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II. 2. C. Mise en route - GS/CP (3)
Dans la Grande Classe (3e partie)
Premier jour de classe
Après-midi
1) Musique, chant :
Quinze minutes de détente et d’écoute pour commencer[1]. Le maître enchaîne exercices respiratoires, vocaux, chant choral et écoute instrumentale, à raison de quelques courtes minutes de chaque. Il y intègre le tout premier exercice de préparation à la lecture des élèves de Grande Section[2] puisqu’il consiste à reconnaître le timbre de quelques instruments à percussion.
Ce qui sera matière à être déjà de la pré-pré-lecture se découvre dans le cadre de la séance de musique… Bel exemple d’interdisciplinarité sans artifice !De même, la comptine de La Souris Verte[3] sert de matériau à la partie « chant » de cette première séance de l’année. Même si les plus grands la connaissent certainement déjà, l’activité de création musicale et langagière sur laquelle elle débouchera compense largement ce qu’un adulte peut éventuellement prendre pour un inconvénient.
S’il dispose d’une salle dégagée pour cette séance, il profite du moment d’écoute musicale pour commencer la séance de préparation à l’écriture[4] des élèves de Grande Section en distribuant les rubans et en laissant les élèves évoluer sur une valse... Sinon, cet exercice sera remis à la séance d’éducation physique de l’après-midi ou du lendemain matin.
2) Préparation à l’écriture / Lecture : exercices écrits
Pendant que les plus jeunes se lavent les mains avant leur première séance d’écriture, les plus grands découvrent leur manuel de lecture. Il est ouvert à la première page et ils passent ces quelques minutes à lire, l’un après l’autre, les quelques lignes qui la composent[5]. Lorsqu’ils ont fini, le maître leur explique brièvement la consigne de l’exercice écrit qu’il a prévu[6]. S’il a le temps, il le commence avec eux pendant que les élèves de GS prennent connaissance du matériel proposé (voir Délier les doigts dans la progression proposée).
Le maître, libéré des aînés, peut alors diriger l’activité Gymnastique des doigts avant d’organiser le Jeu de saute-mouton proposé lui aussi dans sa progression[7].
3) Observation ou Arts Visuels[8]
Selon sa sensibilité, le maître a programmé une séance d’Observation ou d’Arts Visuels. Ce travail commun permet d’installer de nouvelles règles, de mettre en place de nouvelles habitudes. Chaque élève est appelé à participer, à s’exprimer, à faire preuve de créativité et de curiosité.
Comme dans les plus petites classes, les enfants participent tant à l’installation qu’au rangement. Ils prennent possession de leur classe, apprennent à s’entraider, à accompagner les plus jeunes, à s’associer pour être plus efficaces. Le maître (et l'ATSEM s'il y en a une) les encourage, les aide, leur simplifie la tâche tout en gardant à l’esprit qu’il vise leur autonomie, leur joie d’apprendre, leur bonheur de se voir progresser à chaque instant.Il installe par petites touches des connaissances, des savoir-faire, félicite les réussites même partielles, minimise les échecs et assure qu’ils sont temporaires parce que les enfants sont là pour grandir et pour apprendre… Son rôle, c’est d’instaurer l’effort et la discipline librement consentis, chers à Célestin Freinet et de « libérer les enfants qu’on lui confie des obstacles qui empêchent le développement de sa vie[9] ».
4) Lecture, Littérature : Compréhension, Expression, Mémorisation
Une dernière et très courte séance de lecture pour les CP. Ils reprennent encore une fois leur manuel de lecture pour savoir ce qu’ils liront à la maison, à l’étude ou à l’aide aux devoirs.
Cette courte séance permet au maître de s’assurer que, même si l’enfant n’a pas l’encadrement familial ou institutionnel qu’ont ses camarades, il aura à quatre reprises, et sous quatre angles différents, lu et compris le matériau d’étude du jour. Les élèves de Grande Section à nouveau présents à la séance de lecture de leurs camarades de CP et ils sont les témoins de leurs progrès (en cas de groupe très remuant, le maître a prévu un exercice de motricité fine : coloriage de toutes petites surfaces, type mandala, piquage, type Coloredo, petits objets à trier et ranger).On conclut cette séance par une quinzaine de minutes autour d’un conte ou d’un poème qui va être lu, décortiqué, observé et commenté par les élèves, encouragés par leur maître à comprendre presque mot à mot le texte qu’il leur lit. Pour soutenir l’attention des plus jeunes, il utilise au besoin des marionnettes, des petits personnages, un décor, tout ce qui permettra aux enfants d’aider leur imagination à grappiller suffisamment d’éléments pour vivre l’intrigue qui se noue devant eux.
Le but est d’inviter à la table du savoir tous les enfants, des plus démunis aux plus favorisés, de gommer leurs différences par le haut, en donnant plus, toujours plus, à ceux qui sont les plus dépourvus.
La classe à double-niveau, grâce au plus grand écart d’âge entre les plus jeunes et les plus âgés, y participe car elle normalise les différences de stades de développement. Le maître y joue sa part si, toute la journée, il rappelle son rôle de facilitateur, heureux d’offrir son savoir à ceux qu’il accueille et avec qui il partage sa journée d'école.5) Récréation
6) Éducation Physique et Sportive
La journée se termine. Après quelques minutes en classe, consacrées aux rangements[10], la petite troupe finit sa journée comme elle l’a commencé : en se dépensant physiquement « en vue d’une série de buts intéressants, canalisant ainsi l’irréfrénable activité [des enfants], dans l’ordre et vers le perfectionnement[11] ».
Interdisciplinarité oblige, les exercices physiques qu’il propose entraînent ses élèves vers la perception de l’horizontalité et du sens gauche-droite de l’écriture, avec un saute-mouton aménagé, puis vers l’écoute musicale et le geste d’écriture, avec un moment de danse avec rubans, vers le vivre-ensemble et le comptage, avec un jeu du type Filet du pêcheur…
En fin de séance, cinq minutes de relaxation détendent les élèves avant leur départ vers d’autres lieux. Le maître en profite pour rappeler à ses élèves de Cours Préparatoire qu’ils doivent montrer à leurs familles comme ils savent bien lire la première page de leur livre de lecture et tout le monde se souhaite une bonne soirée et se dit à demain.
Premières semaines
Le lendemain et les jours suivants, le maître continuera à faire de son groupe d’élèves une classe, c’est-à-dire un groupe d’enfants qui apprennent et réfléchissent ensemble, aidés par un adulte bienveillant qui est là pour eux.
Le rythme des journées, toujours identique, permet l’acquisition de repères temporels sûrs. Le maître aide ses élèves en variant le moins possible l’ordre et la durée des activités. Ses élèves étant encore un peu jeunes pour lire l’heure sur l’horloge de la classe, il s’aide pour ponctuer le temps d’un minuteur qui sonne lorsqu’il est temps de changer d’activité ou de se préparer pour la suivante.
L’acquisition du rythme hebdomadaire, ainsi que le nom des jours commence à venir, au moins pour les plus âgés, grâce aux activités variées de milieu d’après-midi : « Le lundi, c’est le jour des arts visuels. Le mardi, en sport, nous pouvons aller dans le gymnase. Le mercredi, c’est le jour où nous n’avons école que le matin... »
Le maître n’impose rien, il se contente de donner chaque jour la date et de rappeler quelles activités sont prévues à l’emploi du temps. Il sait que tout viendra en son temps si l’organisation du temps qu’il propose est claire et routinière.Les activités sportives sont le point de départ de la journée de classe. Les élèves savent que les jeux qu’ils y pratiquent, les attitudes qu’ils y travaillent, l’organisation qu’ils y mettent en place seront repris sous une forme différente en classe, au cours des apprentissages que les adultes qualifient de fondamentaux[12].
Les plus jeunes abandonnent à leur rythme la petite enfance pendant que leurs aînés entrent de plain pied dans le monde des élèves. Chaque journée amène son lot de progrès, aussi bien en expression orale et écrite, qu’en découvertes sensorielles, aptitudes physiques, savoirs mathématiques, connaissances culturelles... Le vocabulaire et la syntaxe, travaillés essentiellement à travers l’oral en ce début d’année, s’invitent à longueur de journée, à travers toutes les activités qui, chacune à sa manière, sollicite l’effort d’expression et de mémorisation de tous.
Tous ces moments d’apprentissages assurent la prise d’autonomie et l’envie d’apprendre de chacun. La cohésion du groupe s’installe et les enfants prennent plaisir aux grands jeux que le maître organise et où chacun a sa place, au milieu de tous ses camarades. Ils ont compris que les moments d’activité collective sont tous chargés d’une dimension instructive.
Les apprentissages, grâce à leur place prépondérante et leur caractère routinier, se structurent. Chaque jour, chaque élève sait qu’il va au cours des moments institutionnalisés s’exercer avec ses camarades de classe à prendre des repères de plus en plus fins dans le monde de l’écrit, entendu, tracé, vu et même lu, pour les élèves de CP. Chacun sait où il va, confiant dans ses capacités car épaulé par son maître et ses camarades de classe qui avancent avec lui, sur le même chemin.Dans la même série :
Tous les chapitres déjà mis en ligne sont répertoriés dans la Table des matières évolutive que vous trouverez dans la partie Sommaires.
Pour la partie présente :
I. Idées reçues ; II.1. Deux niveaux dans la même classe ; II. 2. C. Mise en route - GS/CP (1) ; II. 2. C. Mise en route - GS/CP (2) ; II. 2. C. Mise en route - GS/CP (3).Notes :
[1] Pour des conseils de tenue d’une séance de musique en GS/CP, voir Pour une Maternelle du XXIe siècle, chapitre XIII.
[2] Selon la progression de Thierry Venot, dans De l’écoute des sons à la lecture, grip-éditions : I. Se repérer dans l’espace et le temps, A. les suites de sons et les jeux d’écoute.
[3] Ou toute autre comptine pouvant être mise en images comme celle-ci l’a été dans I. De l’écoute des sons à la lecture¸ Se repérer dans l’espace et le temps, B. La souris verte.
[4] Voir suggestion de progression ici : L'écriture cursive en grande section : activités préparatoires
[5] Bon critère de choix pour une méthode de lecture : si l’enfant ne peut pas faire ce travail quasiment seul, avec une aide minime de l’adulte, dès le premier jour, c’est que c’est une mauvaise méthode qui ne motivera que les plus habiles, décourageant tous les autres. L’enfant aime se voir progresser à vue d’œil et nous devons en tenir compte.
[6] Sur fiche sans doute. L’enfant est encore trop peu exercé pour gérer une copie sur le cahier. La plupart des méthodes de lecture proposent un cahier d’exercice associé qu’il suffit de suivre page à page ; il est d’autant plus utile en classe à plusieurs niveaux qu’il permet au maître de se consacrer à l’un des autres groupes sans crainte de voir les élèves s’ennuyer ou se perdre dans des activités mal adaptées à la méthode.
[7] Les élèves y rejoueront, en vrai, le soir même pendant la séance de motricité.
[8] Excellente progression pour le CP, facilement adaptable pour des élèves de GS, sur ce site : http://ouiphi.eklablog.com/une-progression-pour-le-cycle-2-c25389902
[9] M. Montessori in Pédagogie scientifique, tome 1, L’ambiance, Liberté du développement, p. 47
[10] Tables, placards de jeux, cartables des plus âgés… On peut aussi placer ces quelques minutes juste avant la récréation.
[11] M. Montessori, opus cité.
[12] Pour beaucoup, cela se résume au triptyque « écriture, lecture, calcul », oubliant au passage l’enseignement oral du vocabulaire et de la syntaxe, nourri par toutes les activités d’écoute et d’échanges autour de la littérature et de l’observation des mondes et des époques, proches ou plus lointains et l’acquisition d’aptitudes motrices et particulièrement manuelles déliées.
Tags : multiâge, double niveau, maternelle, élémentaire, grande section, CP
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