• II. 2. MIse en route - MS/GS (1)

    2. Mise en route

    B) Chez les Moyens-Grands

    • Organisation de l’espace

    - Le coin de regroupement

    Jusqu’au Cours Préparatoire, ce coin doit être le point de focalisation des intérêts des élèves. En Moyenne Section et Grande Section, le maître opte pour la même installation qu’en Petite Classe : une enceinte matérialisée par des bancs, des chaises ou même un simple marquage au sol. Il évite les claustras qui cacheraient l’affichage lorsque les élèves de Grande Section seront assis aux tables d’écriture-lecture[1]. Les élèves assis doivent pouvoir faire face à un grand tableau destiné aussi bien à l’affichage qu’à l’écriture à la main. Devant ce tableau, une table basse permet d’exposer objets, matériaux, fruits, plantes, ou même provisoirement animaux en cage ou en bocal…

    Tout près se trouvent des étagères où sont rangés les livres et documents numériques de la bibliothèque de classe : albums, magazines, livres documentaires, CD, CD-Rom et DVD. Si la classe est équipée d’un accès à l’internet, un ordinateur portable est entreposé là, prêt à servir. On trouve aussi un lecteur de CD, équipé d’une prise USB.

    Le coin d’écriture-lecture placé dans le même secteur de la classe permettra en cours d’année d’utiliser le tableau pendant que les élèves de Grande Section y sont installés.

    - Les coins d’activités

    Le besoin de jeu des enfants de quatre ans fait partie des fondamentaux de la petite enfance. Celui des enfants de cinq ans, déjà plus engagés dans le travail-jeu cher à Freinet[2], est encore très important. Ce besoin doit être respecté et même favorisé. C’est pourquoi il est indispensable d’aménager une classe où l’on peut choisir, jouer, imaginer, expérimenter, créer, aussi bien en se rassemblant librement par petits groupes qu’en s’isolant quelque temps de ses camarades.

    • Jeux d’imitation

    Les coins de jeux d’imitation peuvent être un peu moins nombreux qu’en Petite Classe car l’intérêt des élèves pour les autres pôles d’activités de la classe va croître tout au long de l’année si bien qu’ils délaisseront sans doute de plus en plus les jeux d’imitation.

    Le plus intéressant est de réserver trois ou quatre emplacements et d’y faire tourner au cours de l’année trois ateliers d’imitation et un ou deux ateliers de constructions en volume[3] qui seront changés à chaque période. En début d’année, on peut par exemple débuter avec les coins dînette, piste routière, chambre d’enfants, Kaplas® et  briques en mousse.  

    • Activités motrices fines

    La partie de la classe réservée aux activités plastiques créatives, proche d’un point d’eau, comporte deux ou trois tables et une piste graphique pouvant servir de chevalet de peinture. Le matériel est à portée d’élèves. Le maître et l’ATSEM y ont préparé, en plus des matériaux de base et des outils nécessaires, tout le matériel utile au rangement et au nettoyage en autonomie après activité.

    Tout est prêt pour que, dès le premier jour, les enfants puissent dessiner, peindre, modeler, découper et manipuler fils et tissus. Les matériaux et outils choisis sont basiques[4] et le maître n’a pas prévu d’objectifs notionnels à atteindre. Son objectif est d’installer des repères et des habitudes dans un cadre sécurisant et facile à cerner.

    • Jeux sensoriels et mathématiques

    Les jeux sensoriels choisis pour la première période[5] sont installés dans un placard à casiers étiquetés par des symboles et des mots, écrits en minuscules scriptes ou cursives, afin que, très vite, chaque élève sache sortir et ranger le jeu qu’il a choisi. Le maître n’a pas prévu de jeux de société pour le moment car il ne s’attend qu’à une utilisation individuelle du matériel. Comme dans tous les autres niveaux, ces deux à trois semaines de mise en route visent avant tout l’acquisition de l’autonomie de chacun dans le cadre du groupe-classe. Tant que la cohésion du groupe n’ira pas de pair avec l’autonomie de chacun, il ne saura être question de chercher à installer l’autonomie de petits groupes autogérés et encore moins de réserver un des deux adultes à la gestion d’un seul de ces petits groupes pendant que les quatre autres[6] sont tenus de se bien se comporter sans aide ni soutien.

    • Écriture-lecture

    Autant il est souhaitable que les élèves de Moyenne Section finissent leur période d’aménagement avant d’entamer les apprentissages structurés nécessitant une progression linéaire[7], autant ces apprentissages seront vite réclamés par les élèves de Grande Section, prêts à entrer dans la période de travail-jeu.

    C’est pourquoi le maître a déjà prévu dans la classe un emplacement face à un tableau dédié à ces apprentissages. Les élèves de Grande Section y apprendront ainsi aisément à se repérer sur une feuille puis un cahier pour décoder et réaliser leurs premiers exercices écrits.  La place de chacun y est indiquée par une étiquette portant son prénom en écriture cursive[8]. Tout près, chaque élève dispose d’un endroit pour ranger ses travaux et son matériel de futur écolier.  

    - Vestiaires, salle de propreté, rangements

    Structurer ses déplacements vers les autres lieux de l’école peut encore être d’actualité même si, grâce à une, ou plus souvent deux ou trois années de scolarisation, la plupart des élèves ont acquis l’autonomie nécessaire pour réduire la durée de ces moments.

    Dans le vestiaire, les patères et casiers recevant pantoufles, écharpes, bonnets et gants sont repérés par un symbole et le prénom de l’enfant[9] écrits en écriture cursive. En classe, les trieurs à travaux, les porte-vue individuels des GS et les gobelets des enfants sont repérés de la même manière.  Tout est installé pour que chaque enfant puisse rapidement être autonome pour tous les actes de la vie quotidienne.

    • Emploi du temps

    Après la répartition horaire des parties collectives de l’école[10] lors du conseil des maîtres, l’enseignant établit un emploi du temps journalier simple[11], alternant les périodes d’activités selon un rythme immuable.

    La cohésion du groupe étant son premier objectif, c’est par des moments collectifs qu’il choisit de débuter chaque demi-journée. Il tient compte de la fatigabilité des enfants et prévoit pour chacun des quatre moments de la journée une durée et des objectifs compatibles avec les rythmes circadiens de ses futurs élèves. Ainsi, les activités d’écriture, de lecture et de mathématiques, dans ce qu’elles ont de plus exigeant intellectuellement sont placées pendant la matinée alors que leur partie ludique et créative est intégrée aux activités de l’après-midi.

    Ses élèves étant âgés de quatre ans huit mois et plus, il sait qu’ils se pourraient se passer assez vite des plages horaires de temps libre en autonomie. Néanmoins il fait en sorte qu’elles subsistent, afin que chaque élève ait à plusieurs reprises dans la journée l’occasion de s’extraire du groupe pour mener un projet personnel ponctuel, tout en les plaçant de manière à ce qu’elles puissent se réduire progressivement et céder la place à des moments collectifs plus structurés selon des projets communs de moins en mois ponctuels.

    • Progressions

    Si les plus jeunes de la classe en sont encore aux progressions individuelles en étoile qu’on ne peut pas mettre en cases[12], le maître sait que, souvent, les plus âgés ont maintenant aménagé leur personnalité. Ils ont désormais les moyens et l’envie de structurer leurs apprentissages pour les rendre plus efficaces.

    Ainsi, puisqu’ils savent dessiner, leur but est maintenant de rendre leurs dessins plus réalistes, plus organisés, de façon à être compris de tous.
    Ils ont compris le pouvoir magique des mots et cherchent à en apprendre toujours plus ; pour cela, ils tentent de les écouter plus finement et de les décortiquer : « Maîtresse, dans frayeur, on entend comme dans effrayé et dans effrayant. Alors, la frayeur, c’est quand on est effrayé par quelque chose d’effrayant. C’est comme la peur, mais en plus fort, parce que l’autre jour, on a dit qu’effrayé, c’était plus grave qu’apeuré. »

    L’apprentissage de tous ces mots nouveaux leur vient des livres dont ils analysent le sens avec leurs maîtres depuis leur entrée à l’école.
    Ils ont bien compris le pouvoir de ces petits symboles noirs qui en couvrent les pages et dont l’oralisation effectuée par celui qui sait les déchiffrer fait naître des images, des idées, des informations, des connaissances nouvelles.
    Ils conçoivent maintenant qu’eux ne savent pas[13] et espèrent en maîtriser bientôt l’usage comme ils rêvent de pouvoir consigner tout ce qu’ils ont compris autour des quantités.

    Seulement, ils sentent bien qu’en ne faisant que tourner autour du pot, ils n’avanceront pas. Ils ont parfois déjà vécu de nombreuses déceptions dans ce domaine et ont mal accepté le fait qu’on les observe comme des animaux de foire[14] sans jamais réellement les inviter à partager le savoir des lecteurs-scripteurs !
    Comme ils ont envie de progresser, vite et bien, ils acceptent avec joie les aides que le maître leur procure. Ils lui font confiance et plus tôt dans l’année il commencera, moins il risquera de créer chez ceux d’entre eux qui sont les plus mûrs ces faux savoirs[15] qui seront si difficiles à déraciner une fois installés.

    Pour les deux apprentissages à progression linéaire, il prévoit donc une méthode qu’il déroulera à heures fixes, tous les jours, tout au long de l’année selon un ordre précis et immuable.
    Si ces méthodes sont bien faites, elles seront utilisables dès le début de l’année puisqu’elles commenceront par de très courtes séances variées, basées sur le jeu, les déplacements et les manipulations et qu'elles établiront une relation affective avec un matériel agréable qui parlera aux enfants[16].

    Les élèves de MS qui le souhaiteront pourront, toujours en auditeurs libres, suivre tout ou partie de la séance collective. Le maître sait que ceux-ci se sentiront valorisés de jouer avec les grands mais il a bien conscience qu’à part exception, ils resteront au stade du jeu, se préparant à comprendre certaines notions mais restant incapables de suivre la progression.
    Son but n’est pas de les pousser à grandir de façon désordonnée en privilégiant l’acquisition de l’écrit au détriment des apprentissages moteurs et sensoriels mais de permettre aux plus grands de profiter des derniers apprentissages moteurs et sensoriels pour jeter leurs premiers jalons dans le domaine de l’apprentissage de l’écrit.

    • Rôle de l’ATSEM

    Après consultation du conseil des maîtres et de la charte des ATSEM décidée par la commune de rattachement de l’école, le maître dialogue avec l’ATSEM qui travaillera sous sa responsabilité. Il la met au courant des habitudes d’autonomie qu’il compte mettre en place. Il lui lit et commente l’emploi du temps et lui explique clairement ce qu’il attend d’elle à chaque moment :

    - aide matérielle aux élèves de manière à ce qu’ils apprennent à se passer rapidement de l’adulte et apprentissage des gestes d'hygiène et de vie pratique[17] ;

    - aide à l’encadrement du groupe lors des moments collectifs et toujours apprentissage des gestes techniques[18] ;

    - préparation des matériaux à utiliser pour les ateliers d’expression plastique et des documents ou objets utiles à l’affichage ou à l’exposition au coin de regroupement[19], photocopie d’exercices écrits à destination des plus grands

    - installation du matériel de jeux sensoriels et d’imitation accessible aux enfants ;

    - aide au rangement et nettoyage de tout ce qui a été manipulé, utilisé lors de la journée de classe ;

    - aide au classement des travaux d’élèves et reliure ou collage dans un cahier communiqué aux familles ;

    - prise en charge ponctuelle d’un ou plusieurs élèves lors de l’exécution d’un atelier selon un « cahier des charges » établi à l’avance.

    • Annexes :

    Dans la même série :

     Tous les chapitres déjà mis en ligne sont répertoriés dans la Table des matières   évolutive que vous trouverez dans la partie Sommaires.

    Pour la partie présente :
     I. Idées reçuesII.1. Deux niveaux dans la même classe  II. 2. B. Mise en route - MS/GS (1) ; II. 2. B. Mise en route - MS/GS (2) ; II. 2. B. Mise en route - MS/GS (3).

    Notes :

    [1] Voir Annexe III. Plans de classe.

    [2] « Il y a travail toutes les fois que l'activité – physique ou intellectuelle – que ce travail suppose, répond à un besoin naturel de l'individu et procure de ce fait une satisfaction qui est par elle-même une raison d'être. Dans le cas contraire, il n'y a pas travail mais besogne, tâche qu'on accomplit parce qu'on vous y oblige, et la chose n'est pas du tout comparable (L'Éducation du travail, déjà cité). »

    [3] Gros jeux sur le plan de classe.

    [4] Dessin sur piste graphique (quatre utilisateurs) : feuille de kraft blanc en rouleau couvrant une partie de la piste (environ 2 mètres) ; feutres moyens corps fin / Peinture (quatre utilisateurs): quatre feuilles Canson demi-raisin ; une couleur de gouache liquide ; quatre pinceaux (quatre utilisateurs) / Modelage (quatre utilisateurs) : quatre boules de pâte à modeler souple ; sous-mains plastifiés ou rectangles de revêtement de sol plastique pour éviter de tacher les tables/ Découpage-collage (quatre utilisateurs) : feuilles de magazine ; colle liquide + 4 pinceaux ou spatules ; feuille A3 papier machine à poser au centre d’une table / Atelier Fils et Tissus (quatre utilisateurs) : quatre pelotons de fil ; quatre carrés de tissu et quatre boules de cotillon.

    [5] Quelques encastrements pour les plus jeunes des MS, des puzzles de 5 à 30 pièces, des jeux de tris, d’invention et de reproduction d’algorithmes, du matériel permettant de travailler l’organisation de l’espace, du matériel Montessori…

    [6] Comme la classe comporte une partie des élèves ayant moins de cinq ans, l’effectif ne devrait pas dépasser 20 élèves, soit cinq groupes de quatre. Cependant, nous sommes souvent au-dessus de cette norme idéale et la mise en route sera d’autant plus longue que chaque enfant se sentira abandonné par un adulte qui se consacre à d’autres. En alternant moments collectifs et activités individuelles, chaque enfant se sent logé à la même enseigne que ses camarades et le maître peut garder toute sa vigilance pour le groupe.

    [7] Écriture-lecture, numération-calcul. Voir Annexe IV.

    [8] La première lettre peut être la majuscule cursive traditionnelle ou une majuscule simplifiée, inspirée de celle en majuscule dite bâton. En revanche, il vaut mieux que l’initiale ne soit pas une lettre minuscule, au risque de perturber l’apprentissage grammatical. Il y a une vie après l’école maternelle et il convient d’aider les élèves à y prendre des repères réutilisables.

    [9] Suivi de la majuscule du nom de famille en cas d’épidémies de Lucas, Raphaël, Léa ou Chloé (prénoms choisis parmi les plus donnés en France en 2014).  

    [10] Salles de motricité, de propreté, bibliothèque, cuisine, salle informatique, cour, jardin…

    [11] Voir suggestion d’emploi du temps en Annexe II.

    [12] L’image de la boule de neige peut aussi être utilisée pour expliquer comment se constitue naturellement, sans ordre préétabli, l’agrégat de savoirs, d’habiletés et de savoir-faire d’un enfant de moins de cinq à six ans. 

    [13] Contrairement à certains élèves de PS ou MS qui, encore tout empreints de toute-puissance enfantine, sont persuadés savoir lire et n’en démordent pas, même confrontés à l’échec.

    [14] Voir les vidéos sur le site suivant : http://www.enseignement.be/index.php?page=26707

    [15] Enfants qui confondent le nom des lettres et le son qu’elles produisent : Elle est allée se cacher devient L é alé se KH… Enfants qui récitent des phrases composées de synonymes et se contentent de l’à-peu-près que leur procure une mémoire uniquement auditive de la phrase écrite : Elle est allée se cacher devient cette fois La fille, il est allé se planquer, par exemple, ou encore, « lue » par le même enfant dix minutes plus tard : Léa est partie dans sa cachette.

    [16]      Les personnages de la Planète des Alphas en sont un bon exemple. Associés à la méthode  De l’écoute des sons à la lecture (T. Venot, Grip éditions), ils emmèneront tous les enfants de Grande Section sans exception vers la maîtrise approfondie du principe alphabétique sans même qu’ils aient l’impression à un seul moment de fournir des efforts disproportionnés. 
    J’ai tenté, à l’aide de mon amie Sophie Borgnet-Wiktor, de fournir à mes collègues de maternelle l’équivalent de cette méthode de découverte de l’écriture-lecture en publiant, toujours chez Grip éditions, Se repérer, compter, calculer en GS qui propose des séances quotidiennes de mathématiques basée sur la  résolution de problèmes associant connaissance du nombre, calcul, repérage dans l’espace, découverte des formes et grandeurs. 

    [17] Se boutonner, remonter une fermeture à glissière, nouer une écharpe, des lacets, attacher une boucle de ceinture ou de sandale, etc. 

    [18] Distribuer et ranger le matériel, trier les déchets, balayer, laver des pinceaux et une éponge, essuyer une table, remplir un pot de colle ou de peinture, …

    [19] Découpage, mise en page, plastification, réalisation de panneaux destinés à l’affichage…


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  • II. 2. Mise en route - PS/MS (3)

    En Petite Classe (3e partie)

    Premier jour de classe 

    Après-midi

    1) Acquisition de la propreté, sieste 

    Après la pause postprandiale, les plus jeunes enfants, mais aussi parfois quelques enfants de quatre ans arrivés très tôt à l’école le matin, ont besoin d’une sieste. Le maître qui tient à la qualité de l’accueil et à la prise en compte des individualités regroupe très brièvement toute sa classe, pour une activité chantée calme, avant de confier à l’ATSEM le soin d’aller coucher les enfants fatigués.

    Pendant ce temps, les plus âgés, qui sont généralement les plus résistants, après un passage aux toilettes, rendu fécond en échanges langagiers comme celui du matin, s’installent avec lui pour un court moment de repos, accompagné d’écoute musicale ou de la lecture d’un conte connu.

    2) Rythme des moyens :

    - S’organiser, aider, les premiers apprentissages ritualisés

    Ce moment, qui sera le seul réservé aux plus âgés dans toute la journée, devra cependant très vite devenir particulier à leur classe d’âge. La plupart des enfants commençant à sortir de ce C. Freinet nommait la période d’aménagement[1], il devient possible d’organiser avec eux une recherche collective, une observation poussée, suivie d’un exercice dirigé d’approfondissement ou d’entraînement.

    En ce début d’année, ce moment reste encore très imprégné de l’esprit Classe des Tout-Petits, et c’est par touches insensibles que le maître commence à installer l’environnement propice au passage à la période de travail. Son groupe des Moyens, grandement favorisés par le petit nombre, y découvrira ses capacités à observer le monde qui l’entoure et les richesses de la nature. Aux activités de recherche spontanée du matin, le maître ajoutera celles plus construites visant à développer et approfondir la conscience que les enfants ont des relations entre les éléments et leurs manifestations.

    En ces tout premiers jours, il se contente d’une observation simple, celle d’une plante ou d’un animal qui sera installée dans la classe en cette fin d’été, à moins que ce ne soit un objet technique qui permettra une action nouvelle sur une activité du quotidien. La conversation durera quelques minutes, juste le temps nécessaire pour que les plus dispersés des enfants du groupe aient fourni l’effort nécessaire pour se dépasser un petit peu. Le maître l’aiguillera discrètement vers les premiers essais d’analyse sensorielle[2] puis vers une synthèse des observations, orale pour le moment. Les premiers « outils pour structurer la pensée »[3] auront été favorisés et remarqués. Il aura encouragé l’écoute mutuelle, l’aide entre pairs, le dialogue.

    Cette observation terminée, selon l’intérêt qu’elle aura suscité, il adaptera l’emploi du temps et programmera ou non un travail-jeu[4] collectif ou des jeux-travaux[5] individuels. L’année scolaire est longue et rien ne sert de forcer le rythme des enfants. La systématisation viendra à son heure et chaque enfant y entrera avec joie lorsqu’il s’y sentira prêt.

    Les élèves de PS rejoignent le groupe au fur et à mesure de leur réveil. Le maître les accueille et les laisse choisir d’entrer ou non dans une activité.

    - Récréation          

    Comme le matin, surtout si certains petits sont en pleine phase de réveil.

    - Fin de journée, rites de cohésion

    Difficile d’organiser une fin de demi-journée désormais. En effet, si certaines écoles bénéficient encore d’après-midis de trois heures pleines, d’autres ont beaucoup moins, quand elles ne cumulent pas en plus les contraintes d’un rythme irrégulier bien peu propice à l’adaptation et à la sécurisation des enfants !

    Pour ceux de nos collègues qui ont encore la chance de pouvoir quitter leurs élèves, réunis en groupe-classe autour d’eux, comme des maîtres d’école maternelle et non comme des personnels précaires installés au moment des grands départs dans les halls des grandes gares, je propose un moment de conte, expliqué et commenté par les enfants eux-mêmes, les petits comme les grands[6], et joué ensuite, avec ou sans musique, à l’aide ou non de marionnettes ou de marottes.

    En jouant ainsi le conte, les enfants se l’approprient ; l’écoute dont ils ne sont pas toujours capables en restant statiques devient naturelle. La musique, choisie en fonction de l’ambiance du conte ou de ses particularités[7], les imprègne de façon naturelle et suscite l’amour du beau qu’on a tant de peine à développer lorsqu’on pratique l’enseignement morcelé par compétences aussitôt évaluées et oubliées. Les enfants se quittent après un moment collectif pendant lequel chacun a affiné ses capacités à se mouvoir et à exercer ses sens qui seront la clé de son autonomie. Le contrat est respecté. L’année scolaire commence sous les meilleurs auspices.

    Dans les autres écoles, il faudra jongler entre les animateurs, les ATSEM, les familles et quitter les élèves qui ne savent plus « à quel saint se vouer ». Le minimum à obtenir des autorités qui se tiraillent les enfants serait un petit moment de regroupement, pour trois mots, une image à contempler, une page de livre à écouter ou à regarder, jouée par la mascotte de la classe… Juste un petit moment d’amitié et de partage pour que les enfants n’aient pas l’impression d’être des colis qu’on déplace et qu’on manipule sans ligne directrice parce qu’ils dérangent…

    Premières semaines

    Le lendemain et les jours suivants, ce sera déjà un peu plus simple. Le maître conduira tranquillement les familles vers l’idée d’un accueil ailleurs qu’en classe. Pour le moment, il se basera sur les difficultés de séparation des plus timides pour encourager les parents à ne pas entretenir indéfiniment le déchirement de la séparation. En deux à trois semaines, soient dix à quinze jours d’adieux quotidiens, le problème doit être réglé. Les enfants[8] doivent avoir réalisé que ces séparations ne sont que très temporaires et donc sans danger d’abandon. 

    Le rythme des journées, toujours identique, est en cours d’acquisition. Le maître, et dans une moindre mesure l’ATSEM, s’emploient à aider les élèves à s’y conformer en le variant le moins possible. 

    1) Le groupe : incubateur des apprentissages

    Le regroupement du matin devient progressivement le point de ralliement de la classe. Les élèves savent qu’ils vont aller s’y installer à la suite du maître. L’habitude est prise de commencer par un rapide tour d’horizon des présents et des absents, notés à la va-vite par le maître sur le cahier d’appel. Ensuite, le maître indique quel jour nous sommes[9] et explique si c’est un jour d’école complet, moyen ou court. Cette information, plus importante que le nom de ce jour pour quelqu’un qui vit encore au jour le jour, est affichée, sous forme de symbole, sur le tableau du coin de regroupement.

    Puis chacun y raconte son histoire ou montre l’objet qu’il a rapporté de chez lui, s’il le souhaite. Le maître expose à son tour une image, une page d’album qu’il lit, un objet en rapport avec un événement évoqué la veille. Il commence ainsi à entraîner ses jeunes élèves dans une idée de continuité des apprentissages au fil des jours. Il cible ses interventions en fonction de ses interlocuteurs et, comme dans une famille où les âges s’échelonnent, ni les plus jeunes, ni les plus âgés ne sont gênés par le niveau de langue qu’il emploie.

    2) Règles de vie

    Les déplacements ritualisés sont bientôt parfaitement installés[10] et le maître comme les élèves profitent des temps de latence pour mener ces conversations à bâtons rompus qui assurent ce que les programmes scolaires baptisent pompeusement « compétence à échanger et s’exprimer ». Du plus jeune au plus âgé, chacun reçoit ce dont il a besoin dans un temps d’échanges informels où, bien vite, le maître a su repérer ceux qui ont besoin de plus d’attention et d’encouragements.

    Ainsi, tous les temps de la journée prennent leur place et assurent la prise d’autonomie de chacun. La cohésion du groupe s’installe d’elle-même et, en fin de cette période d’installation, chaque enfant connaît et peut nommer tous ses petits camarades. Les échanges vont bientôt pouvoir se charger d’une dimension instructive et les apprentissages commencer à se structurer. L’année scolaire est lancée. Elle prend désormais son rythme de croisière.

    Dans la même série :

     Tous les chapitres déjà mis en ligne sont répertoriés dans la Table des matières   évolutive que vous trouverez dans la partie Sommaires.

    Pour la partie présente :
     I. Idées reçuesII.1. Deux niveaux dans la même classe  II. 2. A. Mise en route - PS/MS (1)II. 2. A. Mise en route - PS/MS (2) ; II. 2. A. Mise en route - PS/MS (3).

    Notes :

    [1] Après la période de prospection tâtonnée (0 à 2 ans), période pendant laquelle l’enfant commence à organiser sa vie. Ses expériences tâtonnées se groupent et s’agglutinent encore autour de ses besoins physiologiques : il ne sort pas encore de lui-même où il a tout à faire encore et ne peut de ce fait se livrer à aucune activité suivie, qu’elle soit travail-jeu ou jeu-travail. (D’après C. Freinet, L’école moderne française, 1957)

    [2] Toucher, voir, écouter, sentir, goûter.

    [3] Taille, poids, forme, orientation spatiale, nombre et calcul.

    [4] Des dessins d’observation qui seront commentés en dictée à l’adulte et affichés ensemble, une exposition agencée par le groupe autour de l’objet découvert, un petit texte rédigé en commun et illustré de quelques photos, une construction collective mettant en pratique les découvertes effectuées pendant le temps d’observation collective…

    [5] Aux coins « patouille » et « jeux sensoriels », des jeux libres pendant lesquels les élèves exercent sans en avoir conscience leur motricité fine, leurs sens et leur créativité…

    [6] Règle d’or de la classe multi-âges : ce sont toujours les plus jeunes qui ont la parole les premiers.

    [7] Mimer un vol d’oiseaux, une galopade de chevaux, l’éclosion d’un bouton de fleur vient tout seul à tous les enfants si une musique appropriée accompagne leurs gestes…

    [8] … et leurs parents !

    [9] Sans quantième ni mois… Trois codes millénaires d’un coup, pour des enfants de moins de cinq ans, c’est horriblement indigeste !

    [10] Sauf enfant à problèmes comportementaux lourds qui aura besoin, sans doute encore très longtemps, d’un accompagnement personnalisé. Face à un tel enfant, les adultes non-formés que nous sommes ne peuvent qu’anticiper les facteurs de stress et d’excitation et faire en sorte que cela se passe le moins mal possible pour lui et pour tous ses petits camarades. L’accompagnement des familles qui devrait incomber à la Protection Maternelle et Infantile, à la Direction Départementale des Affaires Sanitaires et Sociales ou la Maison Départementale de la Personne Handicapée, retombe malheureusement bien souvent, surtout en l’absence de Réseau d’Aide Spécialisée pour l’Enfance en Difficulté, sur les épaules du maître, de l’ATSEM et des enfants qui partagent le même lieu de vie. Chaque cas étant un cas très particulier, le maître mot est l’adaptation des conditions de vie de cet enfant en fonction de ses difficultés propres et l’anticipation constante des facteurs de risques (agitation, bruit, excitation mais aussi trop grande concentration, immobilité trop longue, …) qui provoqueraient immanquablement une « crise »…


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  • II. 2. Mise en route - PS/MS (2) 

     En Petite Classe (2e partie)

    Premier jour de classe 

    Matinée

    1) Accueil des familles

    Le jour de la rentrée, dès l’accueil qui aura lieu exceptionnellement[1] dans la classe, le maître présente aux parents le lieu où évolueront leurs enfants. Cette organisation spatiale lui permet d’expliquer brièvement le rôle central du groupe dans la pédagogie qu’il compte adopter. Le matériel prêt à l’emploi l’aide à mettre en avant l’autonomie qu’il se propose de leur faire acquérir. L’exposé rapide de l’emploi du temps les rassure quant à la nécessaire différenciation qu’il établira entre les enfants, non seulement en fonction de leur âge mais aussi en fonction de leurs besoins personnels.

    Enfin, il leur explique qu’il sera toujours prêt à les recevoir mais que, le temps étant compté, il préfère que ces relations aient lieu en dehors du temps scolaire qu’il compte réserver en entier à leurs enfants. S’il a pu obtenir l’accord de ses collègues, il leur explique que, dès l’après-midi, l’accueil de chaque demi-journée aura lieu dans la cour, le préau ou la salle polyvalente où les enfants seront occupés à jouer librement, ce qui lui permettra de rester libre de communiquer avec les familles qui le souhaitent, tout en surveillant du coin de l’œil que tout ce petit monde évolue dans le calme et la convivialité. Il conclut son propos en distribuant une courte notice qui rappelle ces quelques informations et propose la date de la réunion de rentrée[1bis].

    2) Premières habitudes 

    Dans la classe, pour le moment, très peu de matériel est accessible. Les coins de jeux sont équipés sommairement, de façon à ce que la place de chaque objet soit facilement mémorisable. Le tableau d’affichage du coin de regroupement est vide. Sur la table d’exposition, on ne voit qu’un appareil photographique et la pile d’étiquettes plastifiées portant chacune les symboles prévus par le maître pour chacun. Le coin « patouille » ne propose que quatre feuilles blanches affichées sur les chevalets, un seul pot de peinture[2] pour chacune, des ciseaux et du papier de couleur[3], des boules de pâte à modeler bien souple, des pelotons de fil à tricoter et des morceaux de carton rectangulaire. Le coin de jeux sensoriels n’expose pour le moment que quelques encastrements, quelques puzzles très simples, des tableaux de piquage[4], des abaques sur lesquels enfiler des anneaux ou de grosses perles.   

    3) Déplacements, vestiaire et salle de propreté

    Une fois les familles sorties de l’espace scolaire, c’est à l’accueil des enfants que le maître peut enfin penser ! Il commence par organiser les déplacements puisque, dès l’après-midi, c’est par cette activité motrice compliquée que débutera la demi-journée.

    Cela tombe bien puisque, coéducation oblige, la séance de langage au coin de regroupement doit être écourtée et qu’elle ne consistera qu’à distribuer à chaque enfant son étiquette[5] pour que, accompagné de ses camarades, du maître et de l’ATSEM, il aille l’afficher près du porte-manteau qu’il aura choisi dans le vestiaire.

    L’enseignant profite de ce moment pour installer quelques habitudes : une mise en rang à peu près droit grâce à la prise en charge d’un petit par un grand, un déplacement du rang débuté par le maître et clos par l’ATSEM[6], l’observation attentive de la consigne exécutée par le maître qui verbalise ce qu’il fait : « Je pose mon étiquette au-dessus du porte-manteau. Je la tiens bien droite d’une seule main. Je prends la punaise que me tend …[7] et je la pique dans l’étiquette. J’appuie bien fort sur la punaise avec mon index et je lâche. »

    Aidé de l’ATSEM, il aide ensuite tout ce petit monde à se consacrer, dans le calme, à cette première tâche scolaire. Lorsque les Moyens, plus rapides et plus autonomes, ont fini, ils aident les Petits dont ils ont pris la charge dans le rang à exécuter cet exercice difficile pour eux.

    Dans la salle de propreté, où le groupe se rend ensuite, toujours en « petit train », les premières habitudes s’installent aussi tout de suite. S’il a la chance d’avoir un espace dans lequel les élèves peuvent s’asseoir en attendant leur tour, il les y installe. Les plus jeunes sont pris en charge les premiers par l’ATSEM qui les aide à se déshabiller, à s’installer, à se rhabiller et à se laver et essuyer les mains avant de les asseoir à leur tour pendant le temps d’attente. Plus les enfants sont grands et autonomes et moins le temps d’attente sera long, il est donc nécessaire d’autonomiser le plus rapidement possible les plus âgés dont les apprentissages fondamentaux sont déjà ailleurs que dans la gestion des besoins naturels.

    Le temps d’attente peut devenir actif pour les aînés s’il est consacré à une causerie à bâtons rompus, sous forme de « quoi de neuf » personnalisé. Comme il doit nécessairement avoir lieu dans le calme, les enfants apprennent du maître à moduler l’intensité de leur voix, à s’écouter, à vivre près les uns des autres sans éprouver le besoin de se bousculer, de se couper la parole, d’attirer l’attention des autres par des pitreries.

    4) Premiers apprentissages :

    - Dessin

    De retour en classe, c’est l’heure du dessin libre. Toutes les tables sont mobilisées pour cet exercice. Chaque élève s’assoit à la table de son choix et reçoit une feuille sur laquelle sont inscrits son signe et son prénom en script (majuscule pour l’initiale, puis minuscules). Les crayons[8] sont étalés au milieu de la table et le pot de rangement mis de côté. Pendant quelques minutes, chacun crayonne. Le maître et l’ATSEM circulent entre les tables. Ils retirent un capuchon de feutre serré convulsivement dans une main et place celle-ci à plat sur la feuille pour la maintenir. Ils replacent un crayon correctement entre la pulpe du pouce et le côté de la dernière phalange du majeur d’un enfant de plus de quatre ans et lui montrent comment le corps du crayon repose sur le pli entre le pouce et l’index qui, lui, doit pouvoir rester libre. Ils rebouchent un feutre abandonné sur la table et font écouter le petit bruit qui confirme que le capuchon est bien placé. Enfin, ils écoutent les commentaires des enfants, les notent brièvement avant que l’enfant n’ait fini. Chaque élève est accompagné à son casier où, avec l’aide d’un adulte, il range son œuvre, à l’envers, pour que la pile soit dans l’ordre chronologique lorsqu’en fin de mois ou de période, on collectera ses travaux pour les communiquer aux familles.

     Les plus petits ont très vite fini. Les élèves plus âgés étant encore très occupés, il est facile de les encourager dans leur prise d’autonomie. Les deux adultes ont le temps de les accompagner un à un à leur casier puis vers un coin de jeux d’imitation que les enfants choisiront si possible eux-mêmes. Leur temps de concentration est déjà bien largement entamé par toutes ces nouveautés et ils doivent maintenant se détendre dans un univers qui leur rappelle la maison et leurs habitudes.

    Pendant ce temps, les plus grands finissent l’un après l’autre leurs dessins, ils racontent au maître ce qu’ils ont représenté puis écoutent attentivement les consignes de rangement concernant leurs dessins et le matériel. Pour eux, pas de coins de jeux pour le moment, les pots à crayons sont contrôlés, chaque tablée s’affaire à reboucher soigneusement les feutres avant de les ranger et passe un coup d’éponge humide sur les tables. Puis, ils vont chercher « leurs » petits et viennent constituer le rang qui les conduira dans la salle de motricité.

    - Motricité

    La séance de motricité, très simple, dans une salle la plus dégagée possible, consistera, elle aussi, à faire acquérir les premières habitudes de cohésion et d’autonomie. Quelques petits rituels permettront de structurer l’activité du groupe dans cet univers différent, forcément déstabilisant pour les enfants. L’installation se fera après qu’une ronde[9] constituée avec l’aide de l’ATSEM se sera assise au sol. Alors le maître présentera un matériel et un seul. Pour ce premier jour, ce seront des balles de différents diamètres et matières.

    Chaque élève en recevra une qu’il pourra aller manipuler librement. Enseignant et ATSEM circuleront à nouveau dans la pièce, rappelant à l’ordre un enfant trop remuant, encourageant au contraire à agir un enfant plus renfermé. Après quelques minutes, le maître rappelle tout le monde près de lui par un signal qui restera le même toute l’année scolaire. Les récalcitrants sont ramenés vers le groupe individuellement, avec douceur et fermeté. La ronde est reconstituée et le matériel rangé dans les caisses prévues à cet effet.

    Une autre activité sera mise en place, portant par exemple sur les modes de déplacements. Son but sera sans doute de commencer à observer pour les perfectionner quelques apprentissages moteurs. Mais le plus important restera, encore pour quelques semaines, d’installer l’idée que chacun fait partie d’un groupe d’enfants qu’il doit connaître car c’est au sein de celui-ci qu’il va apprendre. La deuxième idée qui, elle, découle intuitivement des apprentissages moteurs engagés grâce au matériel et aux actions proposées, c’est que chacun doit acquérir ces mouvements fluides, précis, organisés desquels naîtront leur autonomie et leur exercice de la liberté.

    C’est pourquoi le maître n’a pas prévu pour ces premiers jours d’exercices précis dans un univers compliqué[10]. Au cours de ces activités très simples visant à s’approprier le matériel et les lieux, chaque enfant, qu’il ait deux ans ou quatre ans et demi bien tassés, y trouve son compte.

    Si les plus jeunes couvent leur balle serrée contre leur cœur, s’ils peinent à marcher sur la pointe des pieds même si le maître leur donne la main, les plus grands commencent à adapter leurs gestes en vue de rendre efficace leur projet encore ponctuel :

    « Je lance ma balle et hop ! je la rattrape… Je lance, je rattrape, je lance, je rattrape… Tu as vu, maîtresse ?

    ― Et moi, je marche comme les Indiens sur le sentier de la guerre… Comme ça, je pose juste la pointe du pied… Il faut mettre les bras comme ça pour ne pas tomber… Ah là là, c’est dur ! Je me baisse un peu et je regarde si je ne vois pas de bisons, peut-être… Tu viens, Kalian ? Suis-moi, on va dire qu’on va attaquer les bisons, là-bas ! Oh mais voilà d’autre Indiens ! Vous venez ? Allez, on fait une grande file comme ça… Chchchuuuuut ! Faut pas parler fort, ils vont nous entendre ! »

    En fin de séance, après un ultime regroupement qu’il clôturera par un jeu de doigts chanté par exemple, le maître entraîne ses élèves vers le vestiaire afin qu’ils s’équipent pour la récréation. L’ATSEM ramènera les plus jeunes à la salle de propreté et les encouragera à parler pour demander à satisfaire leurs besoins naturels.

    - Récréation

    Le maître profite des premiers jours de classe pour installer l’habitude de déplacements dans le calme, en groupe rapproché et coordonné. Si les habitudes locales le réclament, il organise un rang par deux ou un petit train, avec élèves en file indienne.

    Si cela correspond aux habitudes de l’école, il restera dans la cour pendant ces premières récréations, pour rassurer ses plus jeunes élèves qui ont besoin du repère affectif qu’il constitue pour eux dans cet univers inconnu.

    - Activités sensorielles, psychomotrices et de socialisation

    La fin de matinée est proche. Les élèves, surtout les plus jeunes, commencent à n’en plus pouvoir de la collectivité et des activités dirigées. C’est pourquoi, après un passage collectif dans la salle de propreté où les enfants pourront aussi boire, le temps qui suit la récréation est un temps d’activités libres, à l’intérieur d’un cadre structuré.

    En ce début d’année, il est n’est pas encore foisonnant de possibilités pour que les plus jeunes ne s’y égarent pas définitivement, confondant remue-ménage désordonné et effort librement consenti en vue d’obtenir un mieux-être global. Ce dépouillement volontaire permettra aussi aux plus âgés, peut-être déjà intuitivement conscients de l’intérêt d’une construction interne structurée, de prendre les premières marques sur lesquelles ils pourront s’appuyer.

    Les élèves ont le choix, en toute liberté, entre les coins de jeux d’imitation, ceux d’activités sensorielles ou encore de « patouille ». Les plus jeunes sont encouragés dans leur choix par le maître ou l’ATSEM qui les poussent à se diriger vers une activité qui semble convenir à ce qu’ils ont déjà perçu de leur personnalité. Un élève calme sera installé devant des abaques sur lesquels il pourra empiler des perles ; on confiera à un autre, plus remuant, un gros camion dont il pourra remplir la benne de cubes de mousse ; un troisième, très inhibé, sera accompagné par le maître qui s’installera près de lui, à la bibliothèque, pour lui montrer les images d’un livre. 

    Les élèves de MS auront besoin d’un autre encadrement, surtout si, forts de leur expérience de l’école maternelle, ils profitent de ce moment libre pour toucher à tout, commençant mille choses et laissant tout en plan. C’est là que, comme dans une classe à un seul niveau, la présence de deux adultes peut être précieuse ! L’intervention de l’un comme de l’autre a juste été facilitée par le dépouillement des coins et l’absence de cahier des charges au niveau de la manipulation des matériaux d’arts plastique.

    Quatre enfants peignent sur les quatre feuilles affichées, d’autres manipulent qui, la pâte à modeler, qui, les ciseaux et le papier de couleur, qui encore, les pelotons de fil qu’ils enroulent autour d’un morceau de carton… Un seul adulte suffit pour superviser que tout se passe bien, tout comme un seul suffit à faire ramasser un jouet qui tombe à la dînette ou à équilibrer une tour qui penche un peu trop dans le coin des jeux de construction.

    Et puis, si l’atmosphère devient par trop volcanique, tout est vite rangé, avec l’aide active des adultes qui savent qu’en ces tout premiers jours de classe, il n’y a pas encore d’habitudes.

    S’il y a un objectif à écrire sur le cahier-journal pour cette première quinzaine, c’est : Se familiariser avec le fonctionnement de l’école. Le chahut, le remue-ménage, le brouhaha ne font pas partie du fonctionnement prévu pour l’école, il est donc normal d’interrompre un moment qui les encourage ou les entretient.

    Le moment de jeux libres est fini, à l’heure prévue ou un peu plus tôt, et la matinée s’achève comme prévu par un moment collectif qui n’exige pas d’efforts incompatibles avec la fatigue des enfants en cette fin de demi-journée.

    - Musique, chant 

    Le maître regroupe ses élèves et entonne, doucement, une comptine très simple. Il s’accompagne de gestes pour capter l’attention des plus jeunes. Dès qu’il a fini son chant, il le raconte, en modulant sa voix. Si les plus grands reprennent avec lui, il les encourage, leur pose des questions, joue à établir un écho avec eux. Les gestes l’aident, il les fait répéter.

    Moments de chant et d’écoute musicale s’enchaînent calmement jusqu’à l’arrivée des premiers parents. Ceux-ci récupèrent leurs enfants, après quelques mots du maître qui reste au milieu de ses petits. Lorsqu’ils reviendront en début d’après-midi, un nouveau moment de chant jouera son rôle de retour à la cohésion du groupe avant la séparation rendue nécessaire par des besoins physiologiques différents selon l’âge.

    (À suivre, l'après-midi)

    Dans la même série :

     Tous les chapitres déjà mis en ligne sont répertoriés dans la Table des matières   évolutive que vous trouverez dans la partie Sommaires.

    Pour la partie présente :
     I. Idées reçuesII.1. Deux niveaux dans la même classe  II. 2. A. Mise en route - PS/MS (1)II. 2. A. Mise en route - PS/MS (2) ; II. 2. A. Mise en route - PS/MS (3).

    Notes :

     [1] Si possible… car nous savons que les résistances sont fortes, y compris chez nos collègues, et que les habitudes, vieilles pourtant seulement d’une vingtaine d’années, sont bien ancrées dans l’imaginaire collectif !

    [1bis] Au moins deux à trois semaines après la rentrée des classes pour que, déjà, quelques habitudes soient prises et que le contact soit réellement établi entre les enfants et le maître.

    [2] Si cette peinture est bleue, on pourra à peu de frais faire croire à la communauté enseignante et à sa hiérarchie, friande de références artistiques dès le berceau, qu’on travaille l’œuvre de Matisse

    [3] Et là aussi... 

    [4] De type « Coloredo ».

    [5] Si, sur le verso de l’étiquette, on a pensé à indiquer le prénom et le nom de famille de l’enfant, la distribution sera rapide et les enfants ne s’impatienteront pas.

    [6] Le fameux « petit train » des écoles maternelles que les adultes ont tendance à trouver ridicule mais que les enfants apprécient sans barguigner !

    [7] Le maître a choisi de se présenter par son nom de famille précédé de M. ou Mme, son prénom ou l’appellation locale habituelle (Monsieur, Maître, Madame, Maîtresse, ...). Il en est de même pour l’ATSEM.

    [8] Feutres moyens ou crayons de couleur très gras, à corps fin pour éviter une préhension palmaire prolongée au-delà des premiers mois de classe du fait d’un diamètre trop important par rapport à la taille des doigts d’un enfant.

    [9] Après proposition en conseil des maîtres, une ellipse a été tracée au sol ; elle permet d’aider les élèves à s’approprier l’installation de cette « ronde » bien difficile à obtenir sans repère visuel. 

    [10] De plus en plus, nos collègues installent dès les premiers jours de classe des parcours très élaborés répertoriant toutes les formes de sauts, de lancers, de grimpers, d’équilibres, etc. Les enfants s’y perdent car ils n’y trouvent pas leur compte. Si ce type d’organisation peut commencer à s’envisager pour des classes de fin de maternelle ou mieux, d’élémentaire, cela engendre chez des enfants trop jeunes, incapables d’effectuer les actions prévues et de s’organiser rationnellement, chahuts, activités désordonnées, détournements du matériel à des fins plus conformes à leurs capacités motrices (jeter le matériel, le mordiller, entasser un « trésor de guerre » qu’on défend ensuite chaudement contre ceux qui cherchent à se l’approprier). Ceci est ensuite bien difficile à faire disparaître et ces comportements s’installent parfois durablement chez certains enfants.

     


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  • II. 2. Mise en route - PS/MS (1)

    2. Mise en route

    La cohésion du groupe et l’autonomie matérielle de chaque individu, c’est ce que l’enseignant installera et cultivera dès les premiers jours dans sa classe à deux niveaux. Et, s’il tient à ce que ses élèves profitent rapidement des avantages que cela leur procurera, il sait que ce n’est pas en attendant que les élèves décident d’eux-mêmes des règles de vie ou de l’organisation du travail à mettre en place qu’il gagnera du temps. Dès avant la rentrée, il a réfléchi à l’organisation générale de sa classe et c’est dans un monde organisé qu’il a installé ses élèves.

    A) En Petite Classe[1]

    • Organisation de l’espace[2]

    L’espace au sol de la salle de classe est dégagé, un grand coin de regroupement est prévu, près d’un tableau d’affichage à hauteur d’enfant. Près de ce dernier, il a aménagé une bibliothèque équipée de rayonnages, de bacs, de fauteuils et d’une table de lecture.

    Deux ou trois tables ovales à six places sont installées près des étagères à matériel destiné à l’exercice de l’expérimentation et de la créativité plastique[3]. D’autres, individuelles ou collectives, sont installées près des placards ou sous des étagères contenant le matériel de jeux sensoriels[4]. Le nombre global de places assises correspond au nombre d’élèves scolarisés dans la classe[5].

    Une ou plusieurs pistes graphiques pouvant servir de chevalets de peinture occupent 3 à 4 mètres de longueur de mur, sur une hauteur d’un mètre environ.

    Enfin, plusieurs coins de jeux sont aménagés et clairement balisés. Ils peuvent accueillir par exemple (par roulement dans l’année) : une cuisine équipée, une chambre pour animaux en peluche et poupées, un établi avec ses outils, un garage et une piste routière agrémentés de véhicules variés, une ferme avec ses animaux, un zoo, une gare, des gros jeux de construction qu’on peut installer silencieusement au sol grâce à des tapis individuels. En ce début d’année, il a privilégié trois coins qui rappellent le plus la vie quotidienne : cuisine, chambre d’enfants, garage et piste routière et un quatrième, plus éloigné du quotidien : zoo, ferme ou établi, par exemple. 

    - Le coin de regroupement

    Le coin de regroupement sera le lieu central de sa pédagogie, l’endroit privilégié où s’effectuera l’accueil[6]  du matin et de l’après-midi. Son enceinte en est matérialisée par des bancs, des chaises ou des claustras très bas[7]. Les élèves pourront y faire face à un grand tableau destiné aussi bien à l’affichage qu’à l’écriture à la main. Devant ce tableau, une table basse permettra d’exposer objets, matériaux, fruits, plantes, ou même provisoirement animaux en cage ou en bocal… En dehors des moments de regroupements, sa surface pourra être utilisée pour déplier des tapis de jeux individuels ou de petits groupes.

    - Rangements des effets personnels

    Dans le vestiaire, chaque porte-manteau sera bientôt agrémenté d’un dessin très simple différent de tous les autres[8].  Dans la classe, on retrouve ces mêmes signes distinctifs sur un trieur à casiers. Ces signes se retrouveront ensuite sur tous les objets attribués à chacun des élèves : cahiers de liaison, gobelets, sacs à pantoufles, casiers à gants et bonnets, etc. Sur le bureau du maître, est affichée la liste des élèves[9] sur laquelle chacun de ces petits symboles correspond à l’un des enfants.

    • Emploi du temps

    Après la répartition horaire des parties collectives de l’école[10] lors du conseil des maîtres, l’enseignant a établi un emploi du temps journalier simple[11], alternant les périodes d’activités selon un rythme immuable.

    La cohésion du groupe étant son premier objectif, c’est par des moments collectifs qu’il a choisi de débuter et de clore chaque demi-journée. Il a tenu compte de la fatigabilité d’enfants si jeunes et prévu pour chacun de ces quatre moments collectifs une durée et des objectifs compatibles avec les rythmes circadiens de ses futurs élèves.

    Les activités favorisant l’autonomie de chacun faisant partie de son projet pédagogique, il les a intégrées à son emploi du temps comme des moments d’apprentissage. Enfin, parce qu’il sait qu’avant cinq ans, les différences individuelles sont souvent très importantes sans que cela ne présume en rien des capacités futures de chacun, il a prévu de longues plages horaires pendant lesquelles l’enfant, en tant qu’individu, apprend à son rythme, dans l’ordre qui lui convient, par l’activité, l’échange avec ses pairs, le dialogue avec l’adulte.

    • Progressions et évaluations

    Les rythmes individuels prenant encore largement le pas sur le rythme d’apprentissage collectif, le maître n’a mis en place aucune progression d’étape pour le moment. En revanche, il connaît sur le bout des doigts les connaissances et capacités qu’il compte faire acquérir d’ici la fin de l’année pour ses deux niveaux d’enseignement. Cela lui permettra tout au long de l’année de se laisser guider par les objectifs de ses élèves et leur irrépressible besoin de grandir, sans risquer de faire des impasses sur telle ou telle compétence essentielle.

    Il n’a pas prévu non plus de livrets d’évaluation, même cachés sous l’appellation de cahier individuel de réussites. Ses élèves grandiront forcément et leurs progrès suivront cette croissance, immanquablement. Il sait bien qu’ils n’ont nul besoin d’un cahier pour consigner ce qu’ils considèrent comme leurs réussites. Ils ont leur voix, claironnante, et sauront très bien tout seuls découvrir la chansonnette que tous les enfants entonnent lorsqu’ils sont fiers d’eux : « Eh ben moi, je sais faire… du vélo… sans rouleeeet-teuh !... Nananère ! »

    En revanche, il est prêt à les accepter tels qu’ils sont, avec leurs intérêts et leurs lenteurs de tout-petits, ne sachant parfois ni parler, ni écouter, ni dessiner, ni chanter, ni raconter, ni… et pourtant susceptibles de tant apprendre, tant comprendre qu’on peut dire que leur âge est celui des plus grands exploits ! Pour cela, toute l’année scolaire, il se tiendra près d’eux, avec eux, à leur écoute, tous ses efforts consacrés à les encourager, les aider et les soutenir sans jamais les brusquer ou les juger.

    • Rôle de l’ATSEM

    Après consultation du conseil des maîtres et de la charte des ATSEM adoptée par la commune de rattachement de l’école, il a dialogué avec l’ATSEM qui travaillera sous sa responsabilité. Elle a été mise au courant des habitudes de cohésion et d’autonomie qu’il compte mettre en place dès les premiers jours. Il lui a lu et commenté l’emploi du temps et lui a clairement expliqué ce qu’il attend d’elle à chaque moment :

    - aide matérielle aux élèves de manière à ce qu’ils apprennent à se passer rapidement de l’adulte dans les tâches les plus simples[12] ;

    - aide à l’encadrement du groupe lors des moments collectifs ;

    - préparation des matériaux à utiliser pour les ateliers de « patouille » et des documents ou objets utiles à l’affichage ou à l’exposition au coin de regroupement ;

    - installation du matériel de jeux sensoriels et d’imitation accessible aux enfants ;

    - rangement et nettoyage de tout ce qui a été manipulé, utilisé lors de la journée de classe ;

    - classement des travaux d’élèves et reliure ou collage dans un cahier communiqué aux familles ;

    - prise en charge ponctuelle d’un ou plusieurs élèves lors de l’exécution d’un atelier selon un « cahier des charges » établi à l’avance.

    (À suivre, le premier jour de classe)

    Annexes :

    Dans la même série :

     Tous les chapitres déjà mis en ligne sont répertoriés dans la Table des matières   évolutive que vous trouverez dans la partie Sommaires.

    Pour la partie présente :
     I. Idées reçuesII.1. Deux niveaux dans la même classe  II. 2. A. Mise en route - PS/MS (1)II. 2. A. Mise en route - PS/MS (2) ; II. 2. A. Mise en route - PS/MS (3).

    Notes :

    [1] Classe de Petite et Moyenne Sections, regroupant des élèves de 2 à 4 ans.

    [2] Voir Annexe III, A. Plans de classe.

    [3] Plus modestement définies, ces activités répondent au nom de Patouille et regroupent le dessin, la peinture, le découpage, le modelage, le collage mais aussi le tressage, le tissage, le piquage ou toute autre activité permettant d’exercer conjointement le sens du toucher et celui de la vue afin de mener l’enfant à affiner sa motricité et sa perception visuelle.

    [4] Jeux d’enfilages, de laçages, encastrements, mosaïques, puzzles, dominos, lotos grâce auxquels l’enfant exerce en même temps que ses doigts sa capacité à distinguer et marier les couleurs, à reconnaître formes et grandeurs, à concevoir des algorithmes et à les reproduire, à reconnaître et nommer figures, solides, relations spatiales, couleurs, tailles, …

    [5] Il serait d’une importance capitale que ce nombre n’excède jamais vingt, comme dans toute classe recevant des enfants de moins de cinq ans. On pourrait dans un premier temps tolérer entre vingt et vingt-cinq élèves dans un simple niveau mais, si l’on regroupe des enfants de deux ans à quatre ans neuf mois au début de l’année scolaire, il est important que cela se passe dans les conditions les meilleures : trois ou quatre « tout-petits », cinq ou six « petits » et environ une dizaine de « moyens ».

    [6] Au besoin, si l’accueil a encore lieu en classe, les parents qui y amèneront leurs bambins seront gentiment conviés à quitter la pièce au plus vite pour ne pas déranger la singulière alchimie qui est en train de créer, à partir de vingt et un individus disparates, un groupe-classe avec sa vie propre, ses aventures, ses découvertes, ses acquisitions.

    [7] Plus tard dans l’année scolaire, un simple balisage au sol pourra convenir et libérer l’espace au sol.

    [8] Un soleil, une lune, un arbre, une marguerite, une auto, un bonnet à pompon, des lorgnons, un bonbon, une sucette, une pomme, …, tous stylisés à base de figures géométriques simples, de façon à ce que très vite, les élèves de Moyenne Section puissent, sans peine, s’en servir pour signer leurs œuvres.

    [9] Prénom et nom de famille pour aller plus vite lorsqu’il s’agit de communiquer rapidement avec un parent venu chercher son enfant. « Madame la maman de Pierre », ça a toujours un petit côté bizarre et il n’est pas difficile d’apprendre vingt noms de famille comme on a appris vingt prénoms.

    [10] Salles de motricité, de propreté, bibliothèque, cuisine, salle informatique, cour, jardin…

    [11] Voir suggestion d’emploi du temps en Annexe II.

    [12] Déshabillage, suspension des vêtements, enfilage et boutonnage de plus en plus autonomes des vêtements, passage aux toilettes, lavage des mains, capacité à se déplacer calmement, sans courir ni bousculer, rangement du matériel utilisé et des travaux réalisés, nettoyage de l’espace de travail de plus en plus autonome…

     

     

     


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  • II. Deux niveaux dans la même classe (1)
    Merci à Hellokids pour cette BD parfaitement adaptée à la situation.

    1. Rentrée des classes

    C’est la rentrée des classes. Après l’accueil des parents, les langues vont bon train…

    « C’est catastrophique ! Comme il y a trop d’enfants de Petite Section mais pas assez pour en faire deux classes, certains enfants de trois ans iront en classe dans la même salle et avec la même maîtresse que ceux de Moyenne Section ! Ils parlent même d’y mettre des tout-petits qui ont à peine deux ans…

    – Oh ! Mais c’est terrible ! Cela veut dire que les petits n’iront pas à la sieste ? Et puis, ils ne vont jamais arriver à suivre.

    – Mais enfin, ils ne vont pas retarder les moyens pour s’occuper des petits, quand même ! Sinon, le mien qui est déjà très en avance va s’ennuyer.

    – Moi, en tout cas, je demande un rendez-vous à la directrice. Je ne veux pas que ma fille vienne à l’école pour faire la sieste.

    – Non, mais ne vous inquiétez pas. Je pense que la maîtresse s’occupera des plus âgés et qu’elle laissera les petits à l’ATSEM. De toute façon, pour ce qu’ils font à cet âge-là !

    – Dans ces cas-là, j’enlève le mien. Il retourne chez la nounou dès demain. Au moins, là, il aura une adulte presque pour lui tout seul… ».

    Deux ou trois années plus tôt, à la rentrée de septembre 2015, pendant le conseil des maîtres de l’école voisine, une oreille indiscrète entendait : 

    « Non mais c’est impossible !

    – En tout cas, moi, je ne la prendrai pas !

    – Même si on la charge moins ? On pourrait…

    – Non ! Pédagogiquement, c’est infaisable.

    – En plus, elle sera à cheval sur deux cycles !

    – Oui, c’est vrai, ça… Le CE1, c’est cycle 2, et le CE2, c’est cycle 3. On n’a pas du tout les mêmes objectifs[1].

    – À moins qu’alors, on mette une partie des 2010 avec les 2009 ?

    – Quoi ? Des CP avec des CE1 ?

    – Ah non, c’est infaisable ! L’enjeu de la lecture est bien trop important. Ils seront noyés… »

    La conversation dura des heures et des heures sans que jamais personne n’arrivât à se mettre d’accord. Et ce n’est qu’à la toute fin de l’année scolaire qu’on décida qu’on mettrait le collègue fraîchement nommé devant le fait accompli et qu’il hériterait d’une classe de 8 élèves de CE1 et 17 de CE2…

    Deux à trois semaines après la rentrée, le temps que tout le monde ait pris ses marques, si ces deux classes ont été prises en charge par des collègues sûrs de leurs méthodes et conscients des enjeux de chacun de ses deux niveaux, les discours auront radicalement changé.

    Du côté des parents de maternelle, on se réjouira de la bonne intégration des enfants, de leur envie d’aller à l’école, des premiers progrès accomplis, de l’ambiance chaleureuse qui règne dans leur classe. 

    Du côté des enseignants d’élémentaire, les réactions seront plus mitigées. Il n’est pas facile d’admettre qu’on a eu tort et que, finalement, la catastrophe annoncée de façon certaine n’a pas l’air de se profiler à l’horizon.
    Et il sera encore plus dur de reconnaître en fin d’année scolaire que, finalement, à exigences et contenus égaux, les élèves de la classe à double niveau auront peut-être même un petit avantage dans le domaine de l’autonomie et de la prise de responsabilités.

    Dans la même série :

     Tous les chapitres déjà mis en ligne sont répertoriés dans la Table des matières   évolutive que vous trouverez dans la partie Sommaires.

    Notes :

    [1] Eh oui, les cycles, c’est un peu comme la chronobiologie ! Ça va, ça vient au gré des lubies des adultes… Il fut un temps où, après avoir fait partie pendant plus d’un siècle du même Cours Élémentaire, les classes de CE1 et CE2 appartenaient pour la première au Cycle des Apprentissages Fondamentaux et pour la seconde à celui des Approfondissements… Les voici à nouveau tous deux rassemblés… jusqu’à la prochaine fois !


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