L'École Primaire comme je voulais la raconter
Après quelques jours de silence, recommençons à faire parler M. Canac ! Nous l'avions laissé après l'étude des nombres de la deuxième dizaine, et leurs nombreuses irrégularités de langage.
Nous voici maintenant embarqués sur une mer plus étale, sans risques ni écueils. Nos élèves ont bien intégré le principe des unités de deuxième ordre et savent composer et décomposer les nombres avec talent. Apprendre les mots vingt, trente, quarante, cinquante et soixante ne va leur occasionner aucune difficulté majeure. Tout est affaire de vocabulaire et d'habitude. Le jeu du furet, par deux, par trois, en augmentant ou en diminuant, en partant de 0 ou de 1, va fixer ces mots nouveaux qui, une fois sorti du mot vingt, s'associent facilement euphoniquement avec le nom du nombre de leurs dizaines. Cela devrait donc être simple pour des élèves qui commencent par ailleurs à savoir bien lire.
Nous remarquerons dans ce paragraphe, très court, qu'Henri Canac profite de cette époque où peu de sollicitations intellectuelles nouvelles perturbent les élèves pour installer les techniques opératoires : addition sans puis avec retenues, soustractions sans retenue. En effet pourquoi différer plus longtemps ce que l'enfant fait déjà depuis un moment avec ses bûchettes.
N'oublions pas qu'il a appris à additionner et soustraire les unités de deuxième ordre avant même d'aborder les nombres de la deuxième dizaine. Qu'avant cela, il avait étudié le nombre dix jusqu'à n'avoir plus besoin de matériel pour en réciter les diverses décompositions additives. Enfin, lors de l'étude des nombres de la deuxième dizaine, il avait appris à franchir la dizaine. Il est donc fin prêt à aborder les techniques opératoires.
Remarquons qu'Henri Canac préfère assurer les apprentissages pas à pas et qu'il conseille de procéder d'abord à des additions sans retenue avant d'aborder le cas où l'enfant doit matérialiser le fait qu'il a franchi une dizaine.
Je me permets d'ajouter parce que cela n'est pas rappelé que, lors de l'étude des nombres de 1 à 5, Canac conseillait d'ajouter aux petites opérations abstraites sur les [5 premiers] nombres (additions et soustractions) des problèmes oraux où réapparaissent, avec les lapins, carottes et sucres d'orge, la vie et la variété, mais un moment où la notion des nombres étudiés, indissolublement liée avec des schémas géométriques simples, ne peut plus être obscurcie dans la pensée de l'enfant par la profusion du concret .
Il me semble que ceci est forcément toujours valable et qu'aux exercices abstraits sur l'addition et la soustraction (puisque Canac n'introduit la multiplication et la division que dans le paragraphe suivant), il convient de continuer ces problèmes oraux et peut-être même de profiter des capacités de lecteurs des élèves de CP en cours de deuxième trimestre de l'année scolaire pour les proposer sous une forme écrite.
Le texte est court, le voici :
Lorsque les 20 premiers nombres sont bien connus et les tables d'addition assimilées le moment vient d'aller décidément de l'avant. La formation des nombres de 20 à 29 est des plus simples, la seule irrégularité (vingt et un) est de l'ordre du langage usuel et n'est pas même sentie par les enfants. Les nombres des 4 dizaines suivantes peuvent de même être acquis au pas de charge puisqu'il ne reste qu'à faire apprendre les noms des dizaines (trente, quarante ...).
On peut donc très rapidement se donner du champ jusqu'à 69, ce qui ne peut qu'agréer aux enfants, récompensés par ce progrès rapide de la patiente étude des 20 premiers nombres. Sur ce vaste parcours, on peut alors multiplier les exercices : additions et soustractions orales (compter de 2 en 2, de 3 en 3... en partant de 0, en partant de 1 ; mêmes opérations conduites à rebours) ; additions écrites, sans retenue, puis avec retenue ; soustractions sans retenue...
Pour lire le reste de l'article :
1. Après l'écriture, les nombres !
6. De 11 à 19, les irrégularités de langage
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