L'École Primaire comme je voulais la raconter
Aujourd'hui, j'ai eu l'IEN au téléphone. Il voulait savoir comment faire pour régler le problème des nouveaux rythmes dans mon école. Il faut dire que, pour l'instant, le Conseil Municipal attend. Il prendra éventuellement une décision en mai, si l'abrogation du décret n'a toujours pas été votée.
Le problème, selon mon chef, c'est que, s'il ne le fait pas vers le mois de mars, il se peut que ce soit le DSDEN qui la prenne.
J'ai réexpliqué toute l'histoire. Pour le moment, nous n'avons même pas de Centre de Loisirs Périscolaire. C'est une simple garderie qui s'apparente plutôt à la surveillance d'un troupeau de moutons, à l'effectif variable, avec un seul berger, l'ATSEM, pour, pourquoi pas, les soixante et un élèves de l'école si toutefois les parents se donnent le mot et y laissent tous leurs enfants en même temps.
Comme elle est gratuite et qu'on peut y déposer et récupérer son caddie enfant quand on veut, elle est très fréquentée et, pour certains, dès que ça ouvre et jusqu'à ce que ça ferme...
Dans ces conditions, il n'est pas judicieux de rajouter trois heures (ou quatre, puisque, le mercredi, il y aurait aussi garderie, au moins le matin dès 7 h 45) de vie en collectivité à des enfants qui y sont déjà 10 heures par jour, quatre jours par semaine, et ce quelles que soient les activités proposées.
Pour ces activités, comment résoudre le problème de l'écart d'âge ? Les plus vieux ont 11 ans et vont entrer en 6e, les plus jeunes ont 2 ans et entament leur première année de scolarisation.
Nous avons déjà eu deux fois des interventions : hip hop, pour les 4 à 14 ans, et hand ball, pour les 5 à 11 ans. Dans le premier groupe, les moins de 7 ans faisaient tapisserie assis sur les bancs pendant que les grands du collège prenaient tout l'espace dans un boucan digne d'une fête foraine. Et dans le deuxième, ce sont les grands, moins nombreux que les petits, qui ont abandonné, déçus de ne pas pouvoir jouer au hand "pour de vrai"...
Par ailleurs, n'ayant pas de gymnase, ni même de stade, le hand s'arrêtait du 1er novembre au 1er mars. En mars, les gamins ne revenaient pas quand ce n'était pas l'animateur qui avait changé de planning et ne pouvait plus venir.
Et le hip hop ayant lieu dans la salle de motricité de l'école, l'hiver, c'étaient les enfants de la garderie qui n'avaient plus de lieu de vie pour jouer en attendant que leurs parents les récupèrent. Ils se retrouvaient à une quinzaine parfois, dans le petit dortoir, sans tables, ni bancs, avec juste quelques legos que l'ATSEM avait récupérés dans la grande salle...
La seule solution envisageable que je vois, Monsieur l'Inspecteur, à défaut de rendre à mes élèves les 27 heures de classe, samedi matin compris, c'est une semaine de 4 jours, avec petites vacances raccourcies.
La semaine de 27 heures, avec le samedi, nous permettrait de revoir enfin les parents qui ont la garde un week-end sur deux et que nous ne connaissons même plus depuis qu'on nous a supprimé le samedi matin. Elle donnerait aux moins favorisés de nos élèves un temps supplémentaire pour être accompagnés par une personne qui les connaît et peut les raccrocher scolairement grâce à toutes ces activités que nous pouvions faire quand nous avions du temps pour cela (et une formation généraliste qui allait avec). Elle permettrait aussi de responsabiliser les quelques familles qui couchent exprès leurs enfants "super tard le vendredi soir pour pouvoir faire la grasse mat' sans qu'ils viennent [les] faire ch.. dès sept heures du mat'..." et d'obtenir ainsi que leurs enfants gardent un rythme cohérent.
À défaut, les petites vacances raccourcies éviteraient à la presque totalité de nos élèves de passer deux semaines de Toussaint, d'Hiver et de Printemps coincés entre leur télé et leur Wii. Chez nous, personne ou presque ne part en vacances, surtout en automne et en hiver. Et ceux qui partent ne partent jamais quinze jours pleins. Et puis, vous savez, quand ils prennent quatre jours pour emmener leurs petits à Eurodisney, ils préfèrent le faire en période scolaire parce que les tarifs du train et de l'entrée sont bien moins dispendieux, alors...
Cette dernière tirade m'a permis d'entendre de la bouche même de mon supérieur hiérarchique que le raccourcissement des vacances d'été de deux semaines est d'ores et déjà programmé.
Là-dessus, il m'a laissée à mes péquélets qui étaient tous là, bien tranquilles, à siestouner en attendant que la maîtresse ait enfin fini de parler ! Heureusement qu'on était lundi et qu'en début d'après-midi, une petite sieste au calme, ce n'était pas désagréable... Il n'y a que Tom-Tom-le-tombeur-de-ces-dames qui s'est fait remarquer, et encore, à peine !
Après, nous sommes allés planter nos bulbes dans nos jardinières parce que nous, nous n'avons pas besoin de papys bénévoles pour faire du jardinage à l'école...
Et la prochaine fois qu'il m'appelle, je lui dis que parents, mairies et au moins directrice ne sont dupes ni les uns ni les autres et que tous savent que c'est afin de territorialiser l'École Primaire que ces mesures ont été prises sans aucun égard pour l'Enfance.