• Apprendre à lire, c'est vraiment simple ! (3)

    Apprendre à lire, c'est vraiment simple ! (3)
    Merci à Zaubette à qui j'ai volé cette image !

    II. De cinq à sept ans :
    (Suite)

    2) Observer, de l’intérêt porté aux signes à l’analyse de la langue écrite :

    a) L’année de Grande Section :

    La Petite et la Moyenne Section ont appris aux élèves à s’intéresser, tous ensemble, à un sujet commun présenté par l’enseignant et à l’observer finement en se servant de leurs cinq sens.
    Elles leur ont aussi fait découvrir qu’un code commun permettait de se comprendre lorsqu’on désignait et qualifiait des êtres, des objets, des actions.
    Cet intérêt pour l’observation et cette capacité à concevoir et utiliser des symboles vont maintenant servir à l’apprentissage de la lecture, depuis ses premières règles jusqu’à l’acquisition de ses irrégularités et exceptions.

    Dans la méthode que j’utilise[1], c’est grâce aux instruments de musique et par le biais de la création d’une partition musicale que les élèves renouent avec le codage. Le maître en profite pour fixer le sens de gauche à droite de la lecture. Les élèves apprennent à utiliser les mots avant, après, au début, à la fin, premier, deuxième, dernier. Ces mots leur seront indispensables, plus tard, lorsqu’il s’agira de se repérer dans un mot, une phrase ou une page de lecture. Dans cette première partie, en tout début d’année de GS, ce sont des photos d’objets qui servent de code commun.
    À ce code totalement transparent succède un code plus symbolique : le dessin. Les enfants jouent à lire une comptine connue puis à lire et écrire des versions détournées. Ils remplacent les étiquettes racontant que la souris verte qui court dans l’herbe est trempée dans l’eau et se transforme en un escargot tout chaud par d’autres animaux qui effectuent d’autres actions dans d’autres lieux et sont trempés dans d’autres liquides et transformés en autres choses chaudes ou froides !
    C’est encore un code très sommaire et très réaliste mais déjà le symbole apparaît puisque le dessin du soleil remplace l’expression tout chaud alors que celui d’un bonhomme de neige traduit l’expression tout froid. La multiplicité des étiquettes permettant la création d’une grande quantité d’écrits signifiants prépare les élèves à la plasticité parfaite du code alphabétique qui, avec vingt-six malheureux symboles, peut tout dire en étant compris de tous !

    Apprendre à lire, c'est vraiment simple ! (3)
    De l'écoute des sons à la lecture, chez Zaubette aussi.

    Au mois d’octobre, l’analyse de plus en plus fine de la chaîne orale conduit les élèves à la notion de phrase et à celle de mot. D’autres symboles, encore moins transparents, remplacent chaque mot écrit. Les verbes aimer, manger, regarder sont traduits par un cœur, une bouche, des yeux. Les premiers mots écrits à l’aide de lettres apparaissent (le ,la). J’y ajoute personnellement les prénoms de mes élèves écrits en script avec la majuscule (Théo, Leïla, Alexandre, Lou-Anne, …). Les enfants approfondissent le travail commencé avec La Souris Verte puisque, désormais, chaque mot est associé à une étiquette. Ils écrivent et lisent quantité de phrases dont ils apprennent à compter les mots afin de savoir combien d’étiquettes ils auront à utiliser. Ce jeu peut même se poursuivre en Éducation Physique où c’est à l’aide de cerceaux qu’on symbolise chacun des mots de la phrase.

    Même si la méthode ne le propose pas, on peut concevoir que cette activité va perdurer une partie de l’année de Grande Section et mêler les connaissances acquises en écriture à celles relatives à la désignation. On pourra ainsi faire voisiner un temps des mots traduits par un dessin ou un symbole et d’autres, écrits avec les lettres que l’on connaît. On peut même, sans grand danger, contrairement à ce qu’on peut lire ici ou là, avoir quelques étiquettes sur lesquelles sont inscrits des mots qui ne sont pas déchiffrables en totalité par les élèves. Il suffit de rester très parcimonieux[2] et de ne pas exiger que l’enfant sache l’écrire seul sans modèle.

    Lors de ces activités sur les mots, les élèves ont parfois buté sur les mots constitués de plusieurs syllabes, les considérant comme plusieurs mots. En s’appuyant sur la compréhension du discours oral, bien établie chez l’enfant de cinq ans, la maîtresse a aidé au passage de ce cap, préparant à bas bruit l’acquisition suivante : la syllabe.
    Cette partie du programme n’a pas besoin d’être autant travaillée à l’oral que le font certaines méthodes. Généralement les élèves deviennent très vite experts.
    En revanche, si l’on veut qu’apprendre à lire ce soit vraiment simple, et que cette analyse du mot en syllabes serve à cela, ce sont les syllabes écrites qui doivent être le matériau de base de notre observation, même lorsque, comme alors, on reste à l’oral. Elles permettront ainsi de servir l’analyse du code et rendre les élèves réellement acteurs de leur apprentissage de la combinatoire.

    Lorsque nos élèves de Grande Section en sont arrivés là dans leur observation de la langue écrite et en ont déduit l’importance du code alphabétique, ils ont parcouru leur part du chemin. Ils vont maintenant essentiellement travailler l’apprentissage de ce code.
    Ils pourront continuer à observer et analyser l’écrit lors de toutes les utilisations que leur maître en fera dans la partie Enrichir sa culture de leur programme d’apprentissage de la lecture. Mais cette utilisation, encouragée bien entendu par l’adulte, ne sera pas soumise à résultats tangibles obligatoires.

    b) L’année de Cours Préparatoire :

    Apprendre à lire, c'est vraiment simple ! (3)
    Écrire et Lire au CP, livret 1, leçon 1.

    De l’avis de leurs enseignants, ceux de nos élèves qui ont fréquenté une Grande Section ouverte à l’utilisation fonctionnelle de l’écrit attendent, avec confiance l’entrée au Cours Préparatoire. Ils sont sûrs d’eux et ont envie d’en savoir plus, très vite. Les autres, souvent plus anxieux, ont besoin de notre soutien pour prendre confiance en eux et découvrir leurs capacités à traiter en même temps les apports de leurs yeux, de leurs oreilles et de leurs compétences déductives et mnésiques.

    Quel que soit le cas, les premières semaines revoient gentiment les bases de l’observation du langage écrit. Une très courte phrase ou quelques mots prononcés à voix haute, lentement, permettent à nos élèves d’amorcer ou réamorcer leurs capacités d’analyse du langage oral et écrit jusqu’à isoler un son qu’ils apprennent ou réapprennent à symboliser par une lettre.

    Ceux qui partent d’une phrase se réapproprient aussi l’analyse de la chaîne orale en mots. L’observation fine de ces mots leur permet d’en analyser et mémoriser les caractéristiques visuelles. Cela leur permettra de les discriminer les uns des autres.

    Les capacités d’analyse de nos élèves maintenant aguerris à l’utilisation des lettres permettent en revanche qu’ils ne soient plus apportés un à un. Cependant, la liste doit être limitée en quantité et, comme en Grande Section, il est nécessaire que ces mots soient indispensables et régulièrement utilisés. Elle sera de plus limitée dans le temps puisque, très vite, c’est par la combinatoire que nos élèves apprendront à les déchiffrer au fil de leur lecture.

    Leur mémoire ainsi libérée d’un travail devenu inutile pourra alors se consacrer à fixer le résultat de nouvelles observations qui aboutiront à une analyse de symboles encore plus abstraits que celle des différents graphèmes utilisés par la langue française.

    Tout en leur apprenant à coder et décoder leur langue, le maître est amené à leur présenter les morphèmes grammaticaux et lexicaux. Ce repérage va conduire les élèves sur les chemins de l’étude de la langue. En analysant et regroupant les morphèmes grammaticaux, ils vont développer une connaissance intuitive des catégories grammaticales les plus évidentes[3]. Leur enseignant nommera ces catégories et les engagera à appliquer les accords qu’ils ont appris à repérer.

    Apprendre à lire, c'est vraiment simple ! (3)
    Écrire et Lire au CP, livret 1, leçon 12.

    Et c’est l’apprentissage du code lui-même qui, en leur faisant découvrir un à un des morphèmes lexicaux, leur apprendra à enrichir leur vocabulaire de manière structurée et à déduire intuitivement le sens d’un mot des différentes parties qui le composent[4].

    Apprendre à lire, c'est vraiment simple ! (3)
    Écrire et Lire au CP, livret 2, leçon 11.

    Les élèves multiplient ainsi les expériences et commencent à emmagasiner les régularités qui les aideront à écrire leur langue en la comprenant et pour être compris. À la fin du Cours Préparatoire, s’ils lisent tous les mots, en comprennent tous ceux dont un enfant de sept ans a l’usage et peuvent justifier certaines relations grammaticales qui existent entre eux grâce au sens des phrases qu’ils forment, ils sont encore bien loin d’en maîtriser l’écriture autonome. Ce sera le rôle des quatre années d’élémentaire suivantes qui, débarrassées de l’apprentissage du code écrit, pourront s’y consacrer avec profit.

    À venir, le prochain chapitre, toujours dans la partie "De cinq à sept ans" : Lire, de l’apprentissage du code à la lecture courante

    Pour lire le reste de l'article :

    Apprendre à lire, c'est vraiment simple (1) !

    Apprendre à lire, c'est vraiment simple (2) 

    ...

    Apprendre à lire, c'est vraiment simple (4) !

    Apprendre à lire, c'est vraiment simple (5) !

    Apprendre à lire, c'est vraiment simple (6)

    Notes :

    [1] De l’écoute des sons à la lecture, T. Venot.

    [2] Pas plus d’une dizaine, en plus des prénoms. Ils doivent être indispensables et régulièrement utilisés, apportés un par un, très différents les uns des autres, au moins pour les premiers, soigneusement et méthodiquement observés lors de leur distribution. Dès qu’ils seront totalement analysables, leur étiquette disparaîtra de la boîte de la classe.

    [3] Verbe, nom commun, nom propre, article, adjectif qualificatif, pronom personnel sujet…

    [4] Puisqu’un pommier est un arbre qui donne des pommes et qu’un poirier est un arbre qui donne des poires, un arbousier est un arbre dont le fruit s’appelle l’arbouse. Comme le nom clochette désigne une petite cloche et que maisonnette désigne une petite maison, alors il existe un nom qui se dit voiturette et qui désigne une petite voiture


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  • Commentaires

    1
    Dimanche 25 Mai 2014 à 20:50

    OoOohh ma petite souris ! happy

    Je tiens donc à témoigner que les élèves adorent la partie sur la Souris Verte, que les élèves sont toujours enthousiastes face à toutes les nombreuses activités de De l'écoute des sons à la Lecture et que cette méthode fonctionne très très bien en GS.

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    2
    Mercredi 28 Mai 2014 à 09:06

    Je plussoie Zaubette. À condition qu'on garde présent à l'esprit que ce sont de petits enfants de cinq à six ans et que leur connaissance de la lecture est encore imparfaite.

    Sur le vif, c'est assez peu époustouflant comme progrès. Mais ce qui est notable, c'est que ces progrès concernent (presque) TOUS les élèves et qu'ils permettent un démarrage fulgurant au CP de (presque) TOUS.

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