L'École Primaire comme je voulais la raconter
Merci à Crapaud-Chameau pour cette illustration.
Désormais, normalement, si le rituel a bien été suivi jour après jour, l'immense majorité des élèves cherche à déchiffrer, avec plus ou moins de bonheur, tout ce qui passe sous leurs yeux.
Les plus perspicaces d'entre eux en ont déduit la plupart des combinaisons graphémiques composées de deux lettres (ou, an, en, on, oi, in). Ce sont les fameux élèves dont parlent les familles avec des sanglots d'espoir dans la voix : ceux qui, au bon vieux temps, savaient lire à Noël...
Rassurez-les, ces élèves existent toujours et ils seront d'autant plus nombreux qu'on ne fera pas de l'école un lieu « pour faire plaisir aux adultes[1] » et des séances d'imprégnation graphémique un pensum dépourvu de sens[2] pendant lequel on psalmodie, sous la surveillance zélée d'un chronomètre, des pages de lettres, de syllabes, de logatomes ou de mots « résistants »...
Pour aider les autres à parvenir au même point, mais aussi pour aider les premiers à renforcer leurs compétences sans s'ennuyer, voici la troisième partie de notre Rituel d'imprégnation graphémique. Elle sera renforcée bientôt par une partie « Écriture graphémique » pour ceux qui souhaitent faire de leur classe « un lieu pour faire plaisir aux enfants » et ont plus ou moins abandonné ces manuels d'acculturation littéraire à la mode des grands.
Les compétences ayant évolué, il est normal que la forme en ait elle aussi évolué... à petits pas.
Pour que les élèves plus lents aient le temps de se focaliser sur une relation graphème/phonème et une seule. Sans pièges. Sans exceptions. Le CP est l'âge des certitudes.
Pendant ces deux jours, cette relation sera « à très haute dose » et très clairement signalée.
Souvent, les élèves habitués à décoder les lettres deux par deux, consonne en premier, voyelle en second, (les fameuses syllabes, fausse-piste bien connue dans laquelle s'enferrent les enfants les plus fragiles et pourtant hélas privilégiée actuellement) se retrouvent déroutés quand apparaissent les premiers graphèmes composés de deux lettres (ou plus, mais là n'est pas encore la question).
Pour leur simplifier la vie et pour habituer leur œil à « regarder plus loin », dans cette série de 6 semaines de Rituel d'imprégnation graphémique, nous avons clairement balisé le repérage grâce à deux ou trois procédés successifs :
À vous de voir si vous reproduirez ce marquage au tableau lorsque vous recopierez les rituels. Tout dépend du niveau de votre classe. Sachez que, encore mieux que l'affichage qui oblige à tourner la tête pour retrouver ce qu'on a un peu oublié, ce marquage en couleur aide l'élève à se focaliser sur la difficulté et donc à consolider son apprentissage.
En revanche, je ne conseille pas, sauf cas très particulier, de multiplier les couleurs comme le font certaines méthodes. Pour 98 % des élèves, c'est choisir un marteau pilon pour enfoncer une aiguille dans du beurre.
Pour aider à la mémorisation, je ne saurais trop vous conseiller d'appuyer fortement l'aide visuelle fournie par la couleur par l'aide auditive et gestuelle qu'apportent les formules rituelles suivantes (à adapter selon le graphème étudié) :
Au risque de me répéter, nous ne sommes pas dans l'évaluation sommative mais dans l'apprentissage.
Notre aide est toujours la bienvenue et la répétition qui consiste à remobiliser l'une des trois voies d'entrée (vue - ouïe - geste) sert la consolidation et l'automatisation. Nous devons en user et en abuser tout au long des 5 à 10 minutes bi-quotidiennes que dure le Rituel d'imprégnation graphémique.
Vous verrez que, semaine après semaine, nous nous appesantissons toujours aussi peu sur ces syllabes qu'il faudrait paraît-il, selon la doxa actuelle, automatiser antérieurement à la lecture signifiante pour accéder à la lecture fluide.
En effet, le Rituel d'imprégnation graphémique cherche à ne pas laisser s'enliser les élèves fragiles dans ce décodage laborieux d'éléments non-signifiants, tout comme il cherche à ne pas ennuyer plus que de raison ceux qui ont déjà « craqué le code », comme on dit dans les romans d'espionnage. Nous privilégions donc une autre voie.
Histoire de varier un peu, il y en a même deux (trois si vous suivez aussi Écriture graphémique) :
C'est à partir de mots directement signifiants pour la plupart des enfants que nous assoirons leur automatisation des graphèmes.
Ces mots pourront être projetés à partir du pdf proposé ou écrits, avec les couleurs indiquées, sous les yeux des enfants (ce qui leur permet de commencer à décoder pendant l'écriture du mot).
Chacun de ces mots sera décodé une fois, puis expliqué, par un enfant différent à chaque mot. Lorsque toute la liste aura été lue, s'il reste du temps, on la fera relire par une autre succession d'enfants, sans réexplication, sauf si un mot rare avait posé problème en première lecture.
Les enfants revoient ainsi chaque jour (ou presque, car il n'y a parfois pas de listes de mots) non seulement la graphie du jour mais aussi toutes celles qu'ils ont vues récemment.
Ils ancrent cette automatisation du décodage grâce au sens qu'ils mettent dans l'acte de lire. Ils automatisent ainsi non seulement la capacité à ânonner de syllabes qu'ils reconnaissent au premier coup d'œil mais aussi la capacité à s'appuyer sur la logique, le raisonnement, la compréhension.
Ils prennent aussi l'habitude d'avoir un retour d'information immédiat (ce que je crois avoir lu existe-t-il ? Si oui, je ne me suis pas trompé, si non, c'est que j'ai dû faire une erreur), rendant ainsi l'erreur positive et source d'apprentissage.
Les élèves qui ont droit au rituel d'Écriture graphémique auront aussi de nombreuses occasions d'encoder ces mots, par épellation phonétique et non par apprentissage par cœur de mots pris comme des images.
Très souvent, ces mots sont insérés dans des phrases formant un texte. Là, nous sommes en plein cœur de l'apprentissage de la lecture car tout y est :
Les textes proposés pourront comme les mots être projetés à partir du pdf proposé ou écrits, phrase après phrase, avec les couleurs suggérées.
1. On pourra, dans un premier temps faire lire à voix haute à chaque enfant à la suite un mot de la première phrase puis la faire relire intégralement par l'enfant suivant. Mais, dès que les capacités de décodage et d'attention s'accentueront, il vaudra mieux que chaque élève lise une phrase entière, à voix haute.
2. Dès que la première phrase sera lue, elle sera immédiatement reformulée, par un autre enfant.
3. On fera alors lire première et deuxième phrase à un troisième enfant et la deuxième phrase sera reformulée par un quatrième.
4. Le cinquième enfant relira la deuxième phrase et décodera la troisième et ainsi de suite.
5. Quand le texte aura été lu et compris phrase à phrase, on pourra s'il reste du temps (rappelez-vous, c'est 10 minutes, pas plus !) le faire relire intégralement sans le couper d'explications par autant d'élèves que ce qu'il contient de phrases.
Ainsi, pour un texte de 13 phrases, comme le premier de la Période 3 - Semaine 3, on aura pu faire décoder en première lecture 13 enfants et en seconde puis troisième lecture 26 enfants. Le tout en 10 minutes...
Télécharger « Période 3 - Semaine 1.pdf »
Télécharger « Période 3 - Semaine 2.pdf »
Télécharger « Période 3 - Semaine 3.pdf »
Télécharger « Période 3 - Semaine 4.pdf »
Télécharger « Période 3 - Semaine 5.pdf »
Télécharger « Période 3 - Semaine 6.pdf »
CP : Rituel d'imprégnation graphémique (1) ; CP : Rituel d'imprégnation graphémique (2) ; ... ; CP : Rituel d'imprégnation graphémique (4) ; CP : Rituel d'imprégnation graphémique (5)
CP : Écriture graphémique (1) ; CP : Écriture graphémique (2) ; CP : Écriture graphémique (3) ; CP : Écriture graphémique (4) ; CP : Écriture graphémique (5)
CP : Méthode de lecture "Nino et Ana" ; CP : Méthode Nino et Ana : cahier 2 ; CP : Méthode Nino et Ana : cahier 3 ; CP : "Nino et Ana", production d'écrits ;
[1] Vous savez, ces classes où l’adulte lit, pendant 6 à 7 semaines, à une classe vite découragée, une histoire qui lui plaît parce qu’elle délivre un message qu’il trouve amusant, édifiant, interpellant ou je ne sais quoi...
[2] Voir cet exemple parmi d’autres : OURA-LEC/CP Enseignants