• La méthode et les procédés

    La méthode et les procédés
    Quelques exemples de procédés éducatifs actuellement utilisés dans les écoles sous le nom de « méthodes »

    Pas de commentaires pour ce premier texte de la rubrique. Je me suis contentée de mettre en gras les éléments du texte qui me semblent important et de scinder quelquefois les paragraphes pour rendre l'ensemble plus aéré et aider à la lecture sur écran. 

    La méthode et les procédés

    Il faut distinguer la méthode et les procédés.

    ♦ La méthode est la marche que suit l’esprit pour découvrir (méthode de recherche) ou pour exposer (méthode d’enseignement) la vérité.

    ♦ Les procédés sont les moyens pratiques qu’emploie la méthode pour atteindre son but.

    → Débuter en grammaire par donner une règle, l’expliquer et la confirmer par des applications, c’est suivre une méthode.

    → Faire d’abord écrire plusieurs phrases, y remarquer certaines choses qui leur sont communes et formuler une règle, c’est une autre méthode.

    Mais, dans un cas comme dans l’autre, c’est agir méthodiquement.

    → Se servir, pour l’emploi de ces méthodes, de la leçon qui vient d’être lue dans un livre, ou instituer des exercices que les élèves devront faire par écrit, c’est un procédé.

    → Lire une phrase et faire écrire sur l’ardoise les mots sur lesquels porte la règle qu’on veut faire appliquer et retenir, puis faire retourner les ardoises et constater qu’on a bien ou mal écrit, c’est un autre procédé.

    → Se servir d’un composteur pour enseigner à lire, de bûchettes pour enseigner à compter, ce sont encore des procédés.

    Il ne faut pas attacher trop d’importance aux procédés ; ils ne valent que par l’intelligence avec laquelle on les applique.

    S’ils consistent dans une imitation toute mécanique de ce qu’on a vu faire, ils sont peu efficaces.

    ♦ Pour qu’ils agissent sur l’enfant, il faut que celui qui les emploie en comprenne la raison

    ♦ il faut aussi qu’il y croie et qu’il les pratique avec entrain 

    Autrement les élèves répètent automatiquement, passivement pour ainsi dire ; la leçon reste froide et n’intéresse pas.

    → C’est ce qui explique qu’un procédé qui produit des merveilles, manié par un maître qui sait s’en servir, échoue entre les mains d’un autre qui n’en connaît et n’en applique que les formes extérieures, pour ainsi dire.

    → C’est ce qui explique encore pourquoi les inventeurs attachent tant de prix aux moyens qu’ils ont imaginés. Ils obtiennent des résultats qu’ils attribuent uniquement à leurs procédés, tandis que la vraie cause du progrès de leurs élèves est dans l’intelligence et le zèle avec lesquels ils donnent leur enseignement.

    ♦ Ainsi en est-il de la plupart des procédés, décorés à tort du nom de méthodes, imaginés pour apprendre la lecture, l’écriture et le dessin, des appareils inventés pour apprendre à compter et à mesurer, des cadres ou des formules dont on se sert pour faire retenir l’histoire ou la géographie.

    Mais, s’il ne faut pas s’exagérer l’importance des procédés, il ne faut pas non plus en faire fi.

    ♦ En vain aurait-on longuement réfléchi sur la nature de l’enfant, sur le développement progressif de ses facultés, sur les motifs de ces actions, etc. ;

    ♦ en vain même aurait-on le zèle, l’amour de ses fonctions et la passion d’y réussir,

    → on pourrait très bien échouer dans la tenue et la direction d’une école, si l’on ignorait les procédés qu’emploient les hommes du métier.

    ♦ Établir l’ordre dans une classe et y faire régner la discipline, trouver le moyen d’occuper d’une manière continue et utile un grand nombre d’enfants de tout âge et de toutes forces, d’obtenir en lecture, en écriture, en calcul, des résultats prompts, qui encouragent l’élève et assurent au maître la sympathie comme le concours des parents, sont choses dont ceux-là ignorent la difficulté s’ils n’ont jamais eu à en poursuivre la réalisation.

    → Sans doute, c’est le petit côté de la pédagogie, mais c’en est le côté pratique et tout d’abord efficace.

    ♦ Il ne faut pas une bien grande intelligence ni des connaissances bien étendues, pour arriver à comprendre et à pratiquer ces procédés, qui constituent ce qu’on pourrait appeler la « mécanique » de la classe ;

    → encore faut-il que les maîtres de nos écoles se les soient rendus familiers.

    « Cultivez d’abord l’intelligence, dit-on quelquefois, et le reste viendra par surcroît ; la moindre application suffira à un esprit qui a de la portée et de la force pour imaginer ces moyens et les mettre en pratique. » ― Non ; la chose n’est pas si facile.

    ♦ Et la preuve, c’est que ce ne sont pas toujours les maîtres les plus instruits qui obtiennent les meilleurs résultats.

    ♦ Et puis, pourquoi vouloir découvrir à nouveau ce que d’autres ont découvert avant nous ?

    → Un maître qui veut réussir doit donc s’enquérir des procédés qui ont été employés avec le plus de succès par ceux qui l’ont précédé dans la carrière, et profiter de l’expérience de ses devanciers ;

    → il doit connaître tous ces procédés, les avoir comparés et choisir ceux qui lui semblent les plus rationnels, les plus pratiques, les plus accommodés à ses goûts et à ses propres aptitudes.

    → Qu’il se les approprie d’abord et les fasse siens, qu’il y ajoute ensuite ce que la pratique du métier lui suggérera à la longue, et il deviendra un bon maître : celui qui, avec le moins d’efforts, obtient pourtant le plus de résultats.

    Au lieu de descendre de la théorie à la pratique, il fera bien de se façonner d’abord à la pratique,

    ... sauf à rechercher, tout en allant, les raisons de ce qu’il applique, à féconder par la théorie ce que l’art tout seul aurait d’insuffisant.

    C’est toujours la vieille opposition de la théorie et de la pratique, de la science et de l’art.

    ♦ Sans doute c’est aux découvertes de la science que les arts doivent leurs progrès ; mais les sciences, pour qui veut vivre de la vie réelle, ne valent que par les arts qui les appliquent.

    ♦ L’industriel est bien inférieur sans doute au savant qui arrache à la nature ses secrets ; mais il lui faut pourtant des aptitudes particulières, et c’est lui qui donne toute la valeur efficace aux découvertes du savant.

    La pédagogie, elle aussi, a ses théoriciens et ses praticiens

    L’idéal serait que l’instituteur fût à la fois l’un et l’autre mais, dans nos écoles primaires et pour le modeste objet qu’on s’y propose,

    la théorie sans la pratique ne produit rien,

    tandis que la pratique, aidée d’un peu de théorie, suffit souvent à donner des résultats très satisfaisants.

    E. CARRÉ, Inspecteur général honoraire

    (Revue pédagogique, 1892, tome II, p. 156).


  • Commentaires

    1
    Jeudi 28 Mars 2019 à 12:31

    Très très intéressant!
    Et dire que la formation initiale se borne à donner la théorie, la pratique étant considérée comme méprisable. 

      • Jeudi 28 Mars 2019 à 14:09

        Et quelle théorie ! Toujours seule, unique et incontournable, jamais présentée à égalité avec d'autres, tout aussi valables et vérifiables qu'elle.

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