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Écrire et Lire au CP : GP 2 (2)
Comme promis récemment, voici le Guide Pédagogique du Livret 2. Et comme d'habitude, c'est du « très copieux », très détaillé qui peut faire peur... parce que ça paraît très chronophage et très exigeant.
Alors, déjà, pour le chronophage, une règle d'or !
La journée de classe doit comporter peu ou prou 2 h 30 de français, ni plus, ni moins.
Dans ce domaine, on prend en compte :
Langage oral :
♥ Écouter pour comprendre des messages oraux (adressés par un adulte ou par des pairs) ou des textes lus par un adulte En lien avec la lecture
♥ Dire pour être entendu et compris, en situation d’adresse à un auditoire ou de présentation de textes En lien avec la lecture
♥ Participer à des échanges dans des situations diverses (séances d’apprentissage, régulation de la vie de la classe)
♥ Adopter une distance critique par rapport au langage produit
Lecture et compréhension de l'écrit :
♥ Identifier des mots de manière de plus en plus aisée En lien avec l’écriture : décodage associé à l’encodage, l’analyse de la langue et le vocabulaire.
♥ Comprendre un texte et contrôler sa compréhension En lien avec l’écriture
♥ Pratiquer différentes formes de lecture : lire pour réaliser quelque chose ; lire pour découvrir ou valider des informations sur… ; lire une histoire pour la comprendre et la raconter à son tour ; lire pour enrichir son vocabulaire ; lire pour le plaisir de lire.
♥ Lire à voix haute En lien avec le langage oral
Écriture :
♥ Copier
♥ Écrire des textes en commençant à s’approprier une démarche En lien avec la lecture, le langage oral et l’étude de la langue
♥ Réviser et améliorer l'écrit qu'on a produit En lien avec l’étude de la langue
Étude de la langue :
♥ Passer de l'oral à l'écrit
♥ Construire le lexique
♥ S’initier à l’orthographe lexicale
♥ Se repérer dans la phrase simple
♥ Maîtriser l’orthographe grammaticale de base
Tout ceci, sans sauter une ligne, est pris en compte par ce manuel.
En effet, chaque jour, les enfants, suite à leur lecture du texte de la page de gauche, au cours de laquelle ils ont travaillé l'identification des mots de manière de plus en plus aisée, relu éventuellement par l'adulte si le besoin s'en fait sentir, s'expriment à l'oral, exercent leur compréhension de l'écrit.
Ils travaillent leur lexique, améliorent les textes produits, copient, s'initient à l'orthographe lexicale, se repèrent dans la phrase simple et maîtrisent peu à peu l'orthographe grammaticale de base.
Donc en effet, c'est chronophage, mais normal
car tout le français est pris en charge. C'est une méthode au sens propre du terme et comme toute méthode, elle se suffit à elle-même. Et si on dépasse les 2 h 30, c'est que nous délayons trop et que nous voulons trop faire de la journée en cours la dernière de l'existence de ces enfants, celle où tout ce qu'ils n'auront pas appris sera définitivement et irrémédiablement perdu.
Après, bien sûr, si on veut travailler à côté des « rallye lecture », des exploitations d'album, des projets d'expression écrite, ou même des « ateliers de sons », ça fait trop et on est déçu parce que rien n'est bien fait. Dans ce cas, je vous conseille fortement de passer votre chemin et de construire une méthode personnelle à base de tout ce que vous voulez quitte à, de temps en temps, fouiner dans votre exemplaire de Écrire et Lire au CP, livret 2 pour trouver l'inspiration d'un texte, d'un exercice, d'une dictée, d'un tableau de son...
Mais pas plus, vous seriez déçus et donneriez à l'extérieur une mauvaise image de la méthode.
Une méthode pour « vrais paresseux »
Car, si je peux me permettre, en réalité, c'est une méthode pour « vrais paresseux », c'est-à-dire personne qui cherche à être efficace à moindre coût. Le genre de méthode qui permet de sortir de classe le soir en ayant la conscience claire pour ce qui s'est passé le jour même et ce qui se passera le lendemain et... rien d'autre à faire.
Aujourd'hui, au cours des quatre séances de la journée (2 h à 2 h 30 en tout), nous avons « fait » la page 18, Pinocchio est furieux.
Les élèves ont lu le texte et dialogué autour de ce qu'ils ont compris. Ils ont, comme d'habitude, adopté une distance critique par rapport au langage lu et produit.
Ils ont été confrontés à un lexique ambitieux qu'ils ont associé à des mots plus connus : l’aube (le lever du soleil), s’instruire (apprendre), sot (stupide, bête), agir (faire), la barbe (expression familière, zut), faire pitié (rendre triste pour lui), s’emparer (prendre, attraper), à toute volée (le plus fort possible).
Ils ont découvert puis appris à décoder et encoder les graphies eu et œu. À cette occasion, ils se sont initiés à l'orthographe lexicale et à ses chausse-trapes que nous leur avons signalées (le feu, un jeu, jeudi, il va mieux, le chiffre deux, une fleur, le docteur, un œuf, le cœur, ma sœur).
Ils ont copié des phrases et remarqué par la même occasion à la fois une règle de fabrication de l'adjectif à partir du nom et la règle d'orthographe correspondante (Pinocchio est furieux. - Le chemin est boueux. - Le grillon est vieux. - Le lion est dangereux.).
Ils ont encore approfondi leur capacité à reconnaître automatiquement la graphie eu en travaillant tous ensemble au tableau la règle d'écriture des noms en eur au masculin correspondant à des noms féminins en euse (un voleur, une voleuse ; un patineur, une patineuse ; un joueur, une joueuse ; un menteur, une menteuse).
Enfin, en fin de journée, pour récapituler le travail fait, nous avons repris nos élèves les plus lents avec nous pour leur faire relire le grand texte, pendant que les autres copiaient une phrase qu'ils ont illustrée ensuite, travaillant à nouveau, copie, compréhension, imprégnation lexicale et grammaticale.
Et nous sommes d'autant plus tranquilles que le programme de demain est déjà tout tracé et que nous n'avons que quelques modèles d'écriture à faire sur les cahiers, quelques tableaux tout simples à préparer, juste en recopiant le livre, et quelques exercices à corriger sur les cahiers (la dictée a été corrigée en direct, pendant la séance elle-même).
Une vraie méthode de paresseux, je vous dis ! Une qui se pratique en classe devant les enfants et laisse l'enseignant libre de faire autre chose de ses soirées, une fois cahiers et tableaux prêts (environ 45 minutes en s'appliquant vraiment, mais on peut en avoir déjà fait la moitié ou plus pendant la pause méridienne).
Et pour l'exigence, maintenant...
L'exigence est réelle, incontestablement, mais elle est pour l'enseignant, pas pour les enfants.
L'enseignant doit faire feu de tout bois, tout le temps, quand il est devant sa classe.
Il fait lire un texte souvent difficile, plein de mots rares, inconnus des enfants.
Les enfants, eux, se contentent de déchiffrer des logatomes d'un genre un peu spécial puisque, même s'ils ne peuvent s'appuyer sur leur lexique mental pour « deviner » au lieu de lire, ils comprennent que lire, c'est chercher à comprendre du signifiant et non « faire du bruit avec sa bouche ».
Ils savent qu'ensuite, avec l'aide de leurs camarades de classe et de leur enseignent, ils vont tout décrypté, tout comprendre, tout simplifier. Et que si certains points restent obscurs, eh bien, ce n'est pas grave, ils comprendront mieux demain, ou plus tard, quand ils seront grands.
Il mène de nombreux débats en cherchant la participation de tous
Les enfants, eux, se passionnent juste pour « une histoire », chacun à son niveau.
Là où Abel ne saura dire que : « Eh ben, Pinioko, eh ben, il a tué la 'tite bête. Schratch ! Avec son truc, là, le machin en bois... », Baptistine dira : « Pinocchio était très fâché parce qu'il savait que le Grillon-qui-parle avait raison. C'est pour ça qu'il l'a tué. Il était trop vexé. »
Pourtant Abel comme Baptistine auront joué leur rôle d'élève, pour ce jour, cette heure et cette histoire.
Un autre jour, puis un autre, puis encore un autre, avec une autre histoire, puis une autre, puis encore une autre, aideront Abel comme Baptistine à
participer spontanément à des échanges en restant dans le sujet du propos (interroger, montrer de la curiosité, demander des explications, apporter des réponses à des questions posées) et en respectant les règles de prise de parole instaurées en classe, adapter son registre de langue à son ou ses interlocuteurs, proposer des arguments pour justifier son point de vue, rapporter clairement un événement ou une information simple en utilisant des organisateurs du discours tels que « parce que…, alors…., ensuite…. », décrire des images en utilisant un vocabulaire précis, réagir aux propos d’un pair ou du professeur en réinvestissant des expressions telles que : « je partage l’opinion de… », « je souhaiterais compléter… » et relater un événement vécu en utilisant des temps du passé (passé composé, imparfait) (ATTENDUS DE FIN D'ANNÉE DE CP - 2019).
Il cherche à obtenir l'automatisation des correspondances grapho-phonémiques à tout moment
Et il est là, sans arrêt, pour empêcher les élèves de les oublier. Il les rappelle inlassablement pendant la lecture des logatomes et mots les contenant mais aussi pendant la lecture du texte, la dictée, la lecture et l'écriture des exercices écrits. Il persévère même pendant les autres activités de la journée et ne perd pas une occasion de montrer que dans le texte de QLM, dans l'énoncé du problème de mathématiques, la poésie qu'on lit ensemble le soir, il y a un eu ou un œu qu'ils savent maintenant déchiffrer.
Les élèves savent qu'il ne les laissera jamais « en panne » devant un mot indéchiffrable et qu'il se contraindra, même s'il trouve que, décidément, Corentin a une mémoire de poisson rouge, à lui re-re-re-re-dire que O et N, ça se prononce [õ] ou que la lettre H ne se prononce [ʃ] que lorsqu'elle est « mariée avec la lettre c ».
Il s'efforce de leur donner des repères dans la langue orale et écrite
C'est à lui que revient l'immense responsabilité de savoir jusqu'où il doit aller dans l'explication d'un texte, d'un mot, d'une notion, d'un concept, pour nourrir Delya, férue de littérature, sans perdre pour autant définitivement Elton qui ne parle français qu'à l'école.
Les enfants, eux, vivent l'histoire qu'on leur raconte à leur niveau, perçoivent parfois juste le temps de l'explication le sens du mot rare qu'ils viennent de déchiffrer, entendent même juste d'une oreille que nage, nageur, nageuse et que danse, danseur, danseuse... et ce n'est pas grave.
Leur vie ne s'arrête pas au CP et nos collègues de CE1, CE2, CM1, CM2 puis leurs professeurs de collège puis de lycée continueront le travail, année après année, avec exigence, pour eux, et tolérance, pour leurs élèves qui méritent le meilleur mais ont la vie devant eux pour l'aborder.
Il combat le « bruit avec la bouche » et le « pilote automatique »
et se casse réellement la tête à le combattre seconde après seconde en classe, en lecture comme en écriture ou en langage oral, en français comme en mathématiques, en QLM, en Arts, en Langue étrangère et en EMC parce que son métier, son rôle, sa mission sont de donner à tous ses élèves tout ce qu'il pourra leur donner pour qu'un jour, ils puissent devenir tout ce qu'ils voudront devenir.
Et ça, c'est la seule exigence qu'il réclame à ses élèves aussi, ne les laissant jamais faire sans comprendre, même a minima, ce qu'il leur demande de faire.
Il brave l'ennui d'une re-re-relecture d'un texte qu'il connaît par cœur
Parce qu'il sait qu'on ne pratique bien une méthode que lorsqu'on la connaît par cœur et que changer tous les deux ans, c'est se priver de la maîtrise de son outil de travail.
Il est conscient que c'est de cette connaissance des textes qui composent la méthode qu' on sait où les élèves buteront (ils ont buté chaque année), où on se fera un petit plaisir (toutes les années, on a eu une ou plusieurs pépites grâce à ce texte, à ce mot, à cette idée), où il convient de préparer son public en amont (la chèvre de Monsieur Seguin, c'est trop triste, maîtresse, plus jamais je ne veux lire une histoire aussi triste), où au contraire, il faut tenir sa langue et faire tenir leur langue aux « initiés » qui connaissaient déjà l'histoire.
Alors il supporte de relire Pinocchio qu'il connaît depuis qu'il a sept ans, la Chèvre et les Sept Chevreaux que sa maîtresse de Moyenne Section lui avait déjà lu en 1994/1995 ou encore Le trésor du pirate qu'il ne connaissait pas avant (et pour cause) mais qu'il a déjà fait lire à ses élèves de 2019/2020, ses élèves de 2020/2021 et qu'il s'apprête à faire relire pour la troisième fois cette année, alors qu'il n'a plus rien à y découvrir !
Ses élèves, eux, se régalent parce qu'ils découvrent des histoires qu'ils ne connaissaient pas mais aussi parce qu'ils se rendent compte que lire soi-même, ce n'est pas pareil qu'entendre quelqu'un nous lire une histoire.
PS : Pour se consoler, l'enseignant frustré, contraint à relire éternellement en classe l'histoire de Géraldine, la girafe, et de Jojo, le singe savant, peut :
♥ fréquenter les librairies de son quartier,
♥ s'acheter une liseuse,
♥ télécharger des livres sur internet
♥ s'inscrire à la médiathèque municipale ou départementale,
♥ s'abonner à une revue littéraire,
♥ fouiller le rayon livre de son supermarché ou les boîtes à lire qui fleurissent dans les villes et les villages...
Il peut même sans être ridicule n'y choisir que des œuvres de la littérature de jeunesse et les feuilleter le soir à la veillée puisqu'en utilisant Écrire et Lire au CP, il n'aura pas 36 000 trucs à préparer, imprimer, découper, plastifier, ranger dans des boîtes Ikéa de tel format qu'il aura payé de sa poche pour faire de sa classe un modèle pour sa page Pinterest...
Le guide pédagogique complet :
Télécharger « GP Livret 2.pdf »
Pour consulter le reste de la méthode :
Écrire et Lire au CP (Livret 1, 1re partie)
Écrire et Lire au CP, 1er Livret, 2e Partie
Pour afficher :
Écrire et Lire au CP - Graphies en images
Écrire et Lire au CP - Graphies en images (2)
Et le guide pédagogique :
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