• Le petit livre rouge (3)

    Le petit livre rouge (3)

     Continuons notre écrémage du petit livre rouge, paru en toute discrétion sur éduscol sans avoir fait pour l'instant couler autant de salive et d'encre virtuelles que son prédécesseur à destination des PE exerçant au CP.

    Aujourd'hui, après deux semaines consacrées au chapitre I (pour consulter les articles, voir liens en bas de page), nous traitons, d'une seule traite, le chapitre II.

    Je pensais que ce serait court, vu que d'après moi, ce point important avait déjà été traité en long, en large et en travers par le chapitre précédent (particulièrement dans sa seconde partie, celle qui nous initiait à la « fluence », néologisme né d'une mauvaise traduction du mot anglais « fluency »).

    Hélas, il n'en était rien ! Malgré un écrémage sérieux, j'ai encore un texte qui, commentaires compris, compte 17 pages A4, en Arial 12, avec des interlignes 1,5...

    Je ne m'étale donc pas plus et laisse les courageux et courageuses se lancer dans ce pavé (pour les autres, sautez vite les 16 premières pages et allez directement au résumé commenté, en fin d'article). Pour les codes de lecture, voir ici.

    Lire à voix haute

    → Me voilà tout étonnée ! Moi qui croyais que j’avais traité cette partie depuis deux semaines, j’apprends que j’ai, encore une fois, amalgamé (et j’ai la tête dure, ça fait exactement 30 ans que ça dure) des compétences distinctes en une seule tâche complexe i-né-va-lu-a-ble grâce à des procédés hau-te-ment scien-ti-fi-ques !

    Le mieux, c’est de faire comme si... J’ai donné mon point de vue sur les nécessaires révisions et approfondissement du programme de CP, dans lequel la lecture à voix haute tenait le haut du pavé, et je vais maintenant explorer les attendus de fin de CE1.

    L’apprentissage de la lecture-écriture se poursuit au-delà de l’acquisition des mécanismes de décodage-encodage des graphèmes-phonèmes et de l’automatisation de ces procédures. Les entraînements systématiques à la lecture orale et expressive des textes succèdent nécessairement à ce premier jalon technique de l’apprentissage.

    → Non, pas « succèdent » : « sont nécessairement concomitants » ! En ce moment, dans de nombreuses classes françaises de CP des enfants s’entraînent déjà la lecture orale et expressive. C’est encore succinct mais cela ira en s’accentuant  jusqu’à la fin de l’année de CP.

    La capacité à lire un texte à voix haute n’est pas innée pour les élèves. Lire un texte à voix haute relève donc d’un processus complexe qui s’apprend sur la durée. Cette activité inscrite tout au long de la scolarité doit faire l’objet d’un apprentissage spécifique, régulier, guidé par le professeur.

    → Ils ont oublié une précision après « inscrite » : « inscrite quotidiennement ».

    I. Lecture à voix haute : fluidité et expressivité

    Véritable enjeu de communication orale, la lecture à voix haute repose sur la transmission expressive d’un texte à un public qui n’en dispose pas et qui doit pouvoir le comprendre.

    → à terme, oui. Mais là, nous sommes à l’école. En tout début de chaîne, qui plus est. Laissons les chenilles manger quelques feuilles du rosier avant de se transformer en papillons devant la rose émerveillée[1]. Dans le cas présent, classe de CE1, tout le monde dispose du texte et est prié de le suivre mot à mot pendant la lecture du copain ou de la copine !

    Inscrite dans un projet en vue de produire des effets à sa réception, cette activité particulière ne s’improvise pas. L’élève ne peut en effet procéder d’emblée à une première lecture orale expressive sans préparation ni entraînements systématiques au risque de se trouver en difficulté devant ses pairs. Rien n’est plus inconfortable que de faire entendre à d’autres une lecture non maîtrisée. C’est pourquoi, lire un texte avec expressivité nécessite de prendre successivement en compte deux paramètres : être en capacité de lire sans hésitation, ce qui implique d’avoir dépassé les obstacles portant sur l’identification des mots, puis comprendre ce qui est lu.

    → Non, il comprend à mesure qu’il lit... Je vous le fais en voix off :

    « Il é...tait... il était [ah tiens, ça se passe avant ! c’est un conte... je suis sûr de la suite... vous allez voir, c’est « une fois », « il était une fois »]... une fois [et toc ! je vous l’avais dit !] un... roi... [je te parie qu’après c’est « et une reine »]... et... une... reine [gagné !] qui... [n’avaient pas d’enfants ?... on va voir] é...taient... [ah non... perdu...] si... fâ...chés, qui étaient si fâchés [ah si... peut-être...] de n’a-voir point [ah oui, c’est « pas » dans les livres d’autrefois... on l’a lu au CP] de n’avoir point d’enfants [pas d’enfants ! gagné ! j’ai gagné ! j’ai gagné ! tiens, ça continue... bah alors... qu’est-ce qu’ils veulent dire encore ?] si... fâchés... qu’on [pfff ! c’est un gros mot ! ah ah ah !] ne... sau...rait, saurait le di...re, si fâchés qu’on ne saurait le dire. [ah oui, vraiment vraiment fâchés quoi... super fâchés !...]

    C’est à cette condition que l’élève peut communiquer aisément à d’autres le sens d’un texte sur lequel il aura préalablement travaillé, en projetant une intention personnelle de réception.

    → Si les autres n’ont pas le texte sous les yeux, d’accord ; mais en classe, ils l’ont. Et ils sont priés de le lire en même temps que leur camarade, en sub-vocalisant, aidés ou non pas un « chuchoteur » qui leur permet de s’entendre en même temps qu’ils entendent leur camarade. Ce qui rend la tâche du jeune conteur bien plus simple, heureusement.

    a) La lecture fluide :

    De l’oralisation systématique du décodage à l’identification des mots

    L’élève qui entre au CE1 peut certes lire seul de courts textes grâce aux stratégies acquises durant l’année de CP, mais il lui est peut-être encore difficile de lire d’emblée un texte sans hésiter ni buter sur certains mots. Oraliser un texte au fur et à mesure de sa découverte joue alors un rôle de soutien pour entendre ses méprises et les corriger.

    → Exactement. Et nous allons nous y employer quotidiennement pour que, pas à pas, il y arrive.

    Langage pour soi rassurant, la sonorisation des unités de l’écrit est une étape indispensable pour le lecteur apprenant. L’aisance de lecture est rendue progressivement possible par des entraînements oraux systématiques à partir de mots isolés, puis lus en contexte.

    Moi, j’inverserais... D’abord lus en contexte, le plus souvent possible puis isolés ensuite pour y repérer une difficulté... Par exemple :

    « On fit un beau baptême ; on donna pour marraine à la petite princesse toutes les fées qu’on put trouver dans le pays. »

    Baptême sera difficile à replacer, sans doute, mais nous sommes au CE1, ils ont encore des années d’instruction obligatoire devant eux... Mais pays se retrouvera dans d’autres textes, ainsi que paysan, paysanne, paysage, etc. L’élève lit donc cette phrase en hésitant sur ces deux mots. L’enseignant, qui est là pour ça, l’aide (« Le P est muet. A.Y, ça se lit [ei] »).

    Il signale et écrit au tableau ces mots de la famille du mot « pays » et les fait décoder à ses élèves, procédant ainsi à « l’entraînement oral systématique ». Puis on continue la lecture du conte parce que, pour l’enfant, la motivation est là et non pas dans l’entraînement oral systématique.

    Ces répétitions aident l’élève à fixer durablement l’image orthographique des mots rencontrés au gré des lectures

    Pas tous... Il y en a sur lesquels ça glisse comme sur les plumes d'un canard, hélas.

    et étendent son lexique mental qu’il mobilise d’autant plus rapidement qu’il s’entraîne régulièrement. L’accès à la voie orthographique en est ainsi confortée : l’élève finit par ne plus recourir à la décomposition et la recomposition des mots en syllabes, et gagne en rapidité et précision.

    → Pensons à l’épellation ! C’est bien de fixer une « image orthographique » mais parfois, une image, c’est flou. Alors, c’est mieux de fixer une orthographe lettre à lettre : « pays ; P.A.Y.S... P.A.Y.S, ça se lit [pei] ».

    Oraliser une lecture est donc en soi une phase indispensable pour ancrer durablement les premiers apprentissages techniques à partir desquels pourront être développées de nouvelles habilités : l’élève « se parle » pour parvenir à une identification automatisée des mots et intégrer leurs informations.

    → Jusque-là, tout va bien.

    Cette activité cognitive n’est plus nécessaire lorsque l’élève maîtrise suffisamment les mécanismes de décodage.

    →  Je dirais de lecture, plutôt. Sans la compréhension automatisée, il continuera à « faire du bruit avec sa bouche », même mentalement, surtout si son lexique mental est pauvre.

    Elle laisse place à une lecture silencieuse intériorisée durant laquelle il peut se concentrer principalement sur la signification du texte et sa restitution. C’est à cette condition que l’élève peut s’entraîner à lire les mots en les regroupant.

    → La lecture par groupes de souffle, qui apparaît dans la deuxième moitié du CP ou dans le premier tiers du CE1 est largement antérieure à la lecture silencieuse intériorisée. Les « qu’est-ce qu’il faut faire ? » que nous entendons en mathématiques ou en grammaire, lorsque nous demandons aux élèves de lire la consigne nous le prouvent chaque jour.

    Entraîner les élèves à la lecture fluide

    → Je me lance mais je n’ai pas envie. Je suis prête à parier qu’ils vont nous dire de les faire descendre de vélo pour se regarder pédaler !

    Pour que l’attention des lecteurs débutants puisse se porter sur la manière de faire comprendre un texte qu’ils souhaitent partager à d’autres, le professeur doit être en mesure de proposer des temps d’entraînements spécifiques et réguliers, visant la maîtrise d’une lecture hautement automatisée. Ces entraînements alternent nécessairement des temps dirigés en présence du professeur et des temps de travail en autonomie, qu’ils soient individuels ou en groupe. Ils sont inscrits à l’emploi du temps.

    → « Liberté, liberté chéri-euh ! Combats avec tes défenseurs... (gros sanglots) » Ils sont sympas, remarquez, ils n'imposent pas les créneaux horaires dans la journée, comme Napoléon Ier. Blindez vos emplois du temps si vous êtes inspectables...
    Ceci dit, quand je lis sur les réseaux sociaux que « c’est normal qu’un enfant de CE1 ne sache pas copier » et que lorsque j’insiste, on me répond que je suis incapable de comprendre la spécificité des enfants issus des minorités visibles (si, si, ils ne sont pas faits comme les autres, paraît-il), je comprends qu’en haut lieu, on essaie de faire varier un tantinet les représentations mentales erronées de certains de nos collègues qui s’apitoient sur les inégalités de départ mais se refusent à tenter de les compenser autant que faire se peut.

    LIRE SANS ERREUR ET RAPIDEMENT
    DES MOTS COMPLEXES GRÂCE À UNE IDENTIFICATION MAÎTRISÉE

    Certaines activités aident particulièrement les élèves à identifier aisément et rapidement les mots en se détachant progressivement du décodage. Les listes analogiques de mots comprenant une partie commune qui se prononce et qui s’écrit de la même façon sont des supports intéressants.

    → Tout à fait. Tous les jours, lors de la lecture déchiffrage-compréhension-fluidité-vocabulaire, et lors de la séance d’orthographe, et lors de celle de grammaire ou de conjugaison (nous dansions, nous parlions, nous écrivions, nous ...ions), et lors de la séance de mathématiques (addition, soustraction, multiplication, numération, fraction, ...) ça fonctionne aussi. Mais ça, n’en parlez pas à des évaluationnistes diplômés, c’est réservé aux « instituteurs », ceux qui ont les enfants 24 heures par semaine et savent en profiter.

    Pour ce faire, le choix des mots s’appuie nécessairement sur la progression des graphèmes complexes étudiés

    → Absolument pas obligatoire que cela s’appuie sur une progression quelconque, bien au contraire ! Sauf dans les classes où l’on apprend à lire au CE1 parce que les collègues de CP ont été détournés de ce but par toutes sortes d’activités connexes hautement conseillées par leur hiérarchie pendant 30 ans... Mais là, retournons à l’étape antérieure, celle décrite dans le premier chapitre de ce compte-rendu. On peut bien au contraire procéder tout autrement :

    ◊ on écoute lire l’élève,

    ◊ on remarque qu’il bute sur une difficulté,

    ◊ on organise à l’impromptu une petite séance d’identification rapide (liste analogique, lecture rapide des mots de la liste),

    ◊ on revient au texte et on lui fait relire la phrase dans laquelle la difficulté a été notée,

    ◊ dans les jours à venir, lorsque cette difficulté apparaîtra dans d’autres mots lus, et ceci dans tous les domaines, on réserve la lecture du mot à l’élève qui avait éprouvé la difficulté en question.

    et proposent à la lecture des mots de la même famille (voyager, voyageur, voyageuse) ou des mots qui riment (praline, tartine, sardine). Des mots de plus en plus longs sont progressivement proposés afin de développer l’empan visuel. Ils sont repris ensuite dans différentes phrases afin de favoriser leur lecture en contexte et de conforter leur identification rapide.

    → Ensuite, il y a une page de délires chronophages, chronomètre à l’appui, qui visent à mettre trois heures à faire ce qu’on fait en trente à quarante-cinq minutes quotidiennes pendant une séance de lecture à voix haute et qu’on consolide à longueur de journée pendant les autres temps de « contact avec l’écrit » qui émaillent l’emploi du temps (c’est la page 22 pour les courageux).

    LIRE AVEC AISANCE
    EN RESPECTANT UN RYTHME « NATUREL »

    → À lire (pages 23 à 25) pour faire le jour où l’IEN vient t’inspecter, camarade...

    → Ou comment organiser une fois par semaine, une séance absolument pas « naturelle » du type « Descends de ton vélo et regarde-toi pédaler » pendant laquelle tout le monde s’énerve et s’ennuie en se disant qu’il aurait beaucoup mieux à faire et quelques séances hebdomadaires « tiens, aujourd’hui, on ne lit pas comme des CE1, vous allez jouer à faire les CP qui découvrent la lecture et ne peuvent travailler que sur des petites phra-phrases niaises à plaisir »...

    → Pour le rythme « naturel », fais autre chose, tous les jours, et tu verras que ça fonctionne tout aussi bien, sans ennuyer personne. En te rappelant le dicton : « Si c’est en forgeant qu’on devient forgeron, c’est en lisant qu’on devient liseron. »

    → Un seul point est à retenir néanmoins :

    Le professeur lit à voix haute le texte écrit au tableau...  

    → mais il convient de le placer, tous les jours, après la lecture « décorticage et compréhension » faite par les élèves de manière à ce qu’ils suivent aisément cette lecture magistrale.

    LIRE AVEC UNE INTONATION ADAPTÉE
    EN AIDANT LES ÉLÈVES À RESPECTER LA PONCTUATION

    L’intonation dynamise la lecture à voix haute et facilite l’accès à la compréhension du texte lu. Elle se marque, tout d’abord, dans chaque phrase, par le respect des signes de ponctuation. Les élèves qui n’en tiennent pas compte ont souvent de grandes difficultés pour créer les liens nécessaires donnant accès au sens.

    → Le tout étant de savoir qui était là en premier : la poule ou l’œuf ? Est-ce parce qu’ils n’en tiennent pas compte qu’ils ont des difficultés d’accès au sens ou est-ce parce qu’ils ont des difficultés d’accès au sens qu’ils n’en tiennent pas compte ? Bonne question... Quand on sait qu’on leur a d’abord demandé de lire sans comprendre, on ne s’étonne pas qu’ils continuent, les copains...

    Pour s’aider, les élèves peuvent utiliser un codage, avec des flèches par exemple, pour indiquer à quel moment la voix baisse, monte, ou reste en suspens, afin de marquer une pause.

    → Je connais un type, Topaze, il s’appelait, qui, quand un élève oubliait de réfléchir au sens de ce qu’il écrivait, lui mâchait le travail en transformant un exercice d’intelligence en exercice de perroquet savant... Il faisait rire les gens... en 1930...

    Ce travail succède nécessairement à celui de la compréhension.

    → Donc il est inutile... Après l’heure, ce n’est plus l’heure, surtout avec des enfants de moins de 11 ans. On comprend en s’appuyant aussi sur la ponctuation, et quand on a compris, on n’a plus besoin de la baliser à grand renfort de flèches et de surligneur puisqu'on a compris !

    Par ailleurs, pour mieux comprendre l’importance du respect de la ponctuation et permettre à d’autres de comprendre ce qui est lu, on peut aussi travailler la lecture de paires de phrases dont la ponctuation change le sens.

    → À faire de temps en temps, quand on a 5 minutes, pour exercer la vigilance à la ponctuation... en grammaire, par exemple.

    Travailler la fluidité de lecture d’un texte en classe entière

     → « Mes poussins, descendez de vélo ! Nous allons nous regarder pédaler... Vous allez voir, c’est PA-SSIO-NNANT ! » On parie ?

    Le travail sur la fluidité de lecture d’un texte en classe entière peut prendre appui sur quatre étapes.

    PROPOSER UN MODÈLE DE LECTURE FLUIDE DU TEXTE
    ET ANIMER UNE DISCUSSION SUR LA FAÇON DE LE LIRE

    → Gagné !

    Si on souhaite investir les élèves dans un projet de lecture, il convient de leur faire apprécier, au préalable, une finalité possible de la restitution. Il est important de leur présenter régulièrement un modèle de lecture vers lequel tendre et d’indiquer ce qu’ils doivent faire pour progresser. En lisant lui-même à voix haute systématiquement, en faisant écouter également des enregistrements de lectures maîtrisées, le professeur présente aux élèves de véritables modèles de lecture fluide.

    → Tout à fait. Et on s’arrête là pour recommencer demain, ou cet après-midi, ou tout à l’heure... Et ça va rentrer, tout seul, parce qu’un enfant, c’est programmé pour progresser, avancer, s’améliorer.

    Il attire alors leur attention sur les divers aspects de la lecture : « Quel effet a procuré la pause ici, l’insistance sur ce mot ? Pourquoi ai-je ralenti le rythme durant la lecture de ce passage ? Que vous a permis de comprendre cette intonation ? »

    → Et là, il gâche tout ! Sauf s’il le fait, très ponctuellement, après la lecture d’un élève et non la sienne, pour le féliciter parce qu’il a passé un cap important.
    Ce genre d’exercice, c’est parfait pour le cours Florent ou le club théâtre du collège du coin. À sept ou huit ans, on reste dans l’action, celle qui permet d’avancer, la masturbation neuronale sur les intentions de l’auteur ou du lecteur, ce n’est vraiment pas leur tasse de thé.

    Le professeur peut projeter le texte au tableau et demander aux élèves, après l’avoir relu, d’identifier les mots ou groupes de mots sur lesquels portent les effets produits pendant la lecture.

    → Il peut... au cours Florent ou au club théâtre du collège...

     À l’aide d’un codage spécifique, les élèves font ressortir les hausses et baisses d’intonation pour chaque phrase, au regard de la ponctuation présente et en tenant compte du sens du texte.

    → Vu plus haut. Vous savez ce que j’en pense...

    Les virgules, les points, les points d’interrogation et d’exclamation sont accentués ; les liaisons spécifiées. Tous ces indices visuels permettent aux élèves de mieux lire et de mieux comprendre le texte.

    → Oui, tous les jours, à chaque fois qu’un élève néglige un signe de ponctuation... Mais pas la peine de coder tout cela au tableau. C’est une surcharge à la lecture et ça encourage l’élève à ne plus « écouter ce qu’il lit ».

    De temps en temps, on peut donner aux élèves un exemple de ce qu’il ne faut pas faire en lisant lentement, de façon saccadée, beaucoup trop vite ou sans expressivité, afin qu’ils prennent conscience des effets produits sur l’auditoire.

    → On peut... Quand on les sent prêts à sauter le cap, et ce dès le CP. C’est une question de feeling : on ne tire pas sur les branches du pommier pour lui faire produire des pommes mais on lui apporte ce qui lui faut pour l’aider à pousser droit et en bonne santé et il produira de lui-même.

    INVITER LES ÉLÈVES À RÉPÉTER LEUR LECTURE

    S’exercer à lire plusieurs fois un même texte donne de l’assurance à l’élève qui surmonte progressivement les obstacles liés à l’identification des mots pour lire de manière aisée.

    → D’accord si... on ne dépasse pas le cap fatidique des trois relectures. Ensuite, je vous parie que tous ceux qui ont des difficultés de déchiffrage mais pas de problèmes de mémorisation orale ne liront plus qu’un mot de temps en temps du texte qu’on leur aura donné à ressasser ! Sans avoir besoin de réfléchir, en écrivant ceci, j’ai trente-six visages d’enfants réels, et spécialistes du genre, qui s’affichent devant mes yeux...

    Au fur et à mesure des relectures, il se voit progresser. Il renforce l’identification des mots, la fluidité de lecture et sa compréhension du texte. Il peut éprouver un réel plaisir de lire.

    → C’est vrai aussi pour les « autres lectures ». C’est fou comme l’enfant est plastique, on lui fait lire un jour :  

    « Il était une fois un roi et une reine qui étaient si fâchés de n’avoir point d’enfants, si fâchés qu’on ne saurait dire. Enfin, pourtant il leur naquit une fille. On fit un beau baptême ; on donna pour marraine à la petite princesse toutes les fées qu’on put trouver dans le pays (il s’en trouva sept), afin que, chacune d’elles lui faisant un don, comme c’était la coutume des fées en ce temps-là, la princesse eût, par ce moyen, toutes les perfections imaginables. »

    Et le lendemain, il lit plus facilement qu’hier l’extrait suivant :

    « Après les cérémonies du baptême, toute la compagnie revint au palais du roi, où il y avait un grand festin pour les fées. On mit devant chacune d’elles un couvert magnifique, avec un étui d’or massif où il y avait une cuiller, une fourchette et un couteau de fin or, garnis de diamants et de rubis. Mais, comme chacun prenait place à table, on vit entrer une vieille fée, qu’on n’avait point priée, parce qu’il y avait plus de cinquante ans qu’elle n’était sortie d’une tour, et qu’on la croyait morte ou enchantée.»

    Tant et si bien que, d’extrait en extrait et de jour en jour, voilà qu’un jour, quelque part entre la rentrée de novembre et celle de février ou mars, il a tant progressé que la lecture lente, saccadée, trop rapide ou sans expressivité a miraculeusement disparu pour laisser la place à une lecture aisée et expressive.

    Différentes formes d’entraînement à la lecture à voix haute peuvent être proposées à partir de courts textes :

    — une lecture à l’unisson

    — une lecture en écho où les élèves répètent chaque phrase lue à tour de rôle à mesure qu’un élève ou que le professeur les lit. Ces phrases peuvent être lues à une vitesse légèrement supérieure à celle des élèves afin de les entraîner dans son sillage

    — une lecture orchestrée en partageant les phrases d’un texte à lire entre plusieurs groupes d’élèves.

    — une lecture en cascade : un élève lit la première ligne, puis quelques élèves se joignent à lui pour lire la deuxième, et d’autres encore s’ajoutent pour lire la suivante jusqu’à ce que la classe lise en chœur

    → Oui, peut-être, en faisant attention à ce que cela ne se transforme pas en « bouillie pour les chats »... Rien ne remplacera la bonne vieille technique de la lecture chacun son tour, à un rythme de plus en plus soutenu, avec relecture de chaque phrase, si les élèves sont encore très lents, ou en fin de paragraphe, s’ils sont déjà un peu à l’aise (lecture mot à mot).

    Lorsqu’on permet aux élèves de s’exercer à plusieurs, en tandem, certains ressentent de la frustration : les lecteurs les plus avancés n’ont pas toujours la patience ni la volonté de lire avec des lecteurs davantage en difficulté.

    → Eh oui, ils sont encore petits ! Ce qu’on peut favoriser en lecture-plaisir, à la bibliothèque, ne peut être institutionnalisé comme tâche à accomplir pour progresser.

    PERMETTRE À L’ÉLÈVE DE S’ENTRAÎNER SEUL

    Plus assuré dans sa lecture, l’élève doit pouvoir s’entraîner à lire seul. Ce temps individuel de préparation est nécessaire pour favoriser l’engagement de l’élève dans un projet de restitution de la lecture en lui permettant de l’améliorer.

    → Oui, à partir du deuxième trimestre, parfois un peu avant lorsqu’on a une bonne classe. Le plus simple est de changer la nature des « devoirs du soir ». Jusqu’alors, on donnait à relire la lecture du jour à la maison ; désormais, on donnera la lecture du lendemain à lire une fois.

    Il peut utiliser un petit tube en plastique en forme de combiné de téléphone pour se concentrer uniquement sur sa voix qu’il entend très distinctement, sans bruit parasite, alors qu’il ne fait que chuchoter faiblement. La voix ainsi amplifiée l’aide à se focaliser sur ce qui est lu et maintient la motivation à lire et relire le texte.

    → Un « chuchoteur », quoi... Mais je persiste et signe : à la maison, c’est mieux qu’en classe pour la préparation. Ou à l’étude, ou en APC. La classe, c’est pour le collectif. Nous avons si peu de temps !

    INVITER LES ÉLÈVES À PRÉSENTER LEUR LECTURE

    Les entraînements à la relecture peuvent manquer d’intérêt pour certains élèves, mais ils s’exercent plus volontiers lorsque la situation exige de lire pour l’ensemble de la classe. Le professeur encourage et multiplie les temps de lecture partagés : les élèves peuvent relire un texte qu’ils ont apprécié ou présenter, seuls ou à plusieurs, le fruit d’un travail mutuel, après préparation, afin de proposer de réelles situations de communication.

    → Pourquoi pas ? Moi, je vois bien ça le samedi après-midi... Quoi, on n’a plus classe le samedi après-midi ? Alors le samedi (ou le mercredi) matin ? Plus classe non plus ? Alors... euh... je ne vois pas... C’est dommage mais il faut être réaliste.

    S’entraîner à lire avec fluidité un texte sur la semaine

    → Cautère sur une jambe de bois. Tenez, je vous lis La Chèvre de Monsieur Seguin (le livre est dans la bibliothèque de mes enfants, dans la pièce voisine, mais je vous le lis quand même) :

    « Monsieur Seguin n’avais jamais eu de bonheur avec ses chèvres. Il les perdait toutes de la même façon : un beau matin, elles cassaient leur corde, s’en allaient dans la montagne et là-haut le loup les mangeait. Ni les caresses de leur maître, ni la peur du loup, rien ne les retenait. C’était, paraît-il, des chèvres indépendantes, voulant à tout prix le grand air et la liberté. »

    Pas mal, hein ? Bon, j’avoue, j’ai triché un peu, je suis allée regarder le mot qu’il y avait après « mangeait », LE mot, hein, pas LES mots...Vous appelez ça de la lecture, vous ? Moi non, c'est de la récitation.

    Le professeur peut envisager le travail sur la fluidité de lecture d’un texte en plusieurs temps répartis sur la semaine :  présentation et lecture d’un texte qu’il lit à voix haute ; découverte et appropriation du texte par l’élève ; entraînements différenciés pour surmonter les obstacles de lecture ; travail guidé sur la compréhension du texte et de son lexique ; entraînements différenciés pour parvenir à une identification maîtrisée de tous les mots du texte ; repérage de la ponctuation, des groupes de souffle, des liaisons ; entraînements guidés et autonomes à différentes formes de lecture : lecture à l’unisson, lecture en écho, lecture orchestrée, lecture individuelle ; régulations avec le professeur, les pairs, seul, durant les entraînements ; évaluation de la prestation : par l’élève, le professeur, les pairs.

    → Ainsi, à la fin de l’année, les bons lecteurs auront progressé grâce à leurs centaines de lectures personnelles, à l’école ou plus sûrement à la maison et les autres, grâce à leur trente-six textes (ou plutôt à cause d’eux), n’auront toujours pas fini d’apprendre à lire mais auront su construire des stratégies de contournement (apprentissage par cœur pendant la lecture par le professeur, « bouillie » pour les chats pendant les lectures échos ou orchestrées) et une peur de l’échec et par là-même de la lecture à voix haute grâce à l’évaluation par le professeur et les pairs.

    Pour être efficaces, des séances courtes et denses doivent être proposées quotidiennement.

    → Ça, c’est incontestable. Trente minutes par jour, tous les jours, tous ensemble, pour lire un texte à voix haute et prendre ainsi des habitudes et des réflexes de lecteurs.

    Le professeur prend en charge un groupe de trois à quatre élèves de niveau homogène qu’il fait tourner sur la semaine. Le reste de la classe travaille pendant ce temps en autonomie. Cette organisation est à privilégier pour permettre aux élèves rencontrant des difficultés de progresser. Elle tient nécessairement compte de la diversité des élèves au sein de la classe et évolue tout au long de l’année.

    → Système longtemps à l’honneur chez les Frères des Écoles Chrétiennes et les instituteurs non formés mais rémunérés par les communes (depuis 1834), avant l’avènement de l’École Publique, en 1881. Les fondateurs de l’École Publique ont su mettre fin à tout cela grâce à l’enseignement collectif, enseigné dans les Écoles Normales d’Instituteurs et Institutrices.   

    → Savez-vous qu’il existe des classes de CE1, dans tous les types d’école, dans lesquelles, yeux fermés, on ne peut quasiment pas juger de la diversité des élèves lorsqu’on les écoute lire ?... C’est vers cela qu’il faudrait tendre, pas vers la réédition des méthodes antédiluviennes qui furent abandonnées en raison de leur peu de rendement.

    Travailler la fluence de lecture dans le cadre d’un atelier dirigé

    → S’en suit la description (intéressante) d’une séance de lecture telle qu’on peut la mener en groupe-classe, tous les jours, sur des textes un peu plus longs afin que tout le monde lise à voix haute sa partie, soit comme « déchiffreurs » (première lecture), soit comme « relecteurs » (deuxième lecture), soit comme « conteurs » (lecture expressive presque récitée). Je vous la copie, tiens, mais pas pour juste Alfred, Bérénice, Charly et Desdémone, non pour les 12 à 30 élèves de votre classe tous ensemble (parce que seuls, on va plus vite, mais ensemble, on va plus loin) (en rouge, ce que je trouve inutile ou contre-productif) :

    PREMIÈRE ÉTAPE : LANCEMENT DE L’ACTIVITÉ

    Le professeur précise aux élèves les objectifs d’apprentissage. La taille de police du texte donné est adaptée ; les lignes sont numérotées pour faciliter le repérage dans le texte.

    DEUXIÈME ÉTAPE : ENTRAÎNEMENT À LA LECTURE DU TEXTE PAR LES ÉLÈVES, RELECTURE PAR LE PROFESSEUR ET QUESTIONNEMENT

    Les élèves lisent le texte, guidés par le professeur. Durant les temps d’entraînement, ils peuvent commettre des erreurs sur les mots qu’ils découvrent : le professeur doit alors penser ses interventions pour accompagner l’apprentissage. En interrompant instantanément la lecture au moment de l’erreur, il ne laisse pas à l’élève l’opportunité de se corriger lui-même. Il est important de lui accorder cette possibilité pour favoriser le développement de processus d’autorégulation (par exemple, l’élève lit « Il ouvre la “cague” du tigre... euh non... la “cage” du tigre. »).

    Le professeur peut aussi renvoyer en miroir ce que l’élève vient de lire afin de lui faire prendre conscience de l’erreur. Il attend sa réaction et l’invite à se corriger. Après avoir permis à l’élève de se corriger lui-même, le professeur l’invite à relire la phrase pour lever l’obstacle rencontré, faciliter l’identification des mots. Il lui permet de surmonter la difficulté.

    Il s’assure ensuite de la compréhension du vocabulaire et de la compréhension littérale du texte. Les réponses apportées par les élèves sont systématiquement justifiées par une phrase du texte, à laquelle retournent tous les élèves et qu’ils relisent à voix haute. Le professeur relit le texte de manière expressive.

    TROISIÈME ÉTAPE : LECTURE DU TEXTE PAR LES ÉLÈVES

    À tour de rôle, chaque élève entraîné à la lecture d’une phrase, lit à voix haute la partie travaillée de façon à reconstituer le texte.

    → Non, ils ont travaillé tous ensemble, tout le texte. Pour la cohésion du groupe, il est important que tous s’intéressent à tout le texte et puissent en lire, du mieux qu’ils peuvent n’importe quel extrait.

    QUATRIÈME ÉTAPE : RETOUR SUR LE TEXTE

    À l’issue de chaque lecture, le professeur s’appuie sur les remarques formulées par les autres élèves pour aider le lecteur à corriger ses erreurs et à s’améliorer. Lorsque la lecture devient suffisamment aisée, le professeur demande à l’élève de tenir compte de la ponctuation et de mettre l’intonation.

    CINQUIÈME ÉTAPE : BILAN DE FIN DE SÉANCE

    Le professeur souligne les réussites et évalue avec bienveillance la lecture. Il met en évidence les progrès et aide les élèves à se fixer de nouveaux objectifs en les engageant dans un nouveau projet de lecteur.

    → C’est un peu pompeux comme formulation mais, en gros, c’est ça : « Bravo Machin ! Tu n’hésites plus entre chaque syllabe, tu lis bien chaque mot d’un seul coup. Maintenant, je suis sûre que tu peux encore mieux faire. Tu vas voir : bientôt, tu liras comme un papa qui lit une histoire à son petit garçon !... »

    b) La lecture expressive :

    Pratique à la fois sociale et culturelle, la mise en voix des textes s’inscrit dans une activité de communication qui contribue à développer le plaisir de lire et de partager des lectures, en suscitant et en maintenant l’envie de lire. L’élève s’attache à exprimer à d’autres ce qu’il a préalablement lu et compris.

    Véritable enjeu de communication orale, la lecture expressive requiert pour l’élève la capacité à prélever des indices dans le texte pour concevoir un projet d’interprétation personnelle visant la sensibilisation de l’auditoire.

    La lecture expressive, par la préparation qu’elle implique, constitue donc une approche d’acculturation à l’écrit en tant qu’activité réflexive sur la langue.

    → Vrai quand on lit une fois par semaine ; complètement surévalué quand on lit tous les jours, le passage s’opérant insensiblement.

    L’élève s’imprègne des structures syntaxiques, des tournures lexicales propres au texte et en interroge les différents paramètres pour se faire comprendre (articulation, débit), émouvoir et maintenir l’attention de l’auditoire en jouant sur sa voix (hauteur, intensité, rythme, intonation).

    → C’est encore plus net lorsque l’activité est pratiquée tous les jours.

    → S’en suit, en rouge, donc « Focus », un chef-d’œuvre d’activité hors-sol, parfaite pour le club théâtre dont nous parlions plus haut, mais certainement d’une efficacité bien moindre pour assurer la lecture spontanément expressive de nos élèves dès lors qu’ils ont un texte à lire[2] (pour les curieux, c’est de la page 30 à la page 31).

    c) Évaluer la lecture à voix haute

    → Selon moi, c’est d’une simplicité biblique : deux yeux, deux oreilles, un cerveau. Et c’est tout. Pour eux, ça prend deux pages et demie. Je vous les résume ? Allez, très vite parce que, quand même, nous sommes dimanche !

    → Bon, finalement, aucun intérêt sauf ça à se mettre dans le cerveau avant de se servir de ses deux yeux et ses deux oreilles :

    Niveau 1 - L’élève lit principalement mot à mot. À l’occasion, il peut lire des groupes de deux ou trois mots, mais ces regroupements sont rares ou ne respectent pas la syntaxe de la phrase. L’élève lit sans aucune expression.

    Niveau 2 - L’élève lit principalement par groupes de deux mots, avec parfois des regroupements de trois ou quatre mots. On note, à l’occasion, une lecture mot à mot. Le découpage en groupe de mots peut sembler maladroit et inapproprié dans le contexte plus large de la phrase ou du texte. Une petite partie du texte seulement est lue avec expression.

    Niveau 3 - L’élève lit surtout par groupes de trois ou quatre mots. On peut noter, à l’occasion, quelques regroupements plus petits. Dans l’ensemble, le découpage en groupes de mots semble approprié et respecte la syntaxe du texte. L’élève essaie de lire avec expression, mais ne réussit que dans une certaine proportion.

    Niveau 4 - L’élève lit essentiellement par groupes de mots signifiants. Bien qu’on puisse observer certaines répétitions ou déviations par rapport au texte, elles n’ont pas d’incidence sur l’ensemble de la lecture. La syntaxe du texte est toujours respectée. La plus grande partie du texte est lue avec expression.

    (Jocelyne Giasson, La Lecture. De la théorie à la pratique, De Boeck, 2005)

    → Sinon le reste, c’est le gloubi-boulga à la mode, chronomètre, nombre de mots minutes, etc. Il y a même une grille comme au bingo (pour les fans de grilles et d’items et pour ceux qui ont un rendez-vous de carrière cette année, elle est à la page 33).

    En résumé

    ♣ La lecture à voix haute est un processus complexe qui requiert une coordination maîtrisée de toutes les habilités de la lecture : automatiser l’identification des mots, comprendre, interpréter sa propre compréhension du texte.

    La lecture fluide et la lecture expressive sont toutes deux inhérentes à la capacité à lire un texte à voix haute et ne doivent pas être confondues. Pour l’entraînement à la fluence de lecture, l’oralisation des unités du texte permet d’accéder à une identification hautement maîtrisée des mots et précède le travail de compréhension. La mise en voix succède à ce dernier pour exprimer de façon personnelle ce qu’il en a compris et permettre à d’autres d’en saisir à leur tour la signification à travers les effets choisis.

    Cet apprentissage s’inscrit dans la durée et nécessite des temps d’entraînement quotidiens, guidés et autonomes, en focalisant par alternance l’attention des élèves sur l’un des critères relatifs à une fluence[3] aisée et à une bonne expressivité.

    Il est judicieux de s’appuyer sur les enregistrements pour évaluer la prestation de manière objective et l’améliorer.

    → Mais non, voyons ! Pas si on les fait lire tous les jours... Ça, c’est pour les chercheurs dans leurs laboratoires qui ne voient les enfants que de loin en loin.

    → Quant à l’objectivité, permettez-moi de douter... un timbre de voix, une façon d’articuler, une ambiance de classe et même la météo qui se rappelle à nous par les fenêtres, en voilà des raisons de ne pas être tout à fait aussi objectif que ce que l’on voudrait, même avec un enregistrement.

    Dans la même série :

    Le petit livre rouge (1) ; Le petit livre rouge (2) ; ... ; Le petit livre rouge (4) ; Le petit livre rouge (5) ;  Le petit livre rouge (6) ;  Le petit livre rouge (7)Le petit livre rouge (8)  ;  Le petit livre rouge (9)Le petit livre rouge (10) ; Le petit livre rouge (11)  ; Le petit livre rouge (12) ;   Le petit livre rouge (13)Le petit livre rouge (14)

    Notes :

    [1] Voir Le Petit Prince et la Rose, A. de Saint Exupéry.

    [2] Qui n’a jamais contenu son fou-rire devant une petite bonne femme de 7 ans en train de vous lire le problème de mathématiques avec des accents « bellemardiens » dans la voix ne peut savoir de quoi je parle... Je vous assure que toute la classe en haleine attendait avec impatience la chute « à la Pierre Bellemard » qui nous révélerait enfin quelle distance avait parcourue Madame Landru avant que la panne arrête son véhicule !...

    [3] Bien traduit, ça fait « aisance aisée »... Cocasse, non ?


  • Commentaires

    1
    Dimanche 29 Septembre 2019 à 12:40

    Bonjour,

    Quand tu écris :
    Ceci dit, quand je lis sur les réseaux sociaux que « c’est normal qu’un enfant de CE1 ne sache pas copier » et que lorsque j’insiste, on me répond que je suis incapable de comprendre la spécificité des enfants issus des minorités visibles (si, si, ils ne sont pas faits comme les autres, paraît-il), je comprends qu’en haut lieu, on essaie de faire varier un tantinet les représentations mentales erronées de certains de nos collègues qui s’apitoient sur les inégalités de départ mais se refusent à tenter de les compenser autant que faire se peut.

    Je suis tout à fait d'accord, même si bien sûr ça ne fait jamais plaisir de se reconnaître comme une de ces collègues qui ont des représentations mentales erronées.
    Oui, il faut changer de point de vue, intégrer que notre rôle c'est de compenser, c'est d'apprendre des choses à nos élèves, plus que d'évaluer et s'apitoyer sur leurs compétences, comme si tout était inéluctable.
    Oui, je me vois avant l'année dernière et encore parfois aujourd'hui, dans ce mode de pensée où on se sent impuissant, où on se lamente de leur niveau sans toujours essayer des choses pour les aider parce que "ils en sont incapables".
    Parce qu'on essaye de faire "du CE1", le niveau officiel qu'on a pour l'année si on a un niveau simple, et qu'on essaye de faire la méthode à la mode, Réussir son entrée en grammaire chez Retz, Picot, J'entends je vois j'écris, Capmaths, MHM... et que nos chers petits ne rentrent pas tous dans le moule qu'on leur a si bien préparé avec nos n'étiquettes de LA méthode parfaite-super-adaptée-active qu'on nous conseille(ait) à l'IUFM.

    Parce que oui, en effet, quand on débute comme moi, on va de désenchantement en désenchantement et on ne SAIT pas ce qui est normal ou pas pour tel niveau.
    Ce qu'on nous a enseigné ne correspond nullement à ce qu'on voit dans les classes (en tout cas ici en banlieue parisienne si jamais c'était plus "vrai" ici qu'ailleurs, mais je pense que c'est presque partout pareil) et ce qu'on nous dit pour nous rassurer, dans la salle des maîtres, entre collègues qui partagent leur quotidien et s'apitoient.
    En effet, on dit et on entend régulièrement "Oh mais pour Bidule, qu'est-ce que tu veux faire ?" ou "Il ne parle même pas français à la maison alors comment veux-tu ?" plutôt que "Voilà ce que je fais en classe pour aider Bidule".

    Et en effet, il FAUT des collègues expérimentés et des guides qui nous donnent la direction, la "norme" et surtout ce qu'on peut faire pour leur APPRENDRE des choses, ce qu'on peut mettre en place comme activité ou étayage, parce qu'en sortant de l'IUFM, de l'ESPE ou maintenant de l'INSPE, on ne sait pas, on.

    C'est tout à fait ce que j'ai pensé concernant le guide orange lorsqu'il est sorti. Enfin, il m'expliquait, il me donnait des choses concrètes, des directives sur ce que je devais faire en classe. Et pas des "Ah vous devez analyser vous-même votre manuel, vous devez construire votre progression".
    C'est sûr que ça agace un tantinet les profs chevronnés qui ont déjà tout vu et tout vécu, ont accumulé une expérience certaine avec leurs classes successives, de leur réexpliquer la base, et par la même occasion de les contraire à utiliser une méthode / voire les obliger à changer la leur, celle qu'ils utilisent depuis plusieurs années avec plus ou moins de succès.

    Nos connaissances sur l'apprentissage (de la lecture, de l'écriture ou autre domaine) sont presque inexistantes quand on sort des formations. La réflexion pédagogique, les choix qu'on doit faire, ça demande d'avoir déjà du recul et de l'expérience, avant on ne va pas réinventer l'eau chaude, on prend des méthodes existantes, on apprend, on pioche par-ci par là, on teste.

    On s'entraide comme on peut sur les réseaux et à l'école, car on est tous dans le même bateau face à 26 élèves qui doivent apprendre.
    Donc j'apprécie les conseils, les formations et les directives, car elles me donnent matière à réfléchir et à tester en classe.

    Voilà pour mon ressenti sur cette remarque.
    Grâce à TON blog, l'année dernière, j'ai pu dépasser cette représentation de ce qu'est enseigner, et ENFIN apprendre, comprendre, considérer que c'est normal que les élèves ne sachent pas et que c'est à moi de les aider, leur montrer et leur apprendre.
    Merci pour ça, et je continue la lecture de l'article.

    Pauline

      • Lundi 30 Septembre 2019 à 10:26

        Merci beaucoup pour ton long message, Pauline. Ne t'inquiète pas, je suis aussi passée par la phase "le pauvre, tu comprends, on ne peut pas lui demander la même chose qu'aux autres", même si, origine sociale oblige, cela me révoltait quand même un peu. Mais comme les IEN, CPC, collègues et syndicats en rajoutaient sur le thème, je tentais de me convaincre que, contrairement à ce que j'avais pensé au départ, les ZEP de l'époque n'avaient pas été créées pour réduire les écarts de naissance mais pour les accompagner à grands coups de projets "foot et crottes de chien" ou "fleurs de plastique et bonne conscience", sans les bassiner plus que de raison avec le français et les maths pour lesquels, les pauvres, ils n'étaient pas vraiment faits, n'est-ce pas.

        Et puis, je lisais Freinet et ses petits réfugiés espagnols, Chabrol et ses gamins de l'«école des pouilleux» à Alès où avait exercé son père pendant des années, je croisais des personnes de 40 ans et plus dont j'apprenais qu'elles étaient arrivées en France à 8 ou 9 ans, qu'elles avaient vécu dans des bidonvilles en périphérie des grandes villes, et qui parlaient le français sans accent et écrivaient quasiment sans fautes d'orthographe (ma première EVS, Marie, était dans ce cas-là), je voyais arriver des élèves de CE1 cassés dans ma classe rurale qui, au bout de 3 ou 4 mois, étaient frappés de résilience...

        Alors j'ai pris le mors aux dents, j'ai beaucoup lu et je me suis dit que non, ce n'était pas une fatalité. Pas plus que ce n'était une histoire de blouses grises, d'uniformes, de salut au drapeau et autres stupidités du même genre, stupidités qui ont fait rejeter (et font encore rejeter) l'idée qu'avec d'autres contenus et uniquement d'autres contenus, toutes pratiques et méthodes confondues, on obtiendrait la résilience au moins partielle des vécus sociaux de nos élèves.

        Et j'ai commencé à rédiger d'autres manuels, d'abord avec un groupe qui a trop viré blouses grises, tableau noir et écriture à la plume pour moi, puis seule, en accompagnant ces rédactions d'interventions ici ou sur les réseaux sociaux...

        Si je suis parfois amère et semble critiquer les collègues, sache que c'est bien malgré moi et que la seule chose que je critique, c'est cette évaluationnite de contenus creux, cette assurance que tout est joué dès le berceau et que, si le petit de maternelle qui arrive à trois ans pour sa première journée d'école ne s'intéresse pas d'emblée à l'étude comparée de "Petit Crapaud à l'école" et de "La rentrée de Jeune Loup" ou, pire, s'il ne tire pas profit de "Petit CroMagnon a loupé le bus" et de "La représentation de l'aurochs dans l'art rupestre", c'est foutu, on n'en fera plus jamais rien, vu que le fils de la collègue, qui, comme il se doit, est EIP, en fait ses délices.

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