• Maths CE2 : Pourquoi du hors programme ?

    Maths CE2 : Pourquoi du hors programme ?

    Laurence m'a écrit ici : CE2 : Fichier de Mathématiques (5) et je ne sais pas pourquoi, la réponse que je lui ai donnée est non seulement incomplète mais en plus je n'arrive ni à la compléter ni à rajouter une nouvelle réponse pour écrire la suite.

    Je l'écris donc ici où, j'espère, elle la trouvera.

    Question de Laurence :

    Tout d'abord un énorme merci pour toutes ces ressources fantastiques que vous partagez si généreusement.

    A la rentrée, je change d'école, de pédagogie et de niveau. Je regarde avec envie vos méthode pour le CE1-CE2 qui me séduisent beaucoup.

    Je suis en train de feuilleter les fichiers de maths ce2 et je trouve que vous allez loin en grandeurs et mesures notamment. J'ai peur que les élèves soient un peu perdus avec les m3 ou encore les divisions à deux chiffres. Bref, j'ai besoin d'être rassurée. Si vous avez le temps de partager votre retour avec les CE en maths, je vous en serais reconnaissante.

    Ma réponse, complète cette fois-ci, j'espère :

    Oui, en effet, je vais plus loin que ce qu'on nous demande en grandeurs et mesures. C'est pour simplifier en rendant "systématique" ce qui, lorsque le tableau est incomplet, reste un peu aléatoire. En effet, si l'on apprend toutes les unités de mesures, on peut faire le rapprochement avec ce que l'on a appris en numération. Et les deux sous-domaines en profitent ! Plus besoin de tableau de conversion puisqu'on a la numération décimale qui en tient lieu. On sait que kilo, c'est mille fois l'unité, hecto, c'est cent fois, déca, c'est dix fois. On prépare même les nombres décimaux en sachant que déci, c'est un dixième d'unité, centi, un centième et milli, un millième. Après, ce n'est plus qu'un jeu de calcul tout simple à base de changements de colonnes matérialisés par des zéros en plus ou en moins à la droite du nombre.  Et comme tout cela a la chance d'être concret, manipulable, visible, cela rend par le même coup visible, concrète, manipulable, l'abstraction que constitue le système de numération de position.

    Pour la division à deux chiffres, c'est un peu différent. Dans la méthode des petits pas, celle que j'affectionne, on avance le long d'un chemin, ou l'on sème des petites graines, en n'attendant pas que cela nous mène très vite quelque part ou produise immédiatement de nouvelles plantes. C'est pourquoi les évaluations sont toujours plus ou moins conçues plus comme des moments de révision où l'enfant lui-même fait le bilan de ce qu'il peut faire seul, de ce qu'il ne sait faire que si un adulte l'aide à s'orienter et de ce qu'il a encore vraiment de la peine à appréhender, que comme des moments où l'on statue sur un niveau formalisé comme "acquis", "en cours d'acquisition" ou "non acquis".
    C'est pourquoi, dès le CP, la division est "en cours d'acquisition" et qu'elle le restera jusqu'à la fin du CM2... Et c'est pourquoi, dans le cadre de cette avancée pas à pas, au CE2, on commence à semer les graines, ou explorer le petit sentier, de la division à deux chiffres, tout en sachant pertinemment que ces graines ne germeront pas forcément tout de suite, et que certains élèves jetteront juste un coup d'œil sur le sentier. Cela ne fait rien, même les moins à l'aise de ces derniers auront dans l'idée que non seulement, on peut diviser en moins de 10 parts égales des objets en les distribuant un à un et que ce partage peut se faire grâce au calcul sans avoir un seul de ces objets sous la main, mais en plus que ce partage est possible aussi, par le calcul, en bien plus de 10 parts égales !

    Et ce sera autant de gagner pour l’année suivante, quand le temps sera venu de généraliser cette technique à tous les élèves et que, du fin fond de leur mémoire, certains se rappelleront les découvertes de leur année de CE2 quand ils commençaient juste à entrevoir une nouvelle possibilité, un nouveau « super pouvoir » sur les nombres ! La machine est lancée, et c’est cela l’essentiel.

    Quant à l'introduction des mesures de volume, c'est un peu un mélange de tout ce que nous venons de dire ci-dessus. En grandeur et mesures, depuis la TPS ou la PS, nous éduquons les sens de nos élèves. Nous les aidons à se forger une connaissance sensible de la longueur, de l'épaisseur, du volume des objets qu'ils manipulent. Et nous leur donnons les matériaux pour qu'ils s'exercent et qu'ils fortifient ces connaissance. Ils ont joué à placer des solides dans des trous, on rangé des cubes de même dimension dans des boîtes parallélépipédiques, ils ont ordonné des barres ou des cubes en ordre décroissant pour former des escaliers et des tours. Peu à peu, ils ont appris à distinguer ces solides les uns des autres, à en observer les faces, à prendre des mesures grâce à des unités du système métrique qu'ils maîtrisent désormais à peu près.

    Il est temps désormais d’aller un petit peu plus loin, toujours pour semer des graines et pour ouvrir des pistes pour l’année prochaine ! Un nouveau « super pouvoir », à 9 ans, cela ne se refuse pas... Alors, puisqu’on sait qu’on mesure les longueurs en mètres, qu’on vient de voir qu’avec des carrés d’un mètre sur un mètre, on pouvait paver des surfaces, comme fait le carreleur dans une pièce ou le tout petit enfant avec des pièces de puzzle, il est logique qu’il existe aussi une mesure pour « tous les trucs qui ressemblent à des boîtes ». Et cette mesure, elle a forcément un rapport avec le mètre, et avec le carré d’un mètre sur un mètre... Et... la graine commence à germer chez tout le monde ! Parce que tout le monde prend son temps et que personne n’imagine une seule seconde que la semaine prochaine, ou à la fin du mois, on exigera que tous sachent calculer le volume d’une piscine ou d’une méga-bassine. La seule chose qui nous ferait plaisir, c’est que la très grande majorité sache qu’il existe des unités de mesure cubiques grâce auxquelles on peut connaître la contenance d’un objet creux.

    Dans mes classes de CE, à partir du moment où j’ai commencé à utiliser ces méthodes, j’ai constaté la même chose qu’avant, mais à un autre degré. Certes, je n’avais pas vaincu la courbe de Gauss, hélas. J’avais toujours dans mes classes, une petite minorité qui caracolait en tête et faisait son miel de tout ce que nous travaillions ensemble. Ceux-là ouvraient toutes les portes latérales, tentaient de semer toutes les graines qu’ils trouvaient en chemin. Parmi les autres, une grande majorité suivait, tranquillement... Quand je leur signalais un chemin par ci, une graine par là, ils venaient avec moi gaillardement, prodiguaient à la graine tous les soins requis, et finissaient par intégrer ce nouvel élément à leur trousse à outils. Et puis, hélas, comme toujours, quelques-uns peinaient à progresser sur le chemin sans buter sur les cailloux, être obligés de s’arrêter souvent ou même de rebrousser chemin pour aller rechercher ce qu’ils avaient oublié. Ils n’arrivaient pas toujours à prodiguer aux graines que nous découvrions ensemble tous les soins nécessaires à l’épanouissement de plantes solides.

    Mais alors pourquoi, me direz-vous... Pourquoi ? Parce que, lorsque ces élèves arrivaient chez mes collègues de CM, ceux-ci étaient étonnés par l’étendue de leurs connaissances, leur appétit de savoir, leur envie de chercher et de réfléchir. Tous. Même les petits escargots qui butaient sur la moindre brindille en travers du chemin, même les petits jardiniers qui arrivaient le lundi matin avec des plantes flétries, faute d’avoir supporté ces longs week-ends où le sable dans lequel elles étaient plantées se desséchait immanquablement. Et cela portait ses fruits jusqu’au collège où nos élèves, même les plus faibles, étaient tellement à l’aise que leurs parents s’inquiétaient en début d’année : allaient-ils apprendre le goût de l’effort puisqu’ils réussissaient si facilement à faire leurs premiers devoirs de mathématiques ?


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