Bonjour Catherine,

Je suis enseignante en PS et je découvre aujourd'hui votre site. Bravo pour tout votre travail et merci pour toutes les pistes de réflexion que vous nous proposez.J'ai cependant une interrogation concernant l'emploi du temps proposé pour les PS. Même si c'est un article de 2015, personnellement, cet emploi du temps me conviendrait parfaitement : respectueux des ryhtmes de l'enfant, favorisant les apprentissages et l'autonomie, etc. Je suis particulièrement convaincue de la nécessité des ateliers ouverts, mais je me pose la question suivante : comment et à quel moment dans ce cas aborder les apprentissages mathématiques (acquérir les 1ers outils mathématiques) et plus particulièrement la numération ? En ce début d'année, je travaille comme nombre de mes collègues de PS sur les notions de encore/plus du tout et un peu/beaucoup. Ce temps d'atelier me mobilise à 100%. Je n'arrive pas à trouver une solution satisfaisante qui permettrait les 4 ateliers ouverts et les mathématiques. À moins qu'il y ait quelque chose qui m'échappe dans l'emploi du temps que vous proposez ?

Merci beaucoup et bon week-end :)

Béatrice

• • Doublecasquette

    Mardi 5 Octobre 2021 à 10:58
    

    Bonjour Béatrice,

    Les premiers outils mathématiques, et particulièrement la "numération", ou plutôt le comptage et le calcul, sont présents à tous les instants de la journée, soit de manière consciente et organisée, soit de manière implicite dans l'activité.

    Dans tous les moments d'accueil et d'habillage, on aura tous les comptages de l'adulte pour voir si tout le monde est là, pour remarquer le nombre de vêtements tombés du porte-manteau, le nombre de doigts bien placés dans le gant, le nombre d'enfants déjà prêts, le nombre de bonnets ou de sacs oubliés au porte-manteau, etc.

    Même chose lorsqu'on passe aux toilettes, qu'on distribue du matériel ou un goûter, qu'on pointe dans l'ordre les étapes d'un exercice ou le nombre d'objets qui ont "disparu" lors du rangement d'une activité (l'adulte tend le pouce et le montre avec l'index de l'autre main en disant "En premier, nous devrons ...", puis il tend l'index et le montre avec l'index de l'autre main en disant "Et après, en deuxième, ...", etc.).

    On retrouvera ce dénombrement, et même ce calcul toute l'année, dans les moments de regroupement, dans le rangement des ateliers, dans la participation aux ateliers et dans le déroulement des jeux libres des enfants au sein de chacun d'entre eux . Un exemple parmi mille : 1 ou 2 pinceaux par pot de peinture, rien que ça, c'est déjà du comptage et du calcul (vous en avez mis 1, combien il en manque ? Combien Mathis doit-il en ajouter ? J'avais dit 2 pinceaux dans le pot et j'en vois 3. C'est trop. Combien devons-nous en enlever ? Est-ce qu'il faut 2 enfants pour enlever 1 seul pinceau ? Etc.)

    Les notions de encore, plus du tout, un peu ou beaucoup font partie de celles les plus faciles à travailler en action plutôt qu'en décroché. C'est à vous d'avoir cette idée présente à l'esprit pendant tous les moments de la vie de la classe et d'employer ce vocabulaire le plus souvent possible. C'est à vous aussi d'avoir une oreille constamment en alerte pour entendre ce que disent les enfants pendant les périodes d'ateliers libres, comme pendant les regroupements, les déplacements, les activités physiques ou, très important, les récréations.

    Si vous pensez à dire à des enfants qu'il y a déjà beaucoup de monde à la dînette et qu'ils ne peuvent pas y aller mais qu'il y en a vraiment peu aux barres Montessori, et que là, 1 ou 2 d'entre eux peuvent aller compléter le groupe, vous aurez fait beaucoup plus pour leur permettre de nommer des notions qu'ils possèdent intuitivement depuis quasiment leur naissance (voir les travaux de S. Dehaenne sur le concept de nombre chez le nourrisson).

    Et si, à l'atelier perles, vous entendez Louis dire à Mia, qui exécute l'ordre facilement (ou résiste stoïquement en cachant quelques perles sous ses mains" : "Donne un peu à moi", vous comprendrez tout aussi bien que si vous les aviez pris à part, abandonnant les 25 autres, que cette notion de "un peu" est acquise par ces deux enfants.

    Les ateliers construits par la maîtresse, surtout lorsqu'ils sont aussi précis dans leurs objectifs, sont de toute façon des pis-allers. La preuve en est dans simple fait qu'ils nécessitent un tel déploiement de forces et une telle débauche de matériel ultra-spécialisé !

    Même le théorème de Pythagore ou l'étude de l'accord des participes passés ne monopoliseront pas à ce point élèves et enseignants, lorsque l'époque de leur apprentissage sera venue. Alors, une bonne fois pour toute, décontractons-nous et faisons confiance au temps, aux enfants et à leur envie de croissance et de progrès et nous récolterons très vite des fruits venus naturellement et de ce fait bien plus juteux et parfumés que ces fruits de serre ayant poussé en hydroponie sous lumière artificielle !

    Bien cordialement,

    Catherine