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Le petit livre rouge (5)
Enfant élu des Dieux ayant reçu la version papier du petit livre rouge, CE1...Parce que vous, chers collègues, vous n'avez qu'à vous connecter sur le site pour le lire en ligne, ce petit livre rouge, CE1... qui est censé vous former à la deuxième phase de l'apprentissage de la lecture et de l'écriture de notre belle langue et des trésors littéraires qu'elle recèle.
La semaine dernière, j'ai bien conscience que j'avais fait trop long, beaucoup trop long. Donc, cette semaine, j'ai élagué, d'autant qu'il n'y a rien de bien nouveau.
Tellement élagué que je n'ai pas mis de « séances en direct » avec des enfants réels, dans une vraie classe autour d'un vrai texte. Si vous en voulez une, vous n'aurez qu'à la demander.
En attendant, pour les pressés, voilà la suite du chapitre III que nous terminerons vraisemblablement le week-end prochain avec (encore) tout un tas de conseils, les uns judicieux et les autres plus ou moins hallucinants.
III. Quels supports et quelles méthodes pour comprendre les textes ?
(suite)B) Comprendre les textes : des principes clés pour la pratique de classe
1) La diversité des textes lus
→ Là où on nous explique que pour savoir lire, il faut lire... de tout. Et tout d’abord leur dada :
► TEXTES POUR CONSOLIDER LES CORRESPONDANCES GRAPHÈMES-PHONÈMES COMPLEXES
→ Pour moi, la poésie, celle des vrais poètes, dans ce cas-là, c’est l’idéal. Plus l'orthographe lexicale et même, de temps en temps, la grammaire et la conjugaison...
► TEXTES COURTS POUR GUIDER LA COMPRÉHENSION
► TEXTES LONGS LUS PAR L’ÉLÈVE
► ŒUVRES LITTÉRAIRES LUES PAR LE PROFESSEUR
► LECTURES PERSONNELLES
► TEXTES LUS DANS LES AUTRES DOMAINES D’ENSEIGNEMENT
→ Et tout ça en 24 heures chrono, sans négliger pour autant l’étude de la langue, la production d’écrits, les mathématiques, la découverte de l’espace, du temps, de la matière et du vivant, l’éducation artistique, l’éducation physique et sportive, l’anglais, l’éducation morale et civique, les récréations et les temps incompressibles ! Bonjour le challenge !
→ Une seule solution : jumeler :
♥ Les correspondances graphèmes phonèmes complexes, c’est souvent une affaire d’orthographe lexicale : J’apprends à écrire et je révise la lecture des graphèmes « tion », « ail ou aille », « oy », etc., lorsque, en vocabulaire, j’étudie la dérivation des verbes en noms (recréer, récréation ; agiter, agitation ; etc.), qu’en orthographe grammaticale, j’étudie le genre des noms (le travail, le bétail, le portail mais la médaille, la bataille, la paille) ou qu’en conjugaison, je m’étonne devant les verbes en « ayer ; oyer ; uyer » qui s’écrivent « oie, aies, uie, aient » avec « je, tu il, elles » mais « oyons, ayez » avec « nous, vous ».
♥ Les textes courts qui guident la compréhension, il y en a des dizaines par jour : les consignes des exercices de mathématiques et d’étude de la langue, les textes de sciences, histoire et géographie du domaine au nom débile (Questionner le Monde) ; on les inclura donc dans la partie « TEXTES LUS DANS LES AUTRES DOMAINES D’ENSEIGNEMENT »
♥ Les « TEXTES LONGS LUS PAR L’ÉLÈVE » et les « ŒUVRES LITTÉRAIRES LUES PAR LE PROFESSEUR » peuvent être assez rapidement les mêmes, la lecture se faisant alors « à deux voix », certains extraits par les élèves alors que d’autres le seront par le professeur.
♥ Même chose pour les « LECTURES PERSONNELLES » qui pourront un jour, lorsque tout le monde lira et qu’on aura du temps pour cela (c’est-à-dire, peut-être, quand on nous aura débarrassés des 108 h pour rendre leurs 26 h de classe aux enfants) remplacer les « ŒUVRES LITTÉRAIRES LUES PAR LE PROFESSEUR » dans un temps dédié de l’emploi du temps.
2) Le temps consacré à la lecture
Pour mémoire, 10 heures hebdomadaires de français sont inscrites dans la grille horaire de cycle 2. Aux activités de lecture, il faut ajouter la grammaire (45 minutes), les dictées (1 heure), l’écriture et la copie (1 heure), la rédaction (30 minutes) et le vocabulaire (1 heure).
→ Où sont-ils allés piocher ces horaires à la noix ? Ils sont malades ou quoi ? Faire 45 minutes de grammaire par semaine ? Et ils comptent qu’ils apprennent quoi dans un temps aussi bref ? C’est 45 minutes par jour, les kikis, pas une seconde de moins. Ceci dit, vous y rajoutez votre heure (hebdomadaire) d’écriture et copie, ça fait 15 minutes par jour pour l’exercice à réaliser sur le cahier, parce que sinon, 15 minutes, c’est le temps que met un élève moyen de CE1 pour ouvrir le cahier, sortir le crayon, copier la date et le titre, sortir la règle, souligner, ranger la règle et le crayon, fermer le cahier et le donner à l’élève de service qui relève les cahiers.
→ Bon, pas la peine d’en rajouter, cet horaire, hebdomadaire, c’est DU GRAND N’IMPORTE QUOI tout juste valable pour des élèves de CP et encore !!!
→ D’autant qu’au CE1, on n’a pas besoin de travailler la lecture sur 5 h 45 par semaine, sauf si, bien sûr, le CP a été fait dans de telles conditions qu’aucun élève ne sait lire. Auquel cas, c’est un horaire envisageable pendant les 10 premières semaines de l’année scolaire, avec un manuel de CP, pour apprendre à lire aux élèves et (enfin) démarrer sur des bases saines.
→ Suit un tableau, débile, sur l’utilisation de ces 5 h 45. S’il vous intéresse, il est à la page 42 du Guide rouge. Il est tellement idiot que je ne le reproduirai pas.
3) La progression
L’enseignement explicite de la compréhension est conduit dès le début de l’année, tout d’abord à partir de phrases simples, très courtes, que les élèves peuvent lire seuls, puis plus longues et complexes, puis de petits textes.
→ Les phrases courtes, c’est au CP. Les phrases longues et complexes, aussi, mais on peut les reprendre... Bien que, normalement, les petits textes en soient composés... Donc, on oublie les phrases isolées, courtes ou longues, et on passe directement aux textes qui les contiendront forcément.
C’est avec le texte sous les yeux que les élèves apprennent à accéder au sens, avec un recours à la signification des mots, un appui sur les marqueurs grammaticaux, sur la ponctuation.
→ Ben ouais... Donc on oublie les « glugluteries » de la semaine dernière sur les textes lus à voix haute devant un auditoire qui n’y a pas accès, etc.
Il est nécessaire d’habituer les élèves à exercer leur compréhension collectivement ou par groupes.
→ Par groupes, c’est si on a du temps à perdre... Peut-être pour de courts textes documentaires donnés en QLM... Et encore, c’est le meilleur moyen de creuser les écarts entre les élèves bien encadrés chez eux et les autres dont l’école et ses professeurs sont les seuls recours.
La justification des réponses (informations, interprétations, etc.) engage la confrontation des stratégies qui ont conduit à ces réponses. La démarche explicite pour découvrir et comprendre un texte se poursuit (verbalisation des stratégies, attitude active et réflexive) et développe progressivement un raisonnement que les élèves pourront remobiliser en autonomie face aux textes. L’objectif est que chaque élève puisse tirer profit de ce travail collectif pour réinvestir en autonomie les démarches acquises.
→ Importantissime ! À apprendre par cœur et à utiliser chaque jour dans sa pratique de classe !
→ « pourront », c'est le futur. Au CE1, on se prépare, et après, on sait le faire seul (Merci à mon amie Sapotille, pour ce principe de base de la scolarité élémentaire).
La complexité des textes utilisés dans les différents enseignements s’accroît et se diversifie au cours du CE1.
→ Nan ? Vous pensez vraiment que nous ne l'aurions pas trouvé tout seul, ça ? Vous nous prenez pour des débiles ou bien ?...
Focus | La mise en œuvre d’une leçon de lecture
→ Quatre longues pages pour expliquer que, finalement, ce qu’il faut faire, c’est :
► Lire le texte avant les élèves pour identifier les obstacles à la compréhension du texte
→ Nan ? Vous pensez vraiment que nous ne l'aurions pas trouvé tout seul, ça ? Vous nous prenez pour des débiles ou bien ?...
► Développer chez les élèves une attitude d’autonomie face au texte proposé
→ Phase de lecture du texte en autonomie pendant laquelle tous les décrocheurs décrochent, tous les chahuteurs chahutent, tous les « élèves CAMIF » progressent...
→ Pas de temps prévu, serait-ce à faire à la maison ?... Encore plus inégalitaire alors... Tant pis pour les élèves dont les parents ne peuvent accompagner leur enfant dans sa scolarité, pour tout un tas de raisons dont la mauvaise volonté n’est pas forcément la plus courante.
► Étayer la difficulté (15 à 20 minutes)
→ Petit extrait de pédagogie magistrale et frontale : « Mes chéris, descendez de vélo, je vais vous montrer comment moi, je pédale. »
→ suivi d’un moment de « différenciation » différée : « Mes chéris, je vois que (comme d’habitude), Olibrius, Dormante, Sakapusse et Orphée n’ont rien compris au texte puisqu’ils ne l’ont pas lu, donc je vous laisse avec des coloriages magiques, je vais les faire lire. Gros bisous, soyez sages et n’ouvrez pas au loup s’il frappe à la porte. »
► Lecture à voix haute (15 à 20 minutes)
► Enseignement explicite de la compréhension (20 minutes)
→ L’un après l’autre, les temps entre parenthèses le prouvent ! Ceci dit, ce qui y est expliqué est intéressant et rien ne nous empêche dans notre pratique de classe de jumeler ces deux temps (les seuls réellement utiles pour apprendre à vraiment lire à nos élèves de CE1).
→ Vous croyiez que c’était fini ? Eh ben non ! Encore 30 minutes pour écœurer Olibrius et Sakapusse et bercer Dormante et Orphée !
► Reformulation de l’ensemble du texte par le professeur (15 minutes)
► Lecture expressive par les élèves à voix haute en respectant la prosodie et en recherchant la fluidité de la lecture. (15 minutes)
→ Là, je retire ce que j'ai dit juste au-dessus, cela fait partie du temps utile. Réveillez Sakapusse, Olibrius, Dormante et Orphée ! Qu'ils prennent leurs chuchoteurs et au boulot, nous allons leur tenir les pieds chauds pour qu'ils participent activement au travail !
Focus personnel | La mise en œuvre d’une leçon de lecture
dans le cadre d’un apprentissage global de la langue orale et écrite
→ Et si un autre monde était possible ? Et si, dans des classes réelles, avec des élèves réels, nous répartissions autrement le temps de français, de manière à maintenir les élèves actifs et acteurs pendant les 2 h 30 de français quotidien ?
→ Nous supprimerions tout ce qui est redondant, lourdingue, conçu par des gens hors-sol qui n’ont jamais mené une classe d’une vingtaine d’enfants (et ne parlons pas des trentaines de plus en plus courantes) du 1er septembre au 7 juillet et nous ne garderions de tout ce galimatias que ce qui apprend la même chose aux élèves implicitement, sans les faire descendre de vélo pour qu’ils constatent explicitement ce miracle.
→ Cela donnerait :
Horaires quotidiens :
a) Lecture, vocabulaire et expression orale : 45 minutes (3 heures hebdo)
b) Étude de la langue, copie, écriture : 1 h (4 heures hebdo)
c) Orthographe et dictées : 30 minutes (2 h hebdo)
d) Production d’écrits : 15 minutes (1 h hebdo)
Mise en œuvre d’une leçon de lecture :
Travail quotidien à mener « tambour battant » avec le moins possible de descentes de vélo pour regarder pédaler le professeur.
► Utilisation d’un manuel de lecture qui prévoit l’exploitation de chaque texte[1] (vocabulaire, compréhension, expression orale et écrite) pour décharger le professeur du galimatias proposé par le Guide rouge ; ces manuels ont l’avantage de proposer des textes gradués en difficulté grâce auxquels les trois quarts de ce qu’on a lu depuis 5 semaines dans ce fichu Guide rouge est déjà prévu ! Et comme le quart restant est inutile, voire néfaste, c’est encore mieux !
► Découverte collective du texte en classe par une lecture à voix haute en cascade[2] :
- phrase après phrase en début d’année
- groupe de phrases par groupe de phrases lorsque la lecture gagne en aisance
► Exercice simultané de la compréhension par un dialogue entre élèves, entre élèves et professeur :
- après chaque phrase en début d’année
- après chaque groupe de phrases lorsque la lecture gagne en aisance
► Relecture immédiate par un autre élève de la partie décryptée juste avant l'explication
► En fin de paragraphes (puis de texte, s’il reste des élèves qui n’ont pas lu ou s’il reste du temps), relecture globale du texte, toujours en cascade pour maintenir l’intérêt de tous (utilisation possible du « chuchoteur » pour les élèves qui ont tendance à s’évader ou mener d’autres projets).
Si le temps manque (ou si tous les élèves ont déjà beaucoup lu, ce qui est le cas dans les classes à tout petit effectif), c'est le professeur qui relira le texte entier.► Travail sur la compréhension, le vocabulaire, l’analyse graphémique (et parfois grammaticale) du texte grâce au questionnaire faisant suite au texte : lecture de phrases courtes dont la compréhension est indispensable à l’exécution de la consigne incluse dans cette partie.
Post scriptum : Si vous voulez une illustration en classe avec réflexions d'élèves, compléments pour le professeur, il n'y a qu'à demander et je ferai. Je ne l'ai pas mise pour ne pas alourdir.
Notes :
[1] Lecture et Expression au CE ; Français, Livre de lecture Belin (édition 2008) ; La lavande et le serpolet, livre et cahier d’exploitation ; Le livre des bêtes, tapuscrit (à me demander : Contact) ; Avec l'Oiseau bleu (tapuscrit à me demander : Contact) ; La Ruche aux livres ; L'Oiseau Lyre CP/CE1 et L'Oiseau Lyre CE1 et cahiers d'exercices (Attention, ces deux ouvrages, superbes, ne possèdent pas de questionnaires de compréhension, ni de lexique) ; ...
[2] Élève 1 lit phrase 1, élève 2 la relira et continuera en lisant la phrase 2, élève 3 relira la phrase 2 et continuera en découvrant la phrase 3, etc. À la fin de chaque paragraphe, l'élève suivant le dernier lecteur relira tout le paragraphe.
Dans la même série :
Le petit livre rouge (1) ; Le petit livre rouge (2) ; Le petit livre rouge (3) ; Le petit livre rouge (4) ; ... ; Le petit livre rouge (6) ; Le petit livre rouge (7) ; Le petit livre rouge (8) ; Le petit livre rouge (9) ; Le petit livre rouge (10) ; Le petit livre rouge (11) ; Le petit livre rouge (12) ; Le petit livre rouge (13) ; Le petit livre rouge (14)
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Commentaires
Merci pour ce topo en épisodes à "rebondissement"! Je ne veux pas abuser, mais je serais intéressée par une illustration en classe...
Une illustration en classe de quoi, s'il vous plaît ?...