• CP : Écrire sa propre méthode de lecture (1)

    CP : Écrire sa propre méthode de lecture

    Certains collègues se trouvent actuellement confrontés à un choix cornélien. Grâce aux méthodes de découverte des lettres et du principe alphabétique employées par certain.e.s collègues de maternelle, elles et ils auront à la rentrée deux CP au lieu d'un !

    En effet, certains élèves – parfois jusqu'à la moitié de l'effectif – ont acquis au moins les rudiments du principe alphabétique et savent lire suffisamment bien pour qu'une page classique des syllabaires actuels ne puisse en rien les intéresser. Toutefois, ces élèves ne sont pas assez avancés pour pouvoir aller suivre au moins les séances de lecture avec leurs camarades de CE1.

    Comme ils ont à peu près le niveau qu'aura le reste de l'effectif de la classe vers la mi-décembre, ils vont donc être obligés de cohabiter avec des enfants auxquels il arrive qu'on propose pendant parfois plusieurs semaines des pages passionnantes à base de

    CP : Écrire sa propre méthode de lecture
    Extrait de la méthode Agir pour l'école, qui fut un temps présentée
    par le Ministère comme une excellente méthode de lecture.

    ce qui ne sera déjà pas bien passionnant pour des élèves non lecteurs mais sera une vraie torture pour des élèves déjà capables de déchiffrer de petits textes !

    Pour que tous ces élèves y trouvent leur compte, il y a la solution de la méthode « à tiroirs »...

    La méthode « à tiroirs » :

    Dans le tiroir du haut, on trouve une petite phrase, composée de mots courts, aux graphies simples, et transparents ou presque. Elle peut être lue par des élèves déjà déchiffreurs qui corrigeront d'eux-mêmes une lettre muette s'il y en a une.

    Il s'avère que cette méthode existe. On peut la feuilleter sur ce blog puisque c'est une méthode que j'ai écrite pour mes élèves qui, régulièrement, arrivaient de leur GS avec, pour certains, un niveau CP-mi-décembre, pour d'autres, un niveau CP-début-octobre et, pour d'autres, un niveau fin de GS. Dans ma classe, elle fonctionnait très bien, amenant 100 % de mes élèves à un niveau début de CE1, et ce généralement avant la fin de l'année scolaire, et ce, sans ennui et dégoût, même pour les élèves les plus avancés à la rentrée.

    Elle est très peu connue car mal commercialisée mais on peut m'écrire grâce à l'onglet Contact et je l'envoie à des conditions un peu moins onéreuses que celles pratiquées par l'éditeur.

    Seulement, voilà, elle plaît ou elle ne plaît pas ! C'est à ceux qui ne la trouvent pas attrayante que je propose d'écrire eux-mêmes leur propre méthode qui sera adaptée aux différences de niveaux de leurs élèves.

    Préparer son travail à l'avance :

    Il y aura très peu de travail à préparer à l'avance. Il consistera à :

    ⇒ Apprendre par cœur les gestes Borel Maisonny

    ⇒ Acheter une boîte de 60 Alphas (ou les imprimer en couleur en grand format, les cartonner et les plastifier)

    ⇒ Se renseigner sur le niveau en écriture cursive des enfants qu'on accueillera et, en fonction de ce niveau, se préparer à :

    ♠ leur apprendre à écrire de A à Z, en commençant par la tenue du crayon, la mobilité des doigts et le positionnement du cahier dans le prolongement de l'avant-bras

    ♣ reprendre rapidement ces éléments et commencer à travailler les gestes d'écriture dans l'ordre proposé par Laurence Pierson dans son cahier CP - Apprentissage

    ♥ partir en sachant pouvoir compter sur ces bases et suivre la progression des graphies étudiées en lecture pour le travail d'écriture (ou se baser sur la progression de Laurence Pierson dans son cahier CP CE1 - Perfectionnement pour travailler la lecture)

    ⇒ Préparer la liste des graphèmes à étudier au cours de l'année en se basant sur le sommaire de n'importe quel spécimen de méthode de lecture de CP ou sur celle du livret orange édité par le MEN. On pourra, en cours d'année, cocher les graphies étudiées et jauger du temps qu'il nous reste pour automatiser la reconnaissance visuelle et l'écriture de celles qui n'ont pas encore été présentées.

    ⇒ Préparer pour les premières semaines (4 ou 5 maximum) un répertoire alphabétique sur lequel on consignera semaine après semaine les mots déchiffrés par les plus à l'aise mais que le reste de la classe ne peut que reconnaître par habitude de fréquentation. Cette liste pourra être jetée ou rangée après la durée d'utilisation prescrite.

    Ces deux listes seront aussi très importante pour savoir si :

    ⇒ nous pouvons inclure tel ou tel mot dans notre texte de lecture

    ⇒ nous réactivons bien la reconnaissance visuelle de toutes les graphies déjà étudiées dans les semaines et les mois suivants leur présentation

    ⇒ nous réactivons aussi la reconnaissance visuelle de ces quelques mots qui nous serviront à faire repérer les graphies et leur correspondance phonémique

    Le début de l'année

    ♠ Partir d'un album ?

    Je vous déconseille de partir pour le moment d'un album précis, ce qui n'empêche pas, bien au contraire, de leur en lire un, ou plusieurs !

    En effet, en lecture, ce dont le groupe fort a besoin, c'est de continuer à décoder-encoder des mots simples, qui seront souvent réemployés, pour que la fluence progresse, pendant que le groupe lambda doit, jour après jour, apprendre ou réviser les graphies les plus courantes afin d'automatiser leur reconnaissance suffisamment rapidement pour être capable de les combiner deux par deux ( « Je reconnais Llll, je reconnais eeee, je sais enchaîner llllleeee »).

    On ne trouvera cela que dans des albums scolaires écrits pour accompagner l'apprentissage de la lecture. Les albums de littérature de jeunesse, même ceux conçus pour des tout-petits, apportent trop de graphies complexes, et ne travaillent pas assez dans le sens de l'automatisation de la reconnaissance de telle ou telle graphie. Ce qui est normal puisqu'ils ne sont pas faits pour ça.

    Par ailleurs, ils risquent de ne pas attirer dans leur sillage les enfants que le milieu familial n'a pas suffisamment confrontés au monde des livres. Ce qui est dommage puisque, par un autre biais, nous pouvons les y attirer. Ce biais, c'est le vécu concret.

    ♥ Partir d'un vécu concret ?

    Nous allons commencer par satisfaire tout le monde en bavardant tous ensemble autour de :

    ♥ la classe ou l'école et ses « habitants »

    ♥ la classe ou l'école et son aménagement

    ♥ une ou plusieurs mascottes

    ♥ une illustration (qui pourra être tirée d'un album comme dans l'exemple proposé ci-dessous mais sans intention de coller à l'histoire que l'album raconte)

    Selon le sujet choisi, nous orientons le bavardage des enfants dans le sens qui va nous permettre d'obtenir notre première page de lecture :

    « Qui êtes-vous ? Quel est votre prénom ? Qui suis-je ? Pourquoi sommes-nous là, tous ensemble ? »

    ⇒ « Qui peut décrire cette classe / cette école ? Comment la trouvez-vous ? À quoi servent ces objets ? »

    ⇒ « Qui peut décrire cette (ou ces) mascotte(s) ? Qu'en pensez-vous ? Quel nom pourrions-nous lui ou leur donner ? »

    ⇒ « Que voyez-vous sur l'image ? Que fait (font) le(s) personnage(s) ? »

    Dans les quatre cas, nous finissons par la même dernière question : « Je vais écrire quelque chose que nous avons dit au cours de notre conversation. Regardez bien. Je suis sûre qu'il y a parmi vous des enfants qui pourront vous le lire. »

    ♥ Il y a des amis à l'école.

    ♥ Une jolie école !

    ♥ Nos amis : Lulu, Lili

    ♥ Tu as vu le chat ? Il chasse. (An non, zut, c'est vrai, cet article est pour les gens qui "n'aiment pas"...). Alors : La pipe de papa fume... (Ah non, zut, apologie du tabac, stéréotype de genre) ; ben, euh : le cartable de P'tit Loup (Et allez hop ! Emballez, c'est pesé)

    Les enfants du groupe des forts lisent, mot à mot, leurs camarades écoutent puis essaient de se rappeler à leur tour en suivant les mots du doigt. Ce n'est pas de la lecture, je sais, mais cela les aide à comprendre ce qu'ils sauront faire bientôt.

    La première séance de la journée est finie.

    Il y en aura trois autres, d'une quinzaine de minutes chacune, visant à ce que :

    ⇒ les enfants progressent dans le geste d'écriture

    ⇒ les enfants repèrent les différents mots et en extraient une ou deux graphies ou syllabes simples :

    ♥ ami → a - mi

    ♥ école → é - co - le

    ♥  Lulu → lu ; Lili → li

    ♥ le → l e

    ⇒ les enfants lisent la première page de leur livre de lecture en construction,

    elle comporte : une illustration - le texte déchiffré par le groupe des forts ce matin, le (ou les) mot(s)  vedette(s) et les acquis qu'il(s) permet(tent).

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    ♥ Stabiliser et exploiter ces acquis

    ◊ Le lendemain, lors de la première séance

    Les enfants retrouvent la première phrase dont les mots ont été reproduits sur des étiquettes et disposés en nuage au tableau.

    Le moment d'expression libre permet de dégager les conclusions suivantes :

    ⇒ ce sont les mots que nous avons lus hier

    ⇒ celui-ci, c'est pour dire : « ... » ; celui-là : « ... » ; etc.

    ⇒ pour reconstituer la phrase, il faut les ranger dans l'ordre, de gauche à droite

    ⇒ nous pouvons nous aider du modèle de notre livre de lecture pour procéder à cette reconstitution

    Une fois ce rangement fait, l'enseignant.e peut proposer un autre travail : « Qui saurait lire ceci, tout.e seul.e ou en s'aidant du modèle ? » Et il écrit successivement au tableau :

    ♥ Il y a des amis. - Il y a l'école. - À l'école, il y a des amis. - l'école - des amis - Il y a des (icône d'enfants, voitures, fourmis, ... → voir modèle ci-dessous)

    ♥ Une jolie école ! - Une école ! - Joli ! - Une jolie (icône de balle, pomme, gare, ... → voir modèle ci-dessous)

    ♥ Nos amis : Lulu, Lili - Lulu - Lili - Nos amis - Lulu, Lili, nos amis - Nos amis : (deux prénoms d'enfants de la classe)

    ♥  le cartable de P'tit Loup - le cartable - P'tit Loup - le (icône de ballon, croissant, cahier, ...) de P'tit Loup - le cartable de (icône de maîtresse, prénoms d'enfants de la classe qui ne commencent pas par une voyelle)

    Les enfants lisent, tous ensemble ou chacun son tour, une des propositions écrites. On peut prévoir une seconde partie où ce sont eux qui rangent les étiquettes sous la dictée, soit au tableau, soit chacun à sa place.

    ◊ Les autres séances de la journée

    Elles sont consacrées comme la veille :

    ⇒ geste d'écriture

    ⇒ les enfants retrouvent les mots-vedettes et les graphies ou syllabes simples qu'ils ont découvertes (ou révisées pour le groupe fort) la veille  Ces graphies ou syllabes sont revues, dans l'ordre, dans le désordre, lues l'une après l'autre ou présentées sur demande grâce au procédé La Martinière

    ♥ ami - a - mi - mi - a - ami - a - a - mi - mi - ami

    ♥ école - é - co - le - le - co - é - école - é - le - co

    ♥  Lulu - lu - Lili - li -  li - lu - lu - Lulu - li - Lili - li

    ♥ le - l - e - e - l - l - e - le - e - l - le

    ⇒ les enfants lisent la deuxième page de leur livre de lecture en construction

    CP : Écrire sa propre méthode de lecture (1)

    Les tiroirs suivants :

    ♥ Avancer et réinvestir

    Ce qu'il y a de pratique, au CP, c'est que programmer des périodes de révisions est inutile puisque chaque jour est une révision des acquis des jours précédents. Nos élèves qui ont découverts qui les graphies l et e, qui a et mi, ou é, co et le, ou encore li et lu vont avoir au cours de l'année des milliers d'occasions de réinvestir ces acquis en écrivant ou lisant. D'où l'intérêt de ne pas présenter le chry de chrysanthème ou le ouil de fenouil, comme ça, maintenant, en tout début d'année, même si le thème retenu est Fleurs et légumes du jardin.

    Dans les tiroirs suivants, il suffira de consulter ses listes pour que les enfants lambda retrouvent les graphies et syllabes déjà découvertes et que le groupe des forts assure la lecture rapide des mots déjà utilisés tout en faisant tous de nouvelles découvertes.

    On aura, par exemple, deux pages où :

    ♥ Des amis arrivent à l'école.

    ♥ Je regarde ma jolie école !

    ♥ Nos amis, Lulu et Lili arrivent.

    ♥ P'tit Loup lave le cartable.

    et où on combinera les anciens acquis graphémiques avec les nouveaux.

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    Et ainsi de suite... Jusqu'à ce qu'un jour, très vite...

    ♥ L'écart commence à se combler...

    Mais ça, c'est une autre histoire que nous verrons, si vous le voulez bien, dans un autre article que je rédigerai, en temps utile, si la demande m'en est faite ci-dessous, en commentaire.


  • Commentaires

    1
    Julie
    Samedi 1er Juin à 11:46

    Bonjour,

    Article très intéressant.

    Pour la rentrée prochaine, je me lance dans votre méthode, la lecture du guide pédagogique m'a beaucoup plu !

     

     

    2
    Dimanche 2 Juin à 10:01

    Merci Julie. Laquelle des deux ?

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