoir écrire » et qu’il est normal qu’il ne les connaisse pas encore tous.

     

     


    12 commentaires
  • Écrire et Lire au CP : Progression et programmation
    Merci à Xavier Laroche, l'illustrateur de Écrire et Lire au CP.

    Prise sur le fait de "conformité pédagogique"... Il était temps ! Pourvu que la retraite n'agisse quand même pas trop vite sur ma sénilité !

    Pensez un peu... Si je me mettais tout à coup à préparer des évaluations pour les petits bouts de trois ans, des progressions de pâte à modeler, de Lego et peut-être même de "lâcher de doudous[1]", des jeux de l'autobus ressassés ad nauseam[2], des mises en activité interminables qui n'amusent que les adultes, des projets mirifiques et surdimensionnés du style "un mois, un conte", "nettoyons la ville et convainquons les fumeurs de ne plus fumer et les buveurs de ne plus boire parce qu'ils jettent leurs mégots et leurs cannettes partout, partout, partout" et autres glugluteries du même genre programmées parce que, vous comprenez, maintenant on va enfin étudier pour de vrai la Littérature et l'Éducation Morale et Civique à  l’école[3], ce qui est tout nouveau, bien entendu... "Ne me faites pas rire, j'ai les lèvres gercées", dit une amie dans de telles circonstances.

    Mais revenons à nos moutonsss. Je viens de rédiger, pour la première fois de ma vie[4] une programmation des enseignements du français oral et écrit dans une classe utilisant Écrire et Lire au CP... 
    Je l'ai bien distinguée de la progression, déjà présente dans les deux livrets, sous le titre Table des Matières.
    En revanche, je me suis refusée à fixer des durées "légales" parce que, comme le disait Pauline Kergomard[5], une méthode doit toujours être « essentiellement naturelle, familière, toujours ouverte aux nouveaux progrès, toujours susceptible de se compléter et de se réformer. »

    Par ailleurs,  comme j'ai remarqué que souvent, si le fond n'est pas accompagné d'une jolie forme, ce qui est normal pour une École chargée de donner à voir à un public extérieur (parents, presse, équipe de circonscription, municipalités, ...) plus que pour réellement approfondir des méthodes fixées à l'avance par des Documents d'accompagnement, personne n'a envie de s'approprier le document. C'est "vieillot", "ringard", "triste", "pas sexy"...

    Alors, j'ai essayé de faire "joli et ludique"... Vous me direz si ça vous plaît et si l'inconvénient de dépenser de l'encre en plus du papier pour imprimer un truc qui, je persiste, ne sert strictement à rien pédagogiquement parlant est compensé par la beauté plastique de l'ouvrage !

    Allez, je ne vous fais pas languir plus longtemps... Aperçu :

    Écrire et Lire au CP : Progression et programmation

    Pour télécharger la bête en pdf :

    Et en .doc :

    Télécharger « Écrire et Lire au CP.Progressions, programmation.doc »

     Bon CP à toutes et à tous et n'oubliez pas : "On ne voit bien qu'avec le cœur. L'essentiel est invisible pour les yeux[6]" !

    Pour consulter la méthode :

     Écrire et Lire au CP, 1er Livret, 1re Partie

    Écrire et Lire au CP, 1er Livret, 2e Partie

    Livret 1, 3e partie

    Livret 2, 1re partie

    Vous pouvez aussi me la commander, via l'onglet Contact. Je me ferai un plaisir de vous l'envoyer moyennant 6,50 € pour chacun des deux livrets, auxquels il vous faudra ajouter 5,28 € de frais de timbres au tarif « lettre verte ».

    Notes :

    [1] Parce que maintenant, en très haut lieu, on planifie même une technique hors-sol pour séparer rationnellement les tout jeunes élèves de leurs objets transitionnels de référence individuelle…
    Je préfère quant à moi la consigne simple et claire de Pauline Kergomard, dans la partie « Méthode » des programmes pour l’école maternelle de 1882 : « Ces principes posés, quelle est la méthode qu’il conviendra d’appliquer aux écoles maternelles ? - C’est évidemment celle qui s’inspire du nom même de l’établissement, c’est-à-dire qui consiste à imiter le plus possible les procédés d’éducation d’une mère intelligente et dévouée, méthode essentiellement naturelle, familière, toujours ouverte aux nouveaux progrès, toujours susceptible de se compléter et de se réformer. »

    Je vous raconterai.

    [2] Et encore un autre article à prévoir ! Eh bien, dites donc, ils ont bien fait de me rayer des cadres…

    [3] Si, si, ils l’ont dit hier à la télé, parce que c’était la rentrée des classes… Grâce à notre Ministre, nous allons enfin étudier l’Éducation Morale et Civique à l’école. Mon compagnon, du haut de ses 70 ans, était mort de rire, lui qui a vécu la grande époque de la Morale et de l’Éducation Civique pendant toute sa scolarité primaire. Quant à la Littérature, ça doit bien faire vingt ans qu’on tourne en rond autour du pot qu’on a jeté sans oser y remettre enfin la cuillère !

    [4] Comme quoi, ça ne sert absolument pas à enseigner ces trucs-là. Juste à fliquer les enseignants et à leur faire perdre un temps précieux qui serait bien mieux employé à lire de la bonne littérature, pédagogique ou pas, se promener et observer, visiter des sites, des musées, des expositions, jouer avec leurs enfants et en déduire la bonne méthode pour les sevrer peu à peu de leurs doudous sans les traumatiser…

    [5] Ceux qui ont lu Pour une Maternelle du XXIe siècle savent que je milite pour un rattachement du CP à l’école maternelle que les enfants ne quitteraient alors que lorsqu’ils seraient lecteurs et scripteurs.

    [6] A. de Saint-Exupéry, Le Petit Prince

     

     

     

     

     


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