• Assis, debout...
    Enfant en train de se bousiller la moitié de la santé...
    puisqu'il n'est assis que sur une fesse. 

    Cet après-midi, je regardais mes élèves vaquer à leurs occupations favorites et, si j'avais eu mon appareil photo sous la main, j'aurais fait quelques photos pour notre amie non-fumeuse adepte de la position debout...
    Hélas, je ne l'avais pas sous la main et, comme de plus j'étais sollicitée de temps en temps par ceux que je tiens assis de force et que j'oblige à apprendre à lire, à écrire et à compter à un âge trop tendre, je ne suis pas allée le chercher. Il va donc falloir que je vous raconte...

    C'était après l'anglais avec ma collègue (encore une tortionnaire qui les fait chanter, réciter, colorier, dessiner, dialoguer, jouer à Jaques-a-dit en anglais, tout ça assis sur leur postérieur). Je venais de finir mon intervention en sciences chez les grands du cycle trois (ils ont patouillé, debout, dans les muscles d'une cuisse de lapin, c'était grandiose - je crois que j'ai provoqué au moins une vocation de boucher, peut-être même deux). Comme les enfants étaient un peu fatigués et que la récréation était assez proche, je n'ai pas mis en route d'activité, préférant laisser du temps à tous...

    Grand-Lolo, CE1, continuait de colorier ses œuvres tracées au compas. De temps en temps, nous échangions quelques mots. Il trouvait que le compas donnait de bien plus jolis dessins que lorsqu'on travaillait à main levée. Je lui ai répondu que Léonard de Vinci ne semblait pas avoir utilisé de compas pour peindre la Joconde mais que je trouvais qu'il s'en était drôlement bien tiré quand même.
    Il a éclaté de rire et nous avons conclu tous deux que le compas permettait de tracer de bien plus jolis cercles, ce qui n'était déjà pas si mal.
    Il était assis, à la place qui lui est attribuée, et semblait ne pas trop souffrir d'insuffisance respiratoire, d'emphysème et de déchaussement des dents...

    Plus-Vite-Que-Son-Ombre et Grand-Champion-Discret, CE1, pâte-à-modelait de concert. Plus-Vite-Que-Son-Ombre a réussi un talkie-walkie tellement génial qu'il a tenu à venir me le présenter avant d'aller le poser sur le rebord de mur consacré à l'exposition des œuvres en pâte à modeler tellement géniales qu'il serait dommage, alors qu'elles sont à peine finies, de les écraser pour les ranger dans la boîte...
    Grand-Champion-Discret avait réussi une sphère sans doute pas loin de la perfection mais il ne me l'a pas présentée. Je l'ai juste vue lorsqu'elle a roulé par terre jusqu'à mes pieds et qu'il est venu la récupérer. Grand-Champion-Discret est discret, d'où son surnom.
    Plus-Vite-Que-Son-Ombre était, à son habitude, à la fois assis, debout, à genoux, accroupi, sautillant sur place et brassant beaucoup d'air, pas loin du bureau où était assis Grand-Champion-Discret qui, lui, modelait en murmurant à voix douce, sans doute assis un pied sous ses fesses, comme souvent.

    P'tit-Lolo, CE1, travaillait avec Loulou, CE1 aussi, qui avait pris un peu de retard en mathématiques et finissait ses exercices (reproduction de figures sur quadrillage). Ils étaient très affairés tous deux et pour être à l'aise, ils s'étaient installés à la grande table des GS. Loulou, qui est un garçon très calme, était paisiblement assis et manipulait lentement sa règle et son crayon pendant que P'tit-Lolo papillonnait autour de lui, debout, souvent accoudé à la table, le menton dans sa main, en lui prodiguant moult conseils.

    Justinien, CP, a d'abord fouiné, debout, dans la caisse à outils pour me trouver un tournevis avec lequel j'ai resserré la vis du compas qu'il avait trouvé. Puis, après avoir rangé la caisse (et un peu galéré avec le couvercle), il est passé à la station debout-accoudé pour tracer encore des cercles, plein de cercles, de toutes tailles (celle-là, lorsqu'elle sera finie, je vous la photographierai parce que c'est du grand art) ! Justinien adore travailler debout-accoudé... et comme il ne dérange personne, je ne vois pas pourquoi je le lui interdirais...

    Lambinette et Yasameen, CP, finissaient elles aussi leur travail de mathématiques du jour (des opérations). Elles alternaient la position assise, la marche - à un train de sénateur pour Lambinette - et la position debout-accoudé à mon bureau lorsque nous travaillions ensemble.
    Je remarque en passant que l'enfant de six à huit ans a beaucoup de peine à rester debout sans appui et que lorsqu'il ne dispose pas d'une chaise sur laquelle se percher (fesse - si possible une seule - mais aussi une jambe repliée ou carrément à genoux), il s'accoude à une table ou s'appuie contre un mur... Et s'il n'a que la station debout comme alternative, il gigote, passe d'un pied sur l'autre, sautille, virevolte, agite les bras... Un peu comme un fumeur qui n'aurait plus de cigarettes et attendrait l'ouverture du bureau de tabac, voyez-vous...

    Lounia et Kass'Andrah, CP, dessinaient, assises, à leurs places, en papotant à mi-voix, comme d'hab'. Elles étaient allées récupérer tout leur petit matériel sans me demander l'autorisation parce que, contrairement à ce que croient les sots, la discipline librement consentie est de loin la meilleure manière d'avoir une classe qui tourne et où tous les enfants se sentent respectés...

    Mathieu-le-Matheux, Jeune-Sage-Tranquille et P'tit-Génie, CP, compulsaient leur livre favori : 

    Assis, debout...

    P'tit-Génie, qui est vraiment très petit, était assis à un bureau de GS (si, si, j'assois aussi les GS quand ils viennent dans ma classe, ils hurlent, se lamentent, gémissent, se désolent mais ça ne fait rien, je les assois)... Les deux autres l'encadraient, debout, les coudes appuyés sur la table, le menton dans leurs mains... Ils bavardaient tranquillement et P'tit-Génie, qui était le seul à avoir les mains libres tournait les pages.

    Parce qu'il y a ça aussi... Lorsque l'être humain s'est mis debout, il a vu qu'il pouvait mieux voir venir le danger et y échapper, c'est sûr. C'est même grâce à cette position debout que nous sommes ce que nous sommes.
    Mais... quand il a découvert l'outil... il s'est bien rendu compte que, debout, ce n'était pas toujours facile de façonner un tranchant délicat, de coudre ensemble deux peaux de bêtes, de touiller une mixture dans une calebasse glougloutant près du foyer, d'aiguiser une pointe de flèche ou de compter des moutons qui rentrent ou sortent de leur enclos. C'est peut-être même pour ça qu'il s'est rembourré le postérieur d'une paire de fesses rebondies... Allez savoir !

    Je regrette vraiment de n'avoir pas fait de photos. J'essaierai de compléter ce reportage sur le vif de quelques illustrations propres à faire réfléchir ceux qui n'ont qu'une idée et la chevauchent... debout sur leurs étriers, bien sûr !

    Nota Bene : Si vous ne comprenez pas quelle mouche me pique, allez donc lire les commentaires de Preuve par neuf.

    Assis, debout...
    Ouf ! Il y en a trois de sauvés ! Mais qu'attend ma collègue pour faire lever les deux autres !
    Ils colleront des trucs et des machins quand ils sauront les coller en position debout...


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